les Trois Musiciens aux masques

Peinture de Pablo Picasso (1921). Museum of Modern Art, New York.

En 1921, Picasso semble être sorti définitivement de ses recherches cubistes et avoir opéré un spectaculaire retour vers le classicisme, notamment avec Trois Femmes à la fontaine, tableau dans lequel il plante trois matrones sculpturales, aux formes gigantesques mais arrondies et assouplies. Or, presque simultanément à cette dernière toile, cet artiste plus que jamais versatile peint deux versions de grande taille de ces très géométriques Trois Musiciens, écho paradoxal aux Trois Femmes à la fontaine jusque dans leur titre. Cette version, qui diffère peu de l'autre, met en scène, dans un coin de pièce carrée, un Pierrot jouant de la clarinette, un Arlequin grattant sa guitare et un… moine tenant une partition ouverte. Dans une harmonie d'aplats de couleurs homogènes – au rouge, au jaune et aux bruns répondent le blanc et le bleu –, les trois personnages, masqués, se tiennent derrière une table. Sous celle-ci est étendu un grand chien, que sa couleur brune tend à confondre avec une ombre. Picasso retrouve avec ces deux toiles à la fois les thèmes de sa période rose – la musique, la comédie italienne – et les intentions formelles du cubisme synthétique.