Paris Bordone ou Paris Bordon
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre italien (Trévise 1500 – Venise 1571).
Vasari, qui n'avait pas fait mention de Bordon dans son édition des Vies parue en 1550 à Florence, écrivit la vie de Bordon en 1568 après avoir rencontré l'artiste à Venise en 1566. Il donne sur lui un témoignage capital, mais malheureusement souvent imprécis. Dès 1518, Bordon est cité comme peintre à Venise, où il se forma sous l'influence de Titien et de Giorgione il reprend d'abord les thèmes et la technique de ces deux maîtres (Mariage mystique de sainte Catherine, v. 1525, Gênes, coll. R. A. Doria), puis, sous l'influence de Pordenone et de Lotto (la Vierge entre saint Georges et saint Christophe, v. 1525-26, Lovere, Accad. Tadini), sa palette devient plus froide, ses figures plus massives et plus dynamiques (la Pentecôte, Brera). Cette évolution vers un certain maniérisme encore présent dans le Baptême du Christ, v. 1540 (Milan, Brera) est probablement due au fait que Bordon a le plus souvent peint hors de Venise (à Vicence, à Belluno, à Crema, à Milan, à Trévise) et beaucoup voyagé à l'étranger. Selon Vasari (Vies, éd. de 1568), il aurait travaillé en Allemagne (pour les Fugger), à Augsbourg (où ne se retrouve pas sa trace). On ne sait s'il vint en France, à la cour de Fontainebleau, en 1538, comme le dit Vasari, ou bien en 1559, selon le témoignage de P. A. Orlandi (Abecedario pittorico, 1704, Bologne) et de D. M. Federici (Memorie trevigiane sulle opere del disegno, 1803, Venise), ce que son évolution stylistique semble plutôt indiquer. Ses peintures, rarement signées, datées et documentées, ont été parfois fort discutées : son chef-d'œuvre, la Remise de l'anneau au doge (Venise, Accademia), a probablement été commandé en 1533-1535 pour la Scuola Grande di San Marco, et exécuté v. 1545. On y retrouve, en effet, un motif tiré de l'architecte Serlio, dont il s'inspira aussi dans la Bethsabée au bain (v. 1543-1546, Cologne, W. R. M.). À cette époque, Bordon multiplie les perspectives dans les fonds de ses tableaux (Bethsabée à la fontaine, 1552, Hambourg, Kunsthalle) et les architectures fantastiques, d'un goût très maniériste (Annonciation, musée de Caen). Vigoureux portraitiste (Jérôme Craft, 1540, Louvre ; Joueurs d'échecs, musées de Berlin), Bordon est aussi le peintre mondain des belles Vénitiennes (Amants vénitiens, Brera : Portrait de femme, Londres, N. G.) et, vers la fin de sa carrière, d'allégories mythologiques maniérées et froides (Vienne, K. B. M. ; Ermitage), dont certaines ne sont pas sans verser finalement dans la redite et la convention.