l'Extase de sainte Thérèse

Groupe sculpté de Gian Lorenzo Bernini, dit le Bernin (achevé en 1647). Marbre. Église Santa Maria della Vittoria, Rome.

C'est à la demande du cardinal Federico Cornaro que le Bernin entreprend la décoration de la chapelle dédiée à sainte Thérèse d'Ávila dans l'église Santa Maria della Vittoria. L'ensemble, commencé peu après 1644, est achevé en 1647. Sous une gloire d'où pleuvent des « grâces » de bronze doré, le groupe central représente l'extase mystique de la sainte, portée par une nue : un séraphin lui apparaît et lui transperce le cœur d'une flèche, également de bronze doré, illustration de l'amour divin.

Jamais le Bernin n'est allé aussi loin dans le traitement illusionniste du marbre, dans la fusion, propre à l'art baroque, des divers niveaux de réalité et de l'irruption du divin dans la réalité. Cette œuvre prodigieusement démonstrative rend bien compte de l'expérience mystique et de son rôle dans la piété catholique du xviie s. L'extase est ici traduite d'une manière quasi érotique. C'est pourquoi le Président de Brosses écrivit de Rome en 1739 : « Elle est dans son habit de carmélite, pâmée, tombant à la renverse, la bouche entr'ouverte, les yeux mourants et presque fermés ; elle n'en peut plus ; l'ange s'approche d'elle, tenant en main un dard dont il la menace d'un air riant et un peu malin (…) Si c'est ici l'amour divin, je le connais. »

Nous touchons là un aspect fondamental de la « spiritualité » baroque en terre catholique : l'union intime du charnel et du divin, de la terre et du ciel, dont témoignent tout autant le Bernin que Rubens.