Charlotte Brontë
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Romancière anglaise (Thornton, Yorkshire, 1816 – Haworth 1855).
Des six enfants du pasteur Patrick Brontë, Charlotte est celle qui vécut le plus longtemps et la seule qui se maria et connut le succès de son vivant. Après avoir donné naissance à cinq filles et un garçon, leur mère meurt en septembre 1821, et les enfants sont élevés par leur tante. En 1825, les deux sœurs aînées, Maria et Elizabeth, succombent à la tuberculose, âgées d'une dizaine d'années. Les quatre survivants ne sont pas scolarisés et découvrent les joies de l'écriture à travers la rédaction d'épopées abracadabrantes, situées dans des royaumes imaginaires. C'est en Angria que Charlotte fait aimer et mourir ses personnages, tandis que son frère Branwell les fait s'affronter sur des questions politiques. En 1831, Charlotte est envoyée dans une école où elle revient quelques années plus tard en tant que professeur. N'ayant pas connu le succès en tant que gouvernantes, Charlotte et Emily partent pour Bruxelles afin d'améliorer leur connaissance des langues (1842-1843). Vers 1845, les trois sœurs, étant parvenues à faire publier un recueil de leurs poèmes, se mettent en quête d'un éditeur pour leurs romans respectifs. Alors que les manuscrits d'Emily et d'Anne sont acceptés, celui de Charlotte est refusé. Le Professeur, largement inspiré de ses démêlés sentimentaux en Belgique, ne paraîtra qu'à titre posthume (1857). Sur la suggestion de l'éditeur, Charlotte soumet peu après un roman complètement différent : c'est Jane Eyre, publié sous le pseudonyme de Currer Bell (1847). Orpheline envoyée dans une sinistre pension, l'héroïne devient gouvernante et s'éprend de son employeur. Mais elle fuit en découvrant que Rochester est marié à une folle qu'il cache dans son château. Celle-ci meurt dans l'incendie qu'elle a provoqué ; en voulant la sauver, Rochester devient aveugle. Jane revient et plus rien ne s'oppose à leur union. Malgré les aspects mélodramatiques de l'intrigue, la critique se montre enthousiaste. De l'autobiographie romancée à la vision romantique, ce roman propose une affirmation neuve du désir des femmes.
En 1848, le frère adoré, Branwell, meurt, bientôt suivi par Emily et Anne. Avec son père, Charlotte est la seule survivante. Sa notoriété lui permet de fréquenter le milieu intellectuel londonien. En 1849, elle publie Shirley, roman dont l'intrigue sentimentale prend pour toile de fond les émeutes « luddites » de 1812, contre la mécanisation des industries. Son dernier roman, Villette (1853), reprend la formule de Jane Eyre (une jeune femme raconte elle-même son histoire) et l'applique à la situation déjà développée dans le Professeur (intrigues amoureuses dans un pensionnat à Bruxelles), pour un mélange ambigu de réalisme pittoresque et de romantisme échevelé. En juin 1854, Charlotte épouse Arthur Bell Nicholls, vicaire de son père. Enceinte, fatiguée par sa grossesse, elle meurt le 31 mars 1855, succombant à la maladie pulmonaire qui avait fauché son frère et ses sœurs avant elle.