Francesco Primaticcio, dit en français (le) Primatice

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Peintre italien (Bologne 1504  – Paris 1570).

Élève à Bologne d'Innocenzo da Immola, puis de Bagnacavallo, disciples de Raphaël, Primatice se forma surtout, dès 1526, à Mantoue sous la direction de Giulio Romano. On lui attribue, au Palais ducal, le Cabinet d'Apollon (dessin à Turin, Bibl. royale) et, au palais du Té, la Salle des stucs (Triomphe de Sigismond empereur, 1530). Primatice fut aussi marqué, à cette époque, par Corrège et Parmesan. En 1532, Giulio Romano l'envoya à sa place à Fontainebleau au service de François Ier : Primatice y retrouva Rosso, plus célèbre et mieux payé que lui. On lui confia la décoration de la Chambre du roi (1533 et 1535, Histoire de Psyché ), connue par un dessin (Louvre) et des copies qui nous permettent d'imaginer son décor de stucs et de fresques, d'une élégante symétrie, bien différent du décor varié et dynamique de Rosso. En même temps, Primatice commença à décorer la Chambre de la reine, dont seule la cheminée subsiste encore (1534-1537). En 1535, il travaillait au portique de la porte Dorée, entrée principale du château de Fontainebleau au xvie s. (Scènes de l'histoire d'Hercule), au pavillon de Pomone avec Rosso (1532-1535, détruit ; les Jardins de Pomone, dessin au Louvre), et commençait aussi la décoration de la galerie basse (1535-1542) au rez-de-chaussée du pavillon des Poesles (disparu ; dessins au Louvre).

La mort soudaine de Rosso, en 1540, allait lui permettre de mener sans partage sa carrière de décorateur : Primatice était alors en Italie, envoyé par François Ier pour en rapporter des œuvres d'art, surtout des antiques. Dès son retour à Fontainebleau, il compléta les décorations inachevées de Rosso. Il décora, peut-être à cette date ou avant, dans la galerie François-Ier, deux cabinets (supprimés), qui s'ouvraient au centre de la galerie, d'une Danaé, sujet placé auj. au milieu de la galerie (dessin au musée Condé de Chantilly), et d'une Sémélé, disparue. Il peignit ensuite le Cabinet du roi (1541-1545, détruit, dont nous connaissons la cheminée par des dessins ; la Forge de Vulcain, Louvre) et le décor des armoires (les Vertus cardinales, dessins au Louvre et coll. part.). En même temps, il ornait de 6 compositions le vestibule de la porte Dorée (1543-44), encore en place. La chambre de la duchesse d'Étampes (1541-1544), défigurée par un escalier sous Louis XV et par de fâcheuses modifications au xixe s., conserve encore en partie son merveilleux décor, où les grandes figures de stucs rythment symétriquement les fresques, préparées par de magnifiques dessins : la Mascarade de Persépolis (Louvre). Primatice orna ensuite la grotte du jardin des Pins (1543, fresques, ruinées) de sujets vus en perspective (Minerve, Junon, dessins au Louvre), puis, au rez-de-chaussée de la galerie François-Ier, l'appartement des Bains (1541-1547, auj. disparu), une des merveilles de Fontainebleau, qui reçut les chefs-d'œuvre des collections royales, qu'encadraient des stucs et des compositions peintes : Histoire de Callisto (dessins au Louvre et au British Museum).

Cette intense activité, coupée par des voyages en Italie (en 1543 et en 1546), où Primatice subit probablement de nouvelles influences (en particulier celle de Perino del Vaga), était facilitée par toute une équipe d'auxiliaires, dont certains étaient des artistes de premier ordre. Primatice dirigeait également l'atelier des fontes d'après les antiques ramenés d'Italie et l'atelier de tapisserie : Tenture d'après la galerie François-Ier (Vienne, K. M.). Il était alors à l'apogée de sa puissance, et tout dépendait de lui en matière d'art : valet de chambre du roi, il fut nommé, en 1544, abbé de Saint-Martin-ès-Ayres, près de Troyes. La mort du roi en 1547, la nomination de Philibert Delorme à la direction des Bâtiments allaient passagèrement entamer son pouvoir. La mort ou le départ de certains de ses collaborateurs l'amenèrent aussi, peut-être, à concevoir autrement le décor, où le stuc va disparaître. Primatice avait entrepris, dès 1541, de peindre la Galerie d'Ulysse (auj. disparue), à laquelle il travailla presque jusqu'à sa mort : elle tirait son nom des 58 compositions des parois, tandis qu'à la voûte, divisée en 15 travées ornées de grotesques, apparaissait une multitude de sujets aux audacieux raccourcis (nombreux et admirables dessins ; gravures). Entre 1552 et 1556, Primatice décora la Salle de bal, entièrement peinte à fresque de sujets mythologiques sur les murs et entre les fenêtres. Il fut aidé par Nicolò Dell'Abate, nouveau venu à Fontainebleau, qui deviendra son collaborateur habituel. Ces entreprises ne l'empêchaient pas de travailler pour des particuliers : hôtel de Ferrare (1548), chapelle de Guise (dessins au Louvre, à Chantilly, à Meudon, à Montargis). Il dirigeait l'atelier de Nesles (sculptures réalisées par Germain Pilon et son atelier : Monument du cœur de Henri II, Louvre ; Tombeau de Henri II, Saint-Denis), et faisait aussi œuvre d'architecte (aile de la Belle Cheminée, Fontainebleau). Il donnait des projets pour les fêtes et les " entrées " (suite de dessins dite la Mascarade de Stockholm, au Nm de Stockholm) ainsi que des modèles aux émailleurs, aux lissiers. Parmi ses dernières œuvres, il faut mentionner 2 compositions ajoutées en 1570 dans la chambre de la duchesse d'Étampes et, à la même date, le nouveau décor de la Chambre du roi (perdu ; sujets tirés de l'Iliade, décrits par le père Dan et l'abbé Guilbert ; copies de Belly et de Van Thulden ; quelques dessins préparatoires au Louvre) ; tous ces ensembles furent réalisés par Nicolò dell' Abate. Surchargé de commandes, Primatice peignit sans doute assez peu lui-même ; on lui attribue de rares tableaux : les plus sûrs semblent la Sainte Famille (Ermitage) et Ulysse et Pénélope (Toledo, Ohio, Museum of Art) ; l'Enlèvement d'Hélène (Barnard Castle, Bowes Museum) paraît une œuvre d'atelier. Il est difficile de juger de l'Évanouissement d'Andromaque (musée de Providence, Rhode Island), à cause de son état. Les décorations de l'artiste étant souvent perdues ou mal conservées, c'est grâce à de nombreux dessins (séries très importantes au Louvre, à l'Albertina et au Nm de Stockholm), surtout à la plume et au lavis ou à la sanguine avec rehauts de blanc, que nous pouvons connaître sa manière, d'une grâce précieuse et recherchée, et ses inventions poétiques de grand décorateur. Diffusé par les graveurs (particulièrement bien par le Maître L. D.), servi par une longue carrière, Primatice a exercé une influence décisive sur l'art français, en particulier sur le xviiie s.