Ignacio Zuloaga y Zabaleta

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Peintre espagnol (Eibar 1870  – Madrid 1945).

Né au cœur du Pays basque dans une ville célèbre par son artisanat de damasquineurs, il appartient à une lignée d'armuriers et d'orfèvres qu'on suit depuis le xviiie s. Le jeune Ignacio fit un séjour à Madrid, qui le familiarisa avec Ribera et Velázquez et lui fit découvrir Greco, puis un séjour à Rome, où il travailla dans l'atelier du sculpteur Folgueras, qui fut décevant.

C'est Paris, où il arrive en 1890, qui devient son lieu d'élection pour un quart de siècle ; en dépit de fréquents voyages, Montmartre demeurera jusqu'à la Première Guerre mondiale le port d'attache de Zuloaga. Adopté d'emblée par la " bande catalane " (Rusiñol, Casas, Utrillo), celui-ci expose dès 1891 chez Le Barc de Boutteville et devient bientôt l'un des fidèles de la Société nationale des beaux-arts. Parmi ses nombreux amis peintres se détachent Degas, Gauguin, Émile Bernard, Charles Cottet (qu'il conduira par la suite en Castille), Maxime Dethomas (dont il épousera la sœur en 1899). Plus tard viendront les écrivains comme Barrès (à qui il révélera Greco et dont il fera en 1913 un portrait célèbre devant le paysage de Tolède) ou Rilke.

Le tempérament de l'artiste, qui remonte consciemment à la tradition du Siècle d'or, qui s'attache à construire et simplifier les formes, parfois brutalement, l'associe à la réaction anti-impressionniste de 1890.

Zuloaga s'affirme comme le peintre d'une Espagne folklorique mais nullement fade et d'un expressionnisme parfois grinçant. Une " Espagne blanche ", celle de Séville, où tiennent le premier plan danseuses, gitanes et toreros, lui valut en 1895 ses premiers succès de public. Elle est remplacée bientôt par cette " Espagne noire ", Vieille-Castille immuable qui fut révélée au peintre en 1898 par l'installation de son oncle Daniel à Ségovie : laboureurs, muletiers, vieilles femmes enveloppées de noir, nains et goitreux devant des châteaux forts et des villes perchées — Ségovie, Turegano, Sepulveda —, sous des ciels d'orage à la Greco. Cette image figée et durcie, presque tragique, d'une Castille " essentielle " est celle-là même que fixera le " génération de 1898 ", dont les maîtres, Unamuno, Azorin, Baroja, seront amis et modèles du peintre ; elle décide de sa renommée en Espagne et de son succès mondial. Des expositions à Düsseldorf (1904) et à New York (1909) lui valent une pluie de commandes. C'est alors le portrait d'apparat — aristocrates, financiers, écrivains, actrices et mondaines — qui passe au premier rang de sa production et lui assure une fortune considérable. La Première Guerre mondiale ramène Zuloaga en Espagne. L'artiste vivra désormais au bord de la mer Cantabrique, à Zumaya. Il transporta dans la villa-musée qu'il avait fait construire ses collections parisiennes, dont le joyau était l'une des dernières œuvres de Greco, l'Ouverture du septième sceau, achetée par le Metropolitan Museum aux héritiers du peintre. Le côté " peintre mondain " de Zuloaga, la virtuosité conventionnelle et creuse, dont la Comtesse de Noailles (musée de Bilbao) et la Duchesse d'Albe (Madrid, musée de la Casa de Alba) sont des exemples trop connus, résistent mal à l'épreuve du temps. Mais d'autres portraits de parents ou de familiers (les Jeunes Toreros à Turegano du musée de Saint-Sébastien, Gregorio et Botero du musée Pouchkine de Moscou, les Sorcières de San Millán du musée de Buenos Aires), et d'autres secteurs moins connus réservent d'heureuses surprises, comme ses paysages. Paysage de Alhama et Paysage basque (M.E.A.C. de Madrid). Une rétrospective itinérante a été consacrée à l'artiste (Bilbao, Paris [1991], Dallas, New York et Madrid).