camera oscura

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Terme italien signifiant " chambre noire ".

La " camera oscura " est un appareil d'optique permettant d'obtenir une image nette d'un objet dont on désire généralement faire le calque. Il s'agit d'une sorte de boîte dans laquelle la lumière pénètre seulement par un petit trou et qui est fermée à l'opposé par un papier blanc peu épais ou un verre dépoli. On peut aussi placer le dépoli horizontalement au-dessus de la boîte. Il faut en ce cas que l'image soit réfléchie à l'intérieur de la boîte par un miroir incliné. On peut encore perfectionner cet instrument en utilisant une lentille convergente au lieu de se contenter d'un simple trou. L'image est d'autant plus lumineuse que la lentille est plus grande. La distance entre cette dernière et la paroi doit alors être sensiblement égale à la distance focale de la lentille.

On a aussi réalisé des boîtes formées de deux parties coulissantes permettant d'obtenir une image nette quelle que soit la distance de l'objet.

L'histoire de la photographie est intimement liée à celle de la peinture : elle a été inventée par des peintres, pour des peintres, qui en conçurent l'idée dès le xve s. pour apporter des solutions toujours plus satisfaisantes aux problèmes posés par la peinture comme représentation du monde réel sur une surface plane, notamment le problème de la perspective. Niepce (1765-1833), Talbot (1800-1877) et Daguerre (1787-1851) n'ont fait que développer chimiquement et fixer l'image projetée par la camera oscura, dont Léonard de Vinci, reprenant un thème platonicien, explique le mécanisme et à laquelle Giovanni Battista della Porta suggère dès 1588 d'ajouter une lentille convexe pour donner plus de luminosité à l'image ainsi projetée. C'est surtout chez les peintres de la vie quotidienne dans la Hollande de la seconde moitié du xviie s. (Vermeer de Delft, Hoogstraten) et chez les védutistes italiens des xviie et xviiie s. (Vanvitelli, Zucarelli, Canaletto et Bellotto) que l'emploi de la camera oscura fut systématique. Cet emploi est mis en évidence par des particularités de style propres à la vision optique : compression de l'espace en profondeur, grossissement exagéré et flou des détails au premier plan dû à la réfraction de la lumière (Vermeer de Delft a su tirer de ce dernier trait un parti esthétique voulu). Déjà Canaletto mettait les artistes en garde contre l'incorrection de la perspective telle que la restitue la camera oscura. Servante du peintre, destinée à lui faciliter l'approche du réel, celle-ci lui impose déjà ses lois et ses déformations et l'en détourne : on retrouvera ce paradoxe dans les rapports photographie-peinture.