Françoise Quoirez, dite Françoise Sagan

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Romancière française (Cajarc 1935 – Honfleur 2004).

Le succès immédiat de Bonjour tristesse (1954, prix des Critiques), récit au ton insolite d'une adolescente indépendante et détachée, la consacra alors qu'elle n'avait pas 20 ans, et les lecteurs accueillirent avec la même faveur les romans qui suivirent : Un certain sourire (1956), Aimez-vous Brahms ? (1959), les Merveilleux Nuages (1961), la Chamade (1968), le Garde du cœur (1968), Un peu de soleil dans l'eau froide (1969), Des bleus à l'âme (1972), le Lit défait (1977), la Femme fardée (1981), Un orage immobile (1983). À quelques exceptions près (le Chien couchant, 1980, qui raconte une histoire d'amour tragique dans les corons du Nord ; De guerre lasse, 1985, et Un sang d'aquarelle, 1987, qui ont pour toile de fond l'Occupation), elle dépeint une société mondaine, fréquentant Saint-Germain-des-Prés et la Côte d'Azur, les restaurants et des maisons de campagne, conduisant des voitures de sport. Des personnages imités de Fitzgerald (comme elle l'écrit, en 1974, dans Un profil perdu), riches oisifs, bronzent et s'embrassent, boivent et fument ; des hommes mûrs révèlent à la trop jeune fille que l'amour ne se fait bien qu'avec les hommes cyniques, expérimentés, précis dans leur désir mais froidement conscients du néant de leur existence. Mais, contrairement aux personnages de Fitzgerald, ceux de Sagan ne semblent avoir aucun point de référence, conscients de toute éternité que toute vie est un processus de démolition et que le plaisir et le contentement peuvent au mieux divertir. Sur les sources de ce vague et distingué dégoût, la romancière n'est guère explicite. Le cynisme, que la critique des années 1950 nommait « amoralité », est brandi comme la seule défense efficace. Par-delà la thématique facile, un ton demeure, fait de sobriété et de simplicité : peu ou pas de descriptions (ou proches du cliché) ; abondance des verbes « être » et « avoir » ; phrases courtes ou écourtées, à l'image de cette absence d'horizon, ce refus de se battre et même de chercher à comprendre que Mauriac avait parfaitement repéré : Sagan « fait tenir dans les mots les plus simples le tout d'une jeune vie. Et il est vrai que ce tout n'est rien, et que ce rien, c'est pourtant la jeunesse, la sienne, celle de tant d'autres, en fait de tous ceux qui ne se donnent pas. » Le même ton caractérise son théâtre (Château en Suède, 1960 ; Les violons parfois..., 1962 ; la Robe mauve de Valentine, 1963 ; le Cheval évanoui, 1966 ; Il fait beau nuit et jour, 1978) et ses nouvelles (Des yeux de soie, 1976 ; Musique de scène, 1981). Après avoir publié ses Mémoires (Avec mon meilleur souvenir, 1984), elle évoque une vieille femme alcoolique dans le Miroir égaré (1996) et se repenche avec humour et légèreté sur son passé dans Derrière l'épaule (1998). Elle est aussi l'auteur d'une correspondance imaginaire avec Sarah Bernhardt (Sarah Bernhardt ou le rire incassable, 1987).