Emanuele Conegliano, dit Lorenzo Da Ponte

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Poète et librettiste italien (Ceneda, aujourd'hui Vittorio Veneto, 1749-New York 1838).

Né dans une famille de confession juive, il s'appelait en réalité Emmanuele Conegliano, et prit le nom et le prénom de l'évêque de Ceneda lorsque son père se convertit avec ses trois fils (1763), dont il était l'aîné. Ordonné prêtre en 1773, il enseigna à Trévise puis à Venise, et, en 1779, fut banni pour quinze ans de cette ville pour adultère. Après un bref séjour à Dresde, il s'installa en 1781 à Vienne, où Joseph II le nomma librettiste du nouveau théâtre italien. Il écrivit d'abord pour Salieri, mais obtint ses premiers grands succès en 1786 avec Le Nozze di Figaro destiné à Mozart, et surtout Una cosa rara destiné à Martin y Soler. En 1787, il écrivit pour Salieri Axur, d'après Tarare de Beaumarchais, pour Martin y Soler L'Arbore di Diana et pour Mozart Don Giovanni, et en 1789-90 pour Mozart Cosi fan tutte. La mort de son protecteur Joseph II (1790) l'obligea à quitter Vienne. Il se rendit à Prague (où il rencontra Casanova), puis à Dresde, et à l'automne de 1792 arriva à Londres, où, compte non tenu de séjours en Hollande (1793) et en Italie (1798), il devait rester treize ans. Nommé librettiste du King's Theatre en 1793, il perdit plus tard cette place, et des difficultés financières croissantes le forcèrent à émigrer en Amérique avec sa famille (1805). À New York, il fut épicier puis libraire et professeur d'italien, et, en 1825, assista à la première de Don Giovanni dans cette ville : ce fut pour lui une sorte d'apothéose. Il y écrivit aussi ses mémoires (Memorie di Lorenzo Da Ponte di Ceneda scritte da esso, New York, 1823-1827, éd. rév. 1829-30), ouvrage intéressant, paru à plusieurs reprises (dont deux en 1980) en français, mais qu'il faut se garder de prendre au pied de la lettre. Ses livrets, dont le nombre dépasse la trentaine, valent moins par leur profondeur que par leur vivacité et leur simplicité, et surtout par leur sens remarquable des contrastes, de l'antithèse et de l'opposition de caractères. À ce titre, sa plus grande réussite semble bien être Cosi fan tutte.