Joseph de Maistre

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Homme politique et philosophe savoyard de langue française (Chambéry 1753 – Turin 1821).

Il émigra à Lausanne (1793) puis rejoignit en Sardaigne (1799) Charles-Emmanuel IV, qui en fit son ambassadeur en Russie (1802-1817). C'est, avec Bonald, l'adversaire le plus passionné de l'esprit du xviiie s. et de la Révolution française, à laquelle il recherche une explication métaphysique (Considérations sur la France, 1797). Il partage avec Saint-Martin l'idée d'une unité providentielle du monde. Une nation, composée de toutes ses générations, non seulement vivantes mais passées et à venir, s'incarne dans la continuité d'une dynastie : en proclamant les droits de l'individu, la Révolution française a brisé cette unité nécessaire. Régime artificiel, qui a cru remplacer la sagesse par des lois, elle ne peut donc durer : la Restauration est inévitable. Les événements de 1814 donnèrent à Joseph de Maistre une allure de prophète. Il proposa alors de rassembler l'Europe sous le pouvoir spirituel de Rome (Du pape, 1819) et donna, avec les Soirées de Saint-Pétersbourg (1821), un « cours complet d'illuminisme moderne » : il n'y a pas d'innocents, le monde est condamné à la violence, mais le sang versé a une vertu purificatrice ; des oracles païens aux illuminés modernes, le monde chemine dans la souffrance vers la réintégration à l'unité primitive – de l'ironie à la colère et à l'émotion, un des grands livres du romantisme.