concile de Trente

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

La nécessité de réunir un concile œcuménique s'imposait depuis des années, et le pape Paul III, face aux progrès de la Réforme, s'y était décidé dès 1536. Mais les grandes puissances catholiques ­ le Saint Empire romain germanique, l'Espagne, la France et le Saint-Siège lui-même ­ étaient si divisées que le concile ne put siéger à Mantoue en 1537, ni à Vicence l'année suivante. Une trêve dans ces conflits armés ou non intervint enfin en 1544, et le pape convoqua les pères conciliaires pour 1545 à Trente, cité choisie parce qu'elle était à la fois italienne et ville d'Empire. Le concile s'ouvrit le 13 décembre avec trente-quatre participants seulement, presque tous italiens. Transféré à Bologne en 1547 pour cause d'épidémie, il fut ajourné sine die en 1549. Un nouveau pape, Jules III, le rouvrit à Trente en 1551 et le suspendit une fois de plus en 1552. Son successeur Paul IV, hostile au principe même du concile, se garda bien de le ressusciter, et c'est Pie IV qui s'en chargea en 1562 après dix ans d'interruption. La vingt-cinquième et dernière session eut lieu en décembre 1563.

Parfaitement conscient du fait que la Réforme était née d'une révolte contre les abus d'un clergé laxiste et corrompu, Paul III avait espéré lui couper l'herbe sous le pied et ramener au bercail les brebis égarées. Mais il était déjà beaucoup trop tard, et il fallut y renoncer, du moins dans l'immédiat. En revanche, le concile de Trente s'attacha à définir la position de l'Église en matière de dogme et à remettre de l'ordre dans ses institutions, jetant ainsi les bases d'une contre-réforme qui devait porter ses fruits au siècle suivant. Discipline et austérité étaient donc à l'ordre du jour. Elles ne pouvaient épargner la liturgie et, partant, la musique qui accompagne les offices. (Un semblable souci de ne plus prêter le flanc à l'accusation de triomphalisme devait jouer un grand rôle quatre siècles plus tard, lors du concile Vatican II.) Les plus zélés des pères conciliaires n'envisageaient rien moins que le retour pur et simple au chant grégorien et l'interdiction de toute musique contemporaine. Ils ne furent guère suivis et, dans son avant-dernière session du 11 novembre 1563, le concile se borna à formuler des recommandations qui visaient certains excès de la polyphonie moderne : l'abus du style fugué, qui tendait à rendre incompréhensibles les textes sacrés à force de répétitions et de superpositions, et surtout celui des tropes (ou « farcis ») empruntés à des chansons ou des danses profanes de caractère parfois licencieux.

Pour appliquer ces consignes générales, le pape Pie IV nomma, le 2 avril 1564, une commission de huit cardinaux où figuraient notamment son neveu Charles Borromée, futur saint et Michel Ghisleri, le futur pape Pie V (qui devait être également canonisé). À son tour, cette commission invita le collège des chanteurs apostoliques à désigner huit délégués pour élaborer les détails de la réforme. L'illustre Palestrina, ancien protégé du pape Jules III, n'en faisait pas partie, ayant été exclu de la Sixtine par une décision antérieure, en tant qu'homme marié. C'est pourtant lui qui fournit le modèle à suivre avec sa fameuse Messe du pape Marcel, à six voix, dédiée pour des raisons diplomatiques à ce pontife qui n'avait régné que trois semaines en avril 1555. Pie IV l'entendit le 19 juin 1565 et, enthousiasmé, créa pour son auteur le poste de compositeur de la chapelle apostolique. À moins de deux ans de la clôture du concile, le profil de la musique sacrée selon le rite romain était fixé.