Hans Baldung
dit Baldung Grien
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre et graveur allemand (Gmünd 1484/1485 – Strasbourg 1545).
Issu d'une famille originaire de Souabe et implantée en Alsace depuis la fin du xve s., Hans Baldung pourrait avoir effectué son apprentissage en Souabe. Dès 1503, il est dans l'atelier de Dürer à Nuremberg, où il côtoie notamment Hans Süss von Kulmbach, Hans Schaüfelein. Baldung jouit auprès du maître d'une position privilégiée ; d'importantes commandes de cartons de vitraux lui sont confiées (verrières de l'église de Grossgründlach en 1505, à Saint-Laurent de Nuremberg et à la Sainte-Croix de Schwäbisch-Gmünd en 1506). Il conserve cette faveur durant les premiers temps de l'absence de Dürer, qui a gagné Venise en 1505. Importante est également à cette époque son œuvre graphique : bois gravés du Beschlossen Gart des Rosenkranz Mariä (Hortus conclusus du rosaire de la Vierge), publié en 1505, et un ensemble de gravures volantes où s'exercent sa verve et son imagination créatrice. C'est probablement en 1507 que Baldung peint les deux retables de l'Adoration des mages (musées de Berlin) et de Saint Sébastien (musée de Nuremberg), qui témoignent de l'influence successive de Dürer et de Lucas Cranach, avec cependant un souci très nouveau et très personnel du coloris et de ses effets de contraste. Ces ouvrages lui auraient été commandés pour la cathédrale de Halle par l'archevêque Ernst von Wettin. Baldung réapparaît à Strasbourg, où il acquiert le droit de bourgeoisie à Pâques 1509 et la maîtrise l'année suivante. Nourri des exemples de Cranach et de Dürer, il développe alors un style coloré et décoratif d'une grande hardiesse. Des commandes lui sont faites, notamment par le margrave Christophe de Bade (Image votive du musée de Karlsruhe), par Erhart Künig, commandeur du couvent de Saint-Jean de l'île Verte, à Strasbourg (1511, triptyque dont le panneau central représente la Messe de saint Grégoire [musée de Cleveland], le volet gauche Sainte Anne avec l'Enfant Jésus, la Vierge et saint Jean-Baptiste [Washington, N. G.] et le volet droit Saint Jean à Patmos [Metropolitan Museum]). Dans le même temps, ses bois gravés révèlent la force charnelle de son inspiration et établissent définitivement sa réputation.
En mai 1512, après avoir peint une Crucifixion pour l'hôtel strasbourgeois du couvent de Schütteren (musées de Berlin), l'artiste s'établit pour cinq ans à Fribourg-en-Brisgau, où il est chargé de peindre pour la cathédrale l'important retable du chœur et l'autel de la famille Schnewlin. La première de ces œuvres (achevée en 1516) illustre le Couronnement de la Vierge, sur le panneau central, et la Crucifixion, au revers, encadré de volets avec les figures de saint Pierre et de saint Paul et des scènes de la Vie de la Vierge. Le second ouvrage, dont la partie sculptée, peinte par lui, fut exécutée par Hans Wyditz, est consacré au Repos pendant la fuite en Égypte, entouré, sur les volets, des protagonistes de l'Annonciation, du Baptême du Christ et de Saint Jean à Patmos. Baldung exécute aussi une série de bois gravés et d'illustrations ainsi que les dessins et les cartons pour les vitraux de la cathédrale que réalisera l'atelier de Ropstein (Rappolstein = Ribeaupierre) sous la direction de l'Alsacien Hans Gitschmann.
À cette période très féconde succède, dès le printemps de 1517, sa nouvelle et dernière période strasbourgeoise. Baldung devient membre du Grand Conseil de la ville. L'introduction de la Réforme, à laquelle il adhère, ne provoque pas une baisse considérable de sa production, en raison du caractère profane de son inspiration. Son dernier tableau d'autel semble avoir été le Martyre de saint Étienne pour l'archevêque Albrecht de Brandebourg, en 1522. Au contact des humanistes et des réformateurs strasbourgeois de la première génération, d'esprit très libéral (les deux Sturm, Martin Bucer), son art cherche à rendre l'expression pathétique et le caractère des physionomies (sous l'influence particulière d'Indagine), puis, à partir de 1529, année de l'iconoclasme, s'inspire manifestement du théâtre humaniste. C'est ce qu'à des degrés divers révèlent des compositions telles que Pyrame et Thisbé (musées de Berlin), Hercule et Antée (musée de Kassel), Mucius Scevola (Dresde, Gg) et les Vierges à l'Enfant des musées de Berlin, de Nuremberg et de Vercelli. Au cours des dernières années de la carrière de Baldung, ses œuvres abandonnent beaucoup de leur enveloppe picturale au profit du plan et offrent de curieuses analogies avec le bas-relief (Vierge à l'Enfant, musée de Strasbourg). Même quand il emprunte à d'autres maîtres force détails (mouvement, ornements, architecture), son art se préserve de tout italianisme manifeste. Parmi ses derniers ouvrages, les Sept Âges de la vie (musée de Leipzig), le Chemin vers la mort (musée de Rennes ; ce dernier est sans doute une copie de l'original disparu) résument toute sa conception de la vie. Soutenus par un tempérament virulent, les tableaux de Baldung sont marqués du sceau de l'inquiétude et de la sensualité : sabbats de sorcières, couples de la femme et de la mort (musées de Vienne, d'Ottawa, de Bâle et de Berlin), allégories féminines (Munich, Alte Pin.). On retrouve les mêmes caractères dans ses portraits, d'une fidélité souvent brutale, et dans ses interprétations, dans un esprit humaniste, de thèmes religieux traditionnels.