Érinyes

Oreste et deux des Érinyes.
Oreste et deux des Érinyes.

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

1. Appelées Furies par les Latins, ou Redoutables, contemporaines du Crime et de l'Innocence, divinités infernales de la vengeance, les « ministres de la justice » selon Héraclite.

D'après Hésiode, elles naissent lorsque Ouranos, mutilé par son fils, féconde la Terre avec son sang ; ce même auteur mentionne par ailleurs qu'elles sont filles de la Discorde. Selon Apollodore, c'est dans Océan que tombe le sang d'Ouranos ; d'après Virgile, elles sont les filles de la Nuit ; chez Sophocle, ce sont l'Ombre et la Terre qui les engendrent ; Épiménide prétend qu'elles sont les enfants de Cronos et d'Évonyme.

Dépourvues d'ailes, elles sont noires et dégoûtantes ; elles émettent des ronflements et des soupirs, avec tant de puissance qu'on craint de les approcher. De leurs yeux suinte un horrible liquide.

Les trois Érinyes

Euripide précise qu'elles sont trois, et des auteurs tardifs les nomment Alecto (Allecto), Tisiphone, Mégère.

Tisiphone garde la porte du Tartare. Vêtue d'une robe tachée de sang, elle fouette durement les coupables tout en leur présentant, de son autre main, des serpents dégoûtants. Elle persécute Étéocle et Polynice et les amène à se haïr, puis à s'entre-tuer. Elle n'hésite pas à déclencher quelque fléau afin de punir une contrée entière. Son sanctuaire se trouve sur le mont Cithéron où, paradoxalement, Œdipe trouve un peu de paix après son bannissement.

La fonction principale de Mégère est de semer la discorde parmi les mortels, et tous les moyens lui sont bons : jalousie, envie, colère... C'est une persécutrice acharnée. Sa vue parvient même à épouvanter Héraclès.

Alecto est sans doute la plus forcenée des trois, vindicative à outrance.

Voir aussi : Alecto

La mission des Érinyes est de punir les mortels qui ont enfreint les lois de la société humaine (vol, assassinat, parjure...), qui se sont, notamment, rendus coupables de crimes contre la famille (parricide, matricide...). Persécutrices impitoyables, acharnées, infatigables, elles frappent leur victime, le plus souvent, de folie. Mourir ne suffit pas pour échapper à ces tourments atroces : leurs actions vipérines continuent dans le monde souterrain où la victime est humiliée, fouettée, torturée.

Érinyes, héros, dieux

Œdipe est persécuté par les Érinyes parce qu'en raison du suicide de sa mère, l'ordre social a été troublé. Oreste est, lui aussi, chassé par les Érinyes, après avoir assassiné sa mère sur le conseil d'Apollon. Apollon, d'ailleurs, n'a que mépris pour ces créatures détestées par les hommes et maudites par les dieux. Si Apollon défend la cause d'Oreste, celui-ci trouve également en Athéna une protectrice puissante. Il est acquitté du meurtre et, dès lors, les Érinyes font régner la justice à Athènes, par la seule épouvante qu'elles inspirent. Aussi s'agit-il de flatter ces terribles vengeresses : on les appelle, par euphémisme, les Euménides (les « Bienveillantes »).

Si les mortels les redoutent au point de prononcer leur nom avec un respect infini, les dieux également les craignent, mais peuvent faire appel à leurs service. Junon, opposée à l'établissement d'Énée en Italie, envoie Alecto provoquer une guerre entre Rutules et Troyens ; la même déesse se sert de Tisiphone pour se venger d'Athamas.

Culte et attributs

Comme toute divinité, les Érinyes se voient offrir des sacrifices – ne sont-elles pas les protectrices de l'ordre social ? On brûle des bois de cèdres et de cyprès, on leur offre des agneaux noirs, et une boisson faite de miel et d'eau – jamais de vin. Leur attribut est la torche. À Athènes, leur autel, qui sert d'asile aux réfugiés, s'élève probablement non loin de l'Aréopage, et peut-être identifié avec l'Orestéion. C'est en silence qu'on passe près de leur bois sacré.

Oreste et deux des Érinyes.
Oreste et deux des Érinyes.