littérature catalane
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
La période ancienne de la littérature catalane connaît quatre phases. La première va du règne de Jacques ier d'Aragon le Conquérant (1213-1276) au début du règne de Pierre IV (1336-1387). Les troubadours du midi de la France sont accueillis en Catalogne après la croisade contre les albigeois. Le poète catalan Guillem de Cervera écrit en provençal, ou plutôt en limousin ; les prosateurs emploient le catalanech ou català. Raymond Lulle, ardent missionnaire et philosophe, use des deux langues, suivant qu'il écrit en vers ou en prose. Dans la deuxième période (1335-1429), les poètes abandonnent peu à peu la langue provençale. Mais l'Italie influe de plus en plus sur la poésie, notamment chez Jordi de Sant Jordi et Andreu Febrer. La prose est représentée par Pierre IV, Bernat Metge et Eiximenis. La troisième période (1430-1459) se distingue par l'emploi exclusif du catalan en poésie comme en prose. La poésie catalane atteint son apogée avec le Valencien Ausiàs March, et la prose, avec des romans de chevalerie tel l'anonyme Curial e Güelfa. Avec la quatrième et dernière période (de 1460 aux premières années du xvie s.) commence la décadence. L'Aragon et la Catalogne étant définitivement réunis à la Castille, l'infiltration castillane absorbe la littérature catalane.
Après trois siècles, Buenaventura Carlos Aribau marque le début de la « Renaixença » avec son ode à la Patrie (1833). Les jeux Floraux sont restaurés (1859) et couronnent en 1877 l'Atlantide de Jacint Verdaguer (1845-1902), dont la célébrité dépasse bientôt les frontières, comme celle du théâtre d'Àngel Guimerà (1845-1924). Les lettres catalanes se tournent d'ailleurs vers l'Europe au début du xxe siècle, avec le « noucentisme » et dans le sillage du poète Joan Maragall (1860-1911), imité, entre autres, par Josep Maria de Sagarra (1894-1961) et Josep Vicenç Foix (1893-1987). Si le catalan parlé présente des variantes dialectales sensibles, la langue écrite, dotée d'une orthographe et d'une syntaxe codifiées par le philologue Pompeu Fabra (1868-1948), est unique. La fin de la guerre civile en 1939 ouvre une période d'exil et de silence, suivie, dès les années 1960, d'un renouveau encouragé par la publication de nombreux travaux d'érudition, de traductions et la création de prix littéraires.
Longtemps inscrit dans la tradition naturaliste, depuis Solitude (1905) de Víctor Català (1873-1966), le roman, dominé par l'œuvre de Josep Pla (1897-1981), traduit ensuite une volonté d'engagement avec Sébastián Juan Arbó (1902-1984), Josep M. Espinàs, Maria Aurèlia Capmany, avant de s'ouvrir aux problèmes plus personnels avec Mercè Rodereda et Ramon Folch i Camarasa, ou de s'attacher aux recherches formelles avec Aveli Artís-Gener ou Terenci Moix. La poésie traduit l'angoisse de l'homme aux prises avec les oppressions et les aliénations du monde moderne, dans une tonalité plus sereine avec Salvador Espriu (1913-1985), plus nostalgique avec Pere Quart et Joan Vinyoli, plus passionnée chez Joan Brossa, Joan Colomines, ou plus attentive à son propre chant avec Lluís Alpera ou Alvar Valls.