Igor Markevitch
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».
Compositeur et chef d'orchestre italien d'origine russe (Kiev 1912 – Antibes 1983).
En 1914, sa famille quitta la Russie pour Paris, puis pour la région de Vevey en Suisse, où il commença ses études avec son père Boris (auteur d'un traité de piano) et avec Paul Loyonnet. Sa première composition, Noces (1925) retint l'attention de Cortot qui l'invita à rejoindre sa classe de piano à Paris. Il reçut également l'enseignement de Nadia Boulanger (harmonie, contrepoint, composition). En 1929, Serge de Diaghilev entendit sa Sinfonietta et lui commanda un concerto de piano. À la mort du mécène, il incorpora le matériel de son ballet l'Habit du roi dans une cantate sur un texte de Jean Cocteau.
Son exécution par Roger Désormière (1930), puis celle d'un concerto grosso firent beaucoup pour asseoir sa renommée. Rébus (1932), qu'il dirigea lui-même à Paris, lui valut un triomphe, de même que l'Envol d'Icare (1933). Si le Psaume (1934), qui avait choqué le public, est resté une page de haute tenue, le Paradis perdu (1935) d'après Milton constitue sa création la plus importante.
On a discerné, dans ses meilleures œuvres, une rythmique à la Stravinski, une écriture polyphonique à la Hindemith. « Le langage de Markevitch n'est pas essentiellement personnel, a écrit Paul Collaer, il est éclectique. La profonde originalité de son art est due à l'esprit qui s'y manifeste. » En 1936, Igor Markevitch épousa Kyra, fille de Vaclav Nijinski ; l'année suivante, il fit sensation au Mai musical de Florence, en déclarant que les compositeurs étaient partiellement responsables de l'isolement dont ils se plaignaient. En 1938, le succès du Nouvel Âge apporta la confirmation de cette déclaration : Markevitch était en possession d'un langage capable, lui, d'atteindre un vaste public. Certaines de ses productions n'en suscitèrent pas moins de violentes critiques. La Taille de l'homme (1938-39), sur un texte de C. F. Ramuz, Laurent le Magnifique (1940) et Variations, fugue et envoi sur un thème de Haendel (1941) restent les trois dernières compositions originales du musicien, qui, durant la guerre, rejoignit en Italie les mouvements de résistance avant d'entamer une seconde carrière, celle de chef d'orchestre, domaine où il est universellement connu. Organisateur du Mai musical florentin en 1944, après la libération de Florence, il a acquis la nationalité italienne ; c'est également l'époque de la dissolution de son premier mariage, et d'un second mariage. Au cours des trente ans qui suivirent, Markevitch tint plusieurs postes de chef d'orchestre permanent dans de nombreuses villes : Stockholm, Paris (orchestre Lamoureux), Montréal, Madrid, Monte-Carlo, Rome. Ses concerts firent date, et l'éminent critique suisse R. Aloys Mooser n'hésita pas à écrire : « Au cours d'une longue vie, j'ai rencontré seulement deux compositeurs à propos desquels on pouvait dire avec raison qu'ils possédaient des aptitudes égales dans l'art de la composition et dans celui de la conduite : Gustav Mahler et Richard Strauss. À ces deux noms exceptionnels, on peut ajouter celui d'Igor Markevitch. » Fixé à Saint-Cézaire, près de Nice, depuis 1954, Markevitch a travaillé pendant des années à la préparation de cours à l'attention de ses élèves et à une édition encyclopédique des symphonies de Beethoven qui a commencé à paraître en 1982. En 1980 est paru le premier tome de ses mémoires (Être et avoir été). En 1982, il a reçu le prix Arthur-Nikisch de la ville de Leipzig et obtenu la nationalité française.