Bruno Schulz
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Écrivain polonais (Drohobycz 1892 – id. 1942).
Fils de modestes commerçants juifs, il entreprend sans les terminer des études d'architecture à Lwów (1911-1914), puis de peinture à Vienne. De 1924 à 1939, il enseigne le dessin au lycée de sa ville natale, tout en s'adonnant à la gravure (il expose plusieurs fois à Varsovie et illustre en 1938 le Ferdydurke de Gombrowicz). Après quelques articles donnés aux Wiadomości Literackie, il se rapprocha du groupe du Faubourg, réaliste et progressiste, mais s'en sépara vite. Il publie alors, sur un fond de souvenirs d'enfance, deux cycles de récits qui deviennent un des événements littéraires les plus importants de la Pologne de l'entre-deux-guerres. Les Boutiques de cannelle (1934) et le Sanatorium au croque-mort (1937) sont une autobiographie fantastique où se mêlent des souvenirs réels et imaginaires de l'enfance dans la petite ville juive de Drohobycz. Selon une mythologie personnelle à l'auteur, l'instant présent, brut et informe, ne prend place et valeur que lorsque le futur lui a donné sa consistance réelle. Le récit, souvent surréaliste, tourne autour du personnage étrange d'un père dont seule une démarche psychanalytique peut expliquer la relation à l'auteur. Le ton proche de celui de Kafka (dont Schulz traduisit le Procès en 1936), une imagination surréaliste, les appels fréquents au freudisme, l'amertume de l'histoire, le grotesque douloureux des portraits, joints à la minutie hyperréaliste des descriptions, y créent une atmosphère où l'émotion le dispute au dérisoire. Découvert par Z. Nałkowska, Schulz est, à l'égal de S. I. Witkiewicz et de W. Gombrowicz qui furent ses amis, l'un des grands auteurs de l'entre-deux-guerres. Il fut assassiné d'un coup de crosse par un nazi qui voulut se venger de l'Allemand auquel Schulz servait d'esclave. Son œuvre immense tant romanesque que graphique s'en trouva interrompue prématurément.