Charles Juliet

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Écrivain français (Jujurieux, Ain, 1934).

Placé à trois mois, après la tentative de suicide de sa mère, dans une famille de paysans du Jura, enfant de troupe à Aix-en-Provence de 12 à 20 ans, il entre à l'École de Santé Militaire de Lyon mais abandonne à 23 ans ses études pour se consacrer à l'écriture – un parcours qu'il retrace dans l'Année de l'éveil (1989), l'Inattendu (1992) et surtout Lambeaux (1995), récit autobiographique d'abord adressé à la mère disparue qui mourra après huit ans d'enfermement abusif en hôpital psychiatrique. Pour celui qui, blessé, « désespère de vivre », l'écriture est au plus haut point une quête de soi et l'exigence d'une impossible « adhésion à la vie » : ainsi son Journal, entrepris dès 1957 (dernières éditions : Accueils, Journal 4, 1982-1988, 1994 ; Lueur après labour, Journal 3, 1968-1981, 1997 ; Traversée de nuit, Journal 2, 1965-1968, 1997 ; Ténèbres en terre froide, Journal 1, 1957-1964, 2000), est d'abord un aveu d'impuissance écrit dans une souffrance âprement assumée afin de « se révéler à soi-même, se clarifier, s'unifier ». L'introspection est aussi au centre de sa poésie depuis l'Œil se scrute (1976), Une lointaine lueur (1977), Fouilles (1980) et Approches (1981), dont le dépouillement et la concision visent, dans le refus de toute complaisance lyrique, à atteindre une « clarté intérieure » : un combat contre la tentation du silence et du repli qu'il retrouve chez des écrivains (Beckett, Leiris) et des artistes (Bram Van Velde, Giacometti, Cézanne) auxquels il a consacré plusieurs essais.