Alexandre Dumas
dit Dumas fils
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».
Écrivain français (Paris 1824 – Marly-le-Roi 1895).
Fils de la couturière Catherine Labay, il est reconnu par son père à l'âge de 7 ans mais souffre d'être un « fils naturel » en butte aux quolibets de ses camarades de pension et lamentablement ballotté jusqu'au sein des tribunaux, entre père et mère. À 18 ans, il se jette à corps perdu dans une existence désordonnée et voluptueuse qu'il partage avec nombre de courtisanes brillantes. De bacchanales en plaisirs d'alcôve, il évolue dans un monde interlope où il « fait » la seule chose que son père lui avait enseignée : des dettes. Il y parvient si bien qu'il est contraint de suivre jusqu'au bout la voie tracée : après un volume de vers (Péchés de jeunesse, 1847), il se tourne vers le roman avec Aventure de quatre femmes et d'un perroquet (1847), bientôt suivi de la Dame aux camélias (1848), qui, inspiré de la vie de Marie Duplessis, développe le thème romantique de la bayadère à laquelle de nombreux amants n'ont su faire connaître l'amour ; quand enfin elle le découvre, elle lui sacrifie tout, jusqu'à son bonheur, et consent à éloigner l'élu de son cœur qu'elle remet dans le droit chemin, celui de la famille et de la société bourgeoise. Si, après cette brillante réussite, rémunératrice et encourageante, Diane de Lys (1851), dans la même veine, jouit encore d'un accueil chaleureux, ses autres romans (Trois Hommes forts, 1850 ; le Régent Mustel, 1852) ne lui apportent plus guère qu'un succès d'estime. Mais l'adaptation à la scène la Dame aux camélias (1852) sera l'un des triomphes les plus éclatants du siècle. Désormais, hormis quelques brochures exposant les théories mises en situation dans ses drames (l'Homme-femme, 1872 ; la Question du divorce, 1880), Dumas fils n'écrira pratiquement plus que pour la scène : quand, après quelques modifications, la Dame aux camélias devient la Traviata, il est mondialement connu ; son œuvre est la première à s'imposer depuis le coup d'État et l'on veut voir en lui le fondateur d'une nouvelle dramaturgie. La comédie de mœurs est née et la vogue de cette fusion, difficilement supportable, du romantisme passionnel et de l'observation sociale à fins édifiantes durera le temps d'un régime. Dumas fils est certainement parmi ses contemporains celui qui croit le plus en la puissance du théâtre, et c'est pour les prémunir contre les attraits dangereux d'un « demi-monde » où se côtoient verts galants quinquagénaires et femmes aux conjoints invisibles qu'il leur peint dans ses moindres détails cette société où les hâbleries les plus machiavéliques se dissimulent avec grâce dans les dentelles des belles dames et où, parfois, se fourvoient l'innocence et la naïveté. Apôtre de la réhabilitation de la jeune fille séduite et de l'enfant né des amours illégales, il travaille la formule (le Demi-monde, 1855 ; Un père prodigue, 1859 ; l'Ami des femmes, 1864 ; Une visite de noces, 1871 ; la Femme de Claude, 1873) et complète son œuvre dramatique par de longues préfaces. Dans celle du Fils naturel (1858), il déclare : « Par la comédie, par la tragédie, par le drame, par la bouffonnerie, dans la forme qui nous conviendra le mieux, inaugurons le théâtre utile, au risque d'entendre crier les apôtres de l'art pour l'art, trois mots absolument vides de sens. »