Frits Van den Berghe

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Peintre belge (Gand 1883  – id.  1939).

Fils du bibliothécaire de l'université de Gand, il suit les cours de l'Académie et vécut à Laethem-Saint-Martin, où il partage un atelier avec Albert Servaes, de 1904 à 1914, excepté un séjour de six mois aux États-Unis (1913). Durant cette période, il peint, dans un style post-impressionniste des paysages rappelant Théo Van Rysselberghe, des portraits symbolistes et des scènes d'intérieur. Devant l'invasion allemande, il gagne Amsterdam, où il retrouve Gustave De Smet, dont l'itinéraire se confond en grande partie avec le sien jusqu'en 1926. Il s'initie en Hollande au Cubisme, prend contact avec l'Expressionnisme allemand par l'intermédiaire de revues ainsi qu'avec l'art africain (appelé alors « art nègre »). Il exécute alors (1919-20) des gravures sur lino et sur bois, dans un style lourd, fortement simplificateur et dont les composantes, érotique ou poétique, se maintiendront par la suite (l'Attente, 1919, bois ; le Peintre du soleil, 1920, bois) ; les peintures présentent les mêmes caractères et témoignent d'une certaine analogie avec l'art de Die Brücke (le Semeur, 1919, Ostende, musée provincial d'Art moderne ; Portrait de Mme Brulez, 1920). Plus discrète, l'influence du Cubisme apparaît dans des tableaux de facture plus légère, où les problèmes de l'espace l'emportent sur ceux de l'expression (Malpertuis, 1922). De retour en Belgique (1922), Van den Berghe s'installe avec De Smet à Afsnée et, en 1926, s'établit à Gand, qu'il ne quittera plus. Ces quelques années sont celles de sa participation majeure à l'Expressionnisme flamand ; le milieu provincial et rural du pays gantois lui inspire d'abord une imagerie d'une robuste plasticité, d'une couleur à la fois chaude et souple (Dimanche, 1923, Bruxelles, M. R. B. A. ; la Lys, 1923, musée de Bâle), mais dont la fraîcheur et l'humour cèdent rapidement à une inquiétude onirique et à un érotisme proches du climat surréaliste (l'Éternel Vagabond, 1925, musée d'Ostende ; le Flûtiste, 1925, musée de Bâle). Au même moment, des scènes urbaines traitent de manière personnelle les thèmes du réalisme européen autour de 1925, dans un esprit satirique et sarcastique (Cinéma, gouache sur papier, v. 1925-26, Bruxelles, M. R. B. A. ; Scènes de maison close I, II, III, 1927, gouaches). Le changement plus net du style et de la vision s'effectue v. 1927, quand les personnages perdent de leur pesanteur matérielle et sociale, tandis que les rapports de l'homme avec le monde sont étrangement perturbés (l'Homme des nuages, 1927, musée de Grenoble ; Naissance, 1927, musée de Bâle). À partir de 1928, le raffinement de la couleur (souvent une dominante rouge-orangé et or) et de la matière est mis au service d'évocations où le fantastique (Mercure) le dispute au monstrueux et plus rarement à une poésie moins crispée (l'Escarpolette, 1930 ; Cavalier de rêve, 1939). Durant ces années, Van den Berghe collabore avec ses dessins au périodique satirique Koekoek et au journal gantois socialiste Vooruit. Parallèlement, il participe à la vie artistique belge comme secrétaire de la galerie l'Epoque qui, fondée en 1927, présente des œuvres du courant surréaliste. Certains dessins, à l'encre de Chine, restituent de manière saisissante l'humanité exsangue des camps de concentration. Si l'œuvre peint des années 30 présente parfois des rapports avec Ensor et Ernst, il illustre néanmoins un aspect flamand du Surréalisme qui fait appel à une imagination plus picturale, contrepoint à l'engagement politique de l'artiste, dont l'œuvre est une des plus symptomatiques de l'entre-deux-guerres en Belgique. Van den Berghe est bien représenté dans les grands musées belges ; le catalogue des peintures, établi en 1966, comprend 430 numéros. Des rétrospectives de son œuvre ont eu lieu en 1962 au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles et en 1984 au musée des Beaux-Arts de Gand.