Arturo Toscanini

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Chef d'orchestre italien (Parme 1867 – New York 1957).

Sa précocité lui ouvre à neuf ans les portes du conservatoire de sa ville natale, où il étudie le violoncelle (avec Leandro Carini), le piano et la composition, et obtient, en 1885, son diplôme. Son admiration pour Verdi naît en 1887 à la Scala de Milan où, second violoncelliste, il participe à la création d'Otello, mais leurs gloires se sont croisées dès 1886 à Rio de Janeiro où le violoncelliste a pris la place d'un chef défaillant pour diriger de mémoire Aïda. En Italie, Toscanini se consacre à la défense des musiciens de son temps, les véristes, créant Edmea de Catalani (Turin, 1887), Paillasse de Leoncavallo (Milan, 1892), la Bohème de Puccini (Turin, 1896). Sa réputation grandissante lui permet d'imposer l'œuvre encore méconnue en Italie de son dieu, Wagner, au Teatro Regio de Turin, qui lui confie la direction de la musique et le soin de créer un orchestre. Il y donne en première audition italienne le Crépuscule des dieux (1895) et crée les Quatre Pièces sacrées de Verdi (1898).

Mais c'est à la Scala de Milan, où il est appelé en 1898, qu'il peut véritablement donner la mesure de son art. Ennemi acharné de la routine et de la médiocrité, il enrichit le répertoire par des créations italiennes (les Maîtres chanteurs, Eugène Onéguine, Pelléas et Mélisande, la Damnation de Faust, Euryanthe) et part en guerre contre les tics des chanteurs et du public (l'abus des bis, notamment). Son exigence en matière artistique n'étant jamais satisfaite, il prend ses distances avec la Scala, de 1903 à 1906, tournant en Italie avec l'Orchestre de Turin et les œuvres nouvelles de Richard Strauss et de Debussy, dirigeant à Bologne et à Buenos Aires, avant d'accepter, de 1908 à 1915, la direction du Metropolitan de New York.

Là encore, il se heurte à l'inertie administrative et à la mauvaise volonté des chanteurs (aux noms prestigieux : Caruso, Scotti, Farrar, Destinn, Martinelli, etc.). Il y dirige en première américaine Boris Godounov, Armide de Gluck et en création mondiale la Fille du Far West de Puccini (1910).

Rentré en Italie en 1915, il participe à l'effort de guerre en donnant des concerts pour les soldats, jusque sur le front. Rappelé en 1920 à la direction de la Scala, il réorganise l'orchestre et le chœur, qu'il dirige en tournée en Amérique du Nord, à Vienne et à Berlin. Malgré son apolitisme farouche, son caractère intransigeant, hérité d'un père garibaldien, lui fait refuser toute compromission avec les fascismes naissants. En 1926, il refuse de diriger à la Scala, lors de la création de Turandot, l'hymne mussolinien. Il rompt en 1933 avec le Festival de Bayreuth, après y avoir dirigé, en 1930 et 1931, Tannhäuser, Tristan et Parsifal, puis en 1938, avec le Festival de Salzbourg, où il interprète, de 1934 à 1937, Falstaff, Fidelio, les Maîtres chanteurs et la Flûte enchantée.

Il accepte de diriger le concert inaugural de l'Orchestre de Palestine (Tel-Aviv, 1936) et de participer aux premiers festivals de Lucerne (1938-39). De 1928 à 1936, il se voit confier la direction de la Société philharmonique de New York, qu'il conduit en Europe en 1930. La chaîne NBC crée à son intention un orchestre de luxe, qu'il dirige de 1937 à 1954, réalisant dans le Studio 8H la plupart de ses enregistrements. Après avoir inauguré la Scala reconstruite et La Fenice, il fait ses adieux au public de New York en 1954.

Les quelques fragments de répétition connus donnent la mesure du perfectionnisme exacerbé de Toscanini, qui s'exhalait en reproches, voire en injures contre les malheureux musiciens, mais ne disent pas son extrême sévérité pour lui-même, ni l'inaccessible hauteur de son idéal. Au théâtre comme au concert ­ car il fut un des rares chefs italiens de son temps à concilier les deux ­, il s'évertue à décaper le répertoire de toute tradition interprétative, et prône le respect absolu de l'œuvre, de son chant intérieur et de sa structure rythmique. Serviteur fervent de Verdi, Wagner et Beethoven, il a également laissé des interprétations lumineuses de Puccini, Cherubini, Rossini, Mendelssohn, Brahms, Richard Strauss, Debussy, Ravel, Kodály.