Androclus

(Variantes : Androclès)

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

Esclave sauvé par un lion.

Un jour, on donne au peuple, dans le Grand Cirque (Circus Maximus), le spectacle d'un combat d'animaux. Les barrières levées, l'arène se remplit aussitôt d'une foule de fauves terribles, tous d'une férocité extraordinaire. On voit surtout s'élancer des lions d'une taille prodigieuse, dont un, en particulier, capte les regards : sa masse énorme, ses élans vigoureux, ses muscles enflés et raides, une crinière flottante et hérissée, un rugissement sourd et terrible attirent sur cette bête l'attention de tous les spectateurs. Parmi ceux qui sont condamnés à défendre chèrement leur vie contre la rage de ces animaux affamés, se trouve un certain Androclus, autrefois esclave d'un proconsul. Or, dès que le lion l'aperçoit, il s'arrête, tout à coup saisi d'étonnement ; il s'avance paisiblement et d'un air adouci, comme s'il connaissait le malheureux ; il approche en agitant la queue d'une manière soumise ; il presse le corps de l'esclave à demi-mort de frayeur, et lèche doucement ses pieds et ses mains. Les caresses du terrible animal rappellent Androclus à la vie ; ses yeux éteints s'entrouvrent peu à peu, ils rencontrent ceux du lion. Alors, comme deux vieux amis au moment des retrouvailles, l'homme et le lion manifestent une joie immense et un tendre attachement. À ce spectacle, l'assemblée tout entière pousse un cri d'admiration. César fait aussitôt venir Androclus et lui demande pourquoi il est le seul que la fureur de cette bête cruelle a épargné. Androclus se met alors à lui raconter son aventure.

Le lion soigné par l'homme

Pendant que son maître gouverne l'Afrique en qualité de proconsul, les traitements injustes et cruels qu'il subit continuellement déterminent Androclus à prendre la fuite. Et, pour échapper aux poursuites, Androclus se réfugie dans les solitudes inaccessibles des sables et des déserts, résolu à se donner la mort, s'il vient à manquer de nourriture. La chaleur torride, le puissant soleil le poussent à s'engager dans un antre profond. À peine y est-il entré qu'un lion y pénètre à son tour. L'animal s'appuie douloureusement sur une patte ensanglantée, et la violence de sa souffrance lui arrache des rugissements terribles. Androclus songe alors qu'il n'en a plus pour longtemps à vivre. Mais l'animal s'avance vers lui avec douceur ; il lui présente sa patte, lui montre sa blessure avec l'air d'implorer son aide. Androclus retire une grosse épine enfoncée entre les griffes ; il ose même la nettoyer. Alors le lion, soulagé, se couche, met sa patte entre les mains d'Androclus et s'endort dans la paix la plus parfaite. Depuis ce jour, tous deux continuent à vivre ensemble, pendant trois ans. Le lion se charge de la nourriture, allant même jusqu'à choisir, pour son bienfaiteur, les meilleurs morceaux des proies capturées. Cependant, la solitude sauvage commence à peser à Androclus. Profitant de l'absence du lion, il s'éloigne de la caverne. Après trois jours de marche, Androclus tombe entre les mains des soldats. Ramené d'Afrique à Rome, il paraît devant son maître qui, sur-le-champ, le condamne à être dévoré. Et, sans doute, le lion lui-même a-t-il été capturé.

Le récit d'Androclus est aussitôt communiqué au peuple qui exulte. À la demande générale, Androclus est affranchi et il obtient même le droit de garder le lion avec lui. Alors on voit Androclus, tenant son libérateur attaché à une simple courroie, marcher au milieu de Rome, et le peuple enchanté le couvre de fleurs, le comble de largesses, en s'écriant : « Voilà le lion qui a donné l'hospitalité à un homme, et voilà l'homme qui a guéri un lion. »