festival d'Aix-en-Provence

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Organisé par la ville d'Aix-en-Provence avec le concours de la Société du casino d'Aix-Thermal et de divers organismes et collectivités publics, le « festival international d'art lyrique et de musique d'Aix-en-Provence », le plus célèbre festival de France, naquit du désir de l'imprésario Gabriel Dussurget de créer et d'animer une grande manifestation musicale dans le Midi. Séduit par le calme et les richesses artistiques d'Aix-en-Provence, G. Dussurget jeta son dévolu sur cette cité et reçut immédiatement l'appui de plusieurs personnalités locales. Il fut décidé de consacrer ce nouveau festival essentiellement à Mozart. Le 23 juillet 1948, eut lieu la manifestation inaugurale, un concert Mozart donné par l'orchestre des cadets du Conservatoire de Paris, sous la direction de Hans Rosbaud. Le 28 juillet, ce fut le premier spectacle d'opéra, Così fan tutte, donné par la compagnie Marisa Morel et dirigé par Hans Rosbaud, dans la cour de l'Archevêché, que le peintre Cassandre devait aménager par la suite en théâtre et qui devait devenir le lieu privilégié des spectacles lyriques aixois.

Les talents conjugués de H. Rosbaud et de l'organisateur et découvreur de talents G. Dussurget donnèrent en peu d'années au festival sa brillante image de marque. Aix-en-Provence put mériter le nom de « Salzbourg français » en se distinguant par une caractéristique très importante : faute de moyens financiers, Aix présente à son public, en particulier dans le domaine du chant, non des vedettes consacrées, mais de jeunes artistes de talent, le plus souvent de futures grandes vedettes. À partir du Don Juan de 1949, et durant quelque vingt années, Aix fit entendre souvent, à de nombreuses reprises, de grands chanteurs, encore inconnus ou peu connus : Renato Capecchi, Léopold Simoneau, Graziella Sciutti, Ernst Haefliger, Leonie Rysanek, Rolando Panerai, Teresa Stich-Randall, Nicolaï Gedda, Teresa Berganza, Luigi Alva, Fritz Wunderlich, Pilar Lorengar, Christiane Eda-Pierre, Gabriel Bacquier, Jane Berbié, Gundula Janowitz, Josephine Veasey, sans parler de nombreux autres artistes tels que le chef d'orchestre Carlo Maria Giulini.

En dehors des œuvres de Mozart, qui demeurèrent alors le cœur du répertoire aixois, eurent lieu des représentations mémorables : Orfeo et le Couronnement de Poppée de Monteverdi, Didon et Énée de Purcell, et, de même, Platée de Rameau (avec Michel Sénéchal), Orphée et Iphigénie en Tauride de Gluck, Il Mondo della luna de Haydn, le Mariage secret de Cimarosa, le Barbier de Séville de Rossini, Falstaff de Verdi, Ariane à Naxos de Richard Strauss, Pelléas et Mélisande de Debussy. Cette liste est loin d'être limitative, et il convient de mentionner aussi les créations de Lavinia de Barraud (1961), les Malheurs d'Orphée de Milhaud (1962), Beatris de Planissolas de Jacques Charpentier (1971).

Sur plusieurs plans, le festival d'Aix traça alors des voies nouvelles qui devaient avoir une influence profonde sur la vie lyrique française, innovations qui consistèrent dans l'élargissement du répertoire, le retour aux opéras classique et baroque, la restauration des versions originales d'opéras étrangers, enfin l'appel à des peintres connus qui n'étaient pas forcément décorateurs (Cassandre, Wakhevitch, Lalique, Ganeau, Malclès, Clayette, Derain, Balthus) et, pour la mise en scène, à des hommes de théâtre qui n'avaient pas ou n'avaient guère encore abordé le domaine du lyrique (Meyer, Sorano, Cocteau, etc.). Pour en terminer avec cette ère, précisons que les opéras étaient loin de constituer le seul attrait du festival. L'intérêt des récitals n'était pas moindre et, dans les nombreux concerts, la musique moderne et contemporaine fut à l'honneur. Maintes créations ou premières auditions en France s'y déroulèrent, allant d'Auric, Sauguet, Dutilleux, Rivier et Bondon à Guézec, Jolas et Koering en passant par Webern, Petrassi, Henze, Xenakis et Nono.

Après une période moins éclatante, Bernard Lefort fut nommé directeur du festival en avril 1973. L'avènement du répertoire préromantique et romantique italien (Cherubini, Rossini, Donizetti, Verdi), l'appel à une nouvelle génération de metteurs en scène (Jorge Lavelli, dont la Traviata en 1976 et Alcina en 1978 ont fait date ; Jean-Pierre Vincent, Jean-Claude Auvray, Jean-Louis Thamin), l'utilisation de la place des Quatre-Dauphins pour certains petits ouvrages (Pergolèse, Cimarosa, etc.) caractérisent cette nouvelle époque du festival où les concerts vocaux et instrumentaux demeurent extrêmement brillants. Des spectacles comme Così fan tutte de Mozart (1977), mis en scène par Jean Mercure, et surtout Alcina de Haendel, mis en scène par Lavelli, avec un plateau de chanteurs d'une qualité exceptionnelle, montrent que le changement s'effectue dans une certaine continuité. Mais c'est une ère très différente qui s'est ouverte avec la direction de Louis Erlo (1982-1996). En 1992, l'association qui gérait le festival a cédé la place, à la demande de l'État, à une société d'économie mixte. Nommé en 1995 alors qu'il était déjà directeur du Châtelet et de l'Orchestre de Paris, le successeur de Louis Erlo, Stéphane Lissner, prendra ses fonctions en 1998.