Édouard Pignon
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».
Peintre français (Bully-les-Mines 1905-La Couture-Boussey, Eure, 1993).
Ouvrier mineur, puis cimentier-plafonneur, il aime dessiner à ses moments de loisir, exécute des paysages et des portraits. À Paris en 1927, il travaille et suit en même temps des cours du soir à l'École de Montparnasse, puis les cours des sculpteurs Wlérick et Arnold. Il expose pour la première fois au Salon des indépendants en 1932 et fait la connaissance de Picasso en 1937. Participant à l'exposition des Jeunes Peintres de tradition française à la gal. Braun en 1941, il s'impose à la Libération comme un des artistes les plus capables de soutenir la tradition figurative, celle de Picasso en particulier. Issu du milieu ouvrier et ayant durement éprouvé la dureté de son origine, il choisit ses thèmes dans le monde du travail (l'Ouvrier mort, deux versions, 1936 et 1952), ou dans la nature la plus accessible à l'homme. Il participe alors au débat sur le réalisme et l'" art engagé " lancé en marge du parti communiste français et qui anime le monde intellectuel parisien. La composition et le dessin l'ont longtemps retenu et la couleur, d'abord acide, s'est ensuite adoucie, en même qu'elle gagnait en force. À la leçon de Picasso, manifeste pendant plusieurs années dans le rythme graphique et l'équilibre des surfaces, Pignon doit de belles réussites (Jeune Mineur à la cigarette, 1949 ; Homme à l'enfant endormi, 1953) ; mais une série de variations inspirées par Ostende (1948) le montrent en quête d'un style plus personnel, apte à restituer l'essentiel d'un spectacle, moment naturel et geste humain à la fois (Ostende blanc). Pignon réside en 1950 à Sanary et l'année suivante à Vallauris (où il revient en 1953) en compagnie de Picasso. Ces séjours méditerranéens suscitent une production féconde : nus (1953), tableaux de " vendanges " assez statiques et paysages aux forts contrastes de teintes et de formes, d'un lyrisme véhément (Paysage à la colline, 1956) souvent ordonnés en fonction du thème de l'olivier. Dès lors, la recherche d'un dynamisme à l'état pur, réalisant une fusion totale du solide et du mouvant, est le souci primordial de l'artiste. Les principaux jalons sont fournis par les suites consacrées aux Combats de coqs, aux Battages (1960-1962) et aux Batailles (1963-64), où la difficulté de suggérer une action violente sans la décrire est souvent résolue avec bonheur (Combat de coqs noirs, 1961, Paris, coll. part. ; Douze Battages, encre sur papier). Le thème des Plongeurs (1965-66), conviant à fixer sur la toile l'impact immédiatement dissous en fuites irisées et glauques, du corps et de la mer, est le plus ambitieux (Plongeurs, 1965). Après les Têtes de guerrier expressives et burlesques (1968-69) et la reprise du sujet de l'Homme à l'enfant (1970), les grands nus peints et dessinés (ceux-ci d'un classicisme épanoui) retournent à un calme relatif, avec le seul mouvement de leurs souples arabesques (Nu ouvert, 1972 ; suite des Nus rouges, 1971-1973, qui sera exposée à Paris en 1976). On doit aussi à Pignon un œuvre dessiné important, dont l'ampleur et le sentiment de certaines feuilles évoquent Permeke (Maternité, 1952, fusain), des céramiques (Plongeurs, 1973, École des beaux-arts de Marseille-Luminy), une collaboration active au T. N. P. (décors et costumes pour Mère courage de Brecht, 1951), des lithographies pour les Blasons de Maurice Scève (1945), le Dialogue de l'arbre de Valéry (1958), entre autres ouvrages illustrés. L'artiste est notamment représenté à Paris (M. N. A. M.), aux musées de Grenoble et de Marseille, à Londres (Tate Gal.), à Amsterdam (Stedelijk Museum) et New York (M. O. M. A.). Une exposition rétrospective de son œuvre a été organisée à Paris, au Grand Palais, en 1985.