folklore
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».
Ce mot a pris un sens tellement vague et parfois même dérisoire qu'on est très loin du sens primitif. En fait, il désigne tout ce qui a trait aux traditions orales dans les populations rurales d'Europe, traditions qui remontent au Moyen Âge, à une époque où paysans et artisans possédaient une langue, des légendes, des danses et des chants spécifiques. Le rouleau compresseur d'un mode d'enseignement unique pour tout un pays n'était pas encore venu gommer le caractère propre à chaque région, aussi bien au point de vue du mode de vie que du tempérament de ses habitants, pour niveler les différences. Les pays d'Europe où ces traditions sont restées le plus longtemps vivaces sont les plus isolés géographiquement et les moins industrialisés. Ainsi dans l'Île-de-France, région de passage, les coutumes se sont perdues beaucoup plus tôt qu'en Bretagne ou en Corse. Il ne faudrait pas croire qu'il n'y ait aucune communication entre la musique « savante » écrite, et réservée à une classe de la société, et la musique populaire (dans le meilleur sens du terme). Le cloisonnement culturel entre catégories sociales était moins rigide qu'en cette fin de xxe siècle, et les paysans avaient des échos de ce qui se chantait au château, ne serait-ce que par les instrumentistes. C'est au xixe siècle que les écrivains se penchent sur les us et coutumes des populations villageoises (George Sand écrit ses romans, où elle décrit fêtes et cérémonies berrichonnes). De leur côté, les compositeurs russes découvrent les chants de tradition orale qui servent de fondement à leur musique. Ainsi s'amorce un mouvement qui gagne toute l'Europe : Pedrell découvre ce type en Espagne, Kodály, puis Bartók en Hongrie ; ils recueillent des centaines de chants et les notent. En France, des musiciens aux noms moins prestigieux opèrent de même, en explorant chacun une province : il était temps, puisque le xxe siècle voit l'abandon de toutes ces traditions. Ce n'est que dans les années 60/70 qu'on voit apparaître un regain d'intérêt, pour les langues d'abord, puis pour les objets ; on crée alors des musées « d'arts et traditions populaires », mais la musique, elle, ne s'enferme pas sous des vitrines si elle n'est pas écrite ou enregistrée.
Dans chaque pays, la musique folklorique plonge ses racines dans un type de civilisation orale, qu'on ne trouve plus qu'en Afrique et dans les pays orientaux. Elle est intimement liée à la vie quotidienne d'une communauté humaine ; en schématisant, on pourrait la diviser en plusieurs catégories :
1. chants narratifs ;
2. chants de travail ou de corporations (chant de labour, fileuses) ;
3. chants de saisons ;
4. chants de fêtes (Saint-Jean, Toussaint, Noël ; il arrive que la même mélodie serve de support à trois textes différents) ;
5. chants de circonstance (mariages, cérémonies funèbres) ;
6. chants de danses, extrêmement diversifiés.Il semblerait que les hommes de notre époque désirent lutter contre l'uniformisation et cherchent à retrouver une identité culturelle (en réaction contre ce qui est imposé par les médias) par un retour, peut-être utopique, à des pratiques musicales liées au sens de la fête.