Henry Fielding

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Écrivain anglais (Sharpham Park, Somersetshire, 1707 – Lisbonne 1754).

Issu d'une famille liée aux Habsbourg, il fait ses études à Eton avec Fox et Pitt. Son père l'envoie à Leyde pour éviter une mésalliance mais, après s'être remarié, lui coupe les vivres. Il vit alors de comédies et de farces (l'Amour sous plusieurs masques, 1728 ; la Tragédie de Tom Pouce le Grand, 1730), attaque audacieusement la famille royale (l'Opéra gallois, 1731), met en scène des « marionnettes vivantes » (la Farce de l'auteur, 1734), avant de se marier et de dissiper la fortune de sa femme. Il fonde sa propre compagnie pour jouer les Annales historiques de 1736, persiflage si brillant contre Walpole que le roi rétablit la censure préventive et limite à deux le nombre des théâtres londoniens. Fielding renonce alors au théâtre. Avocat, puis journaliste (The Champion 1739-1741 ; The True Patriot, 1745-1746), il réaffirme son mépris pour la vilenie des classes dirigeantes. Il publie anonymement une parodie bouffonne de la Pamela de Richardson, qui triomphe depuis 1740 : Shamela (de sham, « faux », imposture) reprend la méthode épistolaire pour narrer l'histoire d'une jeune femme qui use de ses charmes sans scrupules ni pudeur. Fielding transpose ensuite au masculin le thème de la vertu pourchassée avec les Aventures de Joseph Andrews (1742). Le parcours du prétendu frère de l'illustre Pamela commence en parodie, puis tourne à la satire, avant de finir en hymne à la bonté. En 1743, sitôt Walpole tombé (qui avait payé pour en empêcher la parution), Fielding publie la Vie de Jonathan Wild. Reprenant l'histoire d'un bandit de grand chemin exécuté en 1725, qu'avait déjà héroïsé Defoe, il fait du banditisme le miroir de l'État, en peignant l'hypocrisie d'une canaille qui, fort de son succès, joue les bienfaiteurs publics. Nommé juge du comté de Middlesex, puis de Westminster, Fielding lutte alors contre la corruption de ses confrères, tente d'humaniser les rues de Londres et de réformer la pègre. Tom Jones, enfant trouvé (1749) est le chef-d'œuvre de « l'épopée comique en prose » : après bien des péripéties, Tom découvre ses vrais parents, triomphe de son rival et épouse enfin sa fiancée. Cette variation sur les thèmes de la bâtardise et de la noblesse du cœur se développe dans un climat de vitalité et d'allégresse virile peu courant en Angleterre. Dans l'Enquête sur la multiplication des voleurs et Amélie (1751), Fielding se montre de plus en plus préoccupé par le paupérisme. Avec, derrière l'humour, une lucidité combattante et le sens de la noblesse de toute vie, cet aristocrate honteux de sa classe aura paradoxalement créé le roman bourgeois. Sa sœur Sarah (1710-1768) a posé dans ses romans le problème de l'éducation (David Simple, 1744 ; la Gouvernante, 1749).