formalisme russe
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Ce terme, initialement péjoratif, a été repris par les membres d'un mouvement issu de deux cercles littéraires animés par de jeunes critiques, Roman Jakobson (1896-1982) à Moscou, Viktor Chklovski (1893-1894) et Boris Eikhenbaum (1886-1959) à Saint-Pétersbourg. Attentifs aux acquis de la linguistique et aux expérimentations de la poésie moderne, futuriste en particulier, ceux-ci entendent se débarrasser à la fois de l'histoire littéraire et de la critique subjective pour élaborer une « science de la littérature ». Héritiers en cela des symbolistes, ils travaillent d'abord sur la spécificité de la langue poétique, ce qui leur permet de dégager des « procédés » qui fondent la « littérarité » d'un texte et sa puissance de « défamiliarisation ». Si Jakobson, en émigrant, a poursuivi l'entreprise formaliste, dont est issu le structuralisme, les formalistes restés en Russie, sous la pression du réalisme socialiste, reviennent sur leur position. Les grands textes fondateurs de Boris Tomachevski (1890-1957), Iouri Tynianov (1894-1943), Viktor Jirmounski (1891-1971) sur le vers, et de Chklovski et Eikhenbaum sur la prose sont donc tous antérieurs aux années 1930. Beaucoup de formalistes se sont tournés vers la biographie ou la fiction (Chklovski, Zoo, 1923 ; Tynianov, Lieutenant Kije, 1928).