Émile Deschamps de Saint-Amand, dit Émile Deschamps

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Poète français (Bourges 1791 – Versailles 1871).

Son père tenait salon à Paris. La « naissante hérésie » romantique y forma l'un de ses premiers cénacles. Il y rencontra Henri de Latouche, avec lequel il écrivit deux comédies, Hugo (il fonde avec lui la Muse française en 1823), Vigny (traduction avec lui de Roméo et Juliette en 1827). Sa diffusion des idées de la nouvelle école et l'ouverture aux autres littératures sont prolongées par les Études françaises et étrangères (1828) à l'imposante « Préface ». Deschamps fut l'un des maîtres à penser de ces romantiques qui se réunissaient dans son salon, dont Hugo, qui y lit sa « Préface » de Cromwell (1827). Refusant de s'engager sur le terrain politique et de faire de l'art une arme de combat, il voit son audience décliner. Mais le culte formel dans la « Préface » des Études attire à lui les poètes du « regain de 1830 » (les parnassiens, et même Mallarmé). Il joue le rôle de « maître » auprès des jeunes écrivains pour lesquels il demeurait « la lueur douce de la farouche aurore romantique » (Catulle Mendès). Il contribue à élargir l'horizon français  avec des traductions et des adaptations, de l'anglais (Shakespeare : il fit jouer Macbeth en 1848), de l'allemand (Goethe, Schiller, Uhland et même les Lieder de Schubert), de l'espagnol (le Romancero), du russe. À l'opposé du sonore Hugo, il adopte une attitude mesurée qui traduit plutôt le désir de régénérer le classicisme que celui de bouleverser la littérature. Cette situation explique le recours à l'écriture (« La forme n'est rien, mais rien n'est sans la forme ») et fait de Deschamps le maillon de l'histoire de la poésie française : celui qui unit, par-delà les écoles et les tendances, les amoureux de la forme.