Thaïlande

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

La musique thaïlandaise, dont les origines demeurent obscures, a été influencée successivement par les éléments indiens, khmers et chinois. Si le Nâtyaçâstra de Bharata continue à en marquer l'essentiel, comme dans le théâtre dansé, la civilisation khmère, également pénétrée d'hindouisme, a été assimilée par les Thaïs venus du sud de la Chine dans une synthèse des deux traditions qui s'est imposée au cours des siècles. Appartenant, comme le Cambodge et le Laos, au « petit véhicule », le bouddhisme thaïlandais se différencie peu de ses voisins dans sa musique rituelle, en dehors d'une accélération rythmique particulièrement sensible pendant les dernières décennies et qui a elle-même influencé la musique cambodgienne. Réciproquement, c'est le Cambodge qui a donné au ballet thaïlandais ses plus récents exemples, au point d'en avoir pratiquement éliminé tout élément national.

Les deux formes traditionnelles de la musique thaïlandaise sont le ruang et le thao, cette dernière n'étant qu'une suite de séquences empruntées au ruang et mêlant la voix aux instruments en vertu d'un même principe structurel. Le ruang comporte une mélodie principale revenant inlassablement soit dans sa forme originelle, soit dans des variantes qui en respectent l'esprit et le schéma. Elle est toujours binaire et diatonique et fondée sur un certain nombre de cellules et de formules cadentielles transmises de génération en génération suivant des règles strictes, de même que ses accents rythmiques qui tombent obligatoirement sur les temps pairs (2 et 4) de chaque groupe binaire.

Les cinq modes correspondent aux notes de l'échelle pentatonique, comme dans la musique chinoise, mais chacun d'eux est défini par le degré fondamental qui est révélé au quatrième temps et qui en précise le caractère.

Le thao, de conception plus récente, admet un principe de variations plus complexe qui double fréquemment la durée de la mélodie originelle, à la suite de quoi elle est répétée jusqu'à la moitié de cette durée. De même les mélodies anciennes (thaï) qui reposent, comme en Chine, sur un canevas pentatonique offrent un schéma plus simple et plus traditionnel que les récentes (mon), plus lyriques et s'écartant volontiers du cadre pentatonique pour utiliser les autres notes de l'octave dans le profil de la mélodie ou dans ses variations.

L'octave est divisée en sept degrés égaux, chacun d'eux portant un nom qui correspond au style qu'il commande et à l'instrument traditionnellement requis pour ce style afin de créer le climat émotionnel particulier par l'approfondissement d'un état d'âme. Aussi bien l'accord des instruments à gamme fixe se fait sur les sept degrés qui composent l'octave.

On distingue plusieurs ensembles instrumentaux : par exemple le pî phat, ensemble standard d'instruments à percussion mélodiques avec, en outre, un instrument à vent nommé et donnant son nom à l'ensemble ; le mahori, ensemble d'instruments à percussion mélodiques plus petits ; le kruang sai, ensemble à cordes comprenant notamment le jakhe à 3 cordes et le krajappi, sorte de luth avec résonateur.

La sonorité de la plupart de ces instruments est, du reste, assez confidentielle et leurs moyens sont limités. Depuis la chute de Rama VII, le thao a consacré l'alternance des voix et des instruments en respectant la principale caractéristique du style vocal thaï qui consiste, à la fin de la mélodie, en une augmentation du volume sonore accompagnée d'un motif ornemental en fausset et fréquemment à la quarte supérieure de la note choisie comme base du mode.

Cette musique, qui n'admet ni notation ni structure harmonique, a subi discrètement l'influence occidentale dans ses dessins ornementaux et rythmiques.