Ihara Saikaku, dit Saikaku
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Écrivain japonais (Osaka 1642 – id. 1693).
Issu d'une famille de marchands d'Osaka, il commença, vers l'âge de 15 ans, à cultiver l'art du haikai, s'imposant à partir de 1673 comme une des principales figures du haikai nouveau, regroupé autour du poète Nishiyama Soin (1605-1682). Grâce à son intarissable fantaisie et à la prodigieuse rapidité de son esprit, il devint le champion incontesté des concours de haikai en solitaire, composant successivement 1 600 (1677), puis 4 000 (1680) et enfin 23 500 vers (1684), en 24 heures, ce qui lui vaut le surnom de « Vieillard aux 20 000 vers ». À partir de 1682, il commence à prendre ses distances avec un haikai en pleine crise, pour explorer le genre romanesque. La Vie d'un ami de la volupté (1682) évoquant les pérégrinations d'un jeune dandy, Yonosuke, préoccupé des seules choses de l'amour, marque la naissance d'un genre nouveau, l'ukiyozoshi ou « livrets du monde flottant », dans lequel Saikaku explore les multiples aspects de la société de son temps. Sans doute encouragé par le succès de son premier roman, Saikaku poursuit la peinture du monde du plaisir (kôshoku) dans le Grand Miroir de la galanterie (1684), dans Cinq Amoureuses (1686), roman inspiré de faits réels, qui retrace la passion tragique de cinq jeunes femmes, ou encore dans la Vie d'une amie de la volupté (1686), vaste encyclopédie du monde du plaisir observé par les yeux d'une héroïne qui en a franchi tous les degrés : de la grande courtisane à la prostituée de carrefours. Cependant, dès 1685 avec les Contes de toutes les provinces de Saikaku, le romancier élargit son exploration à d'autres sphères de la vie sociale. C'est en tout une vingtaine de recueils qu'il compose dans les quelque dix ans qui s'étendent entre son premier roman et sa mort, en 1693. Après le monde des guerriers, thème des Notes sur la transmission de la voie des guerriers (1687) ou des Récits du devoir des guerriers (1688), c'est celui des chonin (bourgeois) qu'il aborde dans le Grenier éternel du Japon (1688), ou encore dans les Comptes de ce bas monde (1692), où il montre la foule des gens du peuple face à ses créanciers, la veille du jour de l'an. Très lié au monde des acteurs du kabuki, Saikaku lui rend un éclatant hommage dans le Grand Miroir de l'amour mâle (1687), où des récits d'amour entre samouraïs côtoient une chronique de la vie théâtrale du xviie siècle. Parmi les cinq recueils posthumes, publiés entre 1693 et 1699 et dont l'authenticité a suscité de nombreux débats, on peut signaler notamment les Dix Mille Lettres au rebut, recueil de nouvelles de forme épistolaire. Observateur détaché et perspicace de son temps, styliste hors pair, créateur d'une prose d'une étonnante richesse où, sur un fond de réminiscences classiques, se font entendre toutes les voix d'une époque, Saikaku reste le grand romancier de l'époque d'Edo.