Église constitutionnelle

Église qui se forma à la suite de la Constitution civile du clergé (12 juillet 1790) et de la prestation de serment de fidélité à cette Constitution exigée par l'Assemblée constituante de tous les « fonctionnaires ecclésiastiques » par décret du 1790.

1. La réaction des évêques

Tandis que Pie VI, alerté, ne se prononce pas officiellement, les évêques se décident donc, le 30 octobre 1790, à publier une Exposition des principes sur la Constitution civile du clergé, qui dénonce les « erreurs » de celle-ci, tout en se déclarant prêts à « éviter une déplorable scission ». Or, loin de consentir à un accommodement, l'Assemblée constituante, le 27 novembre, réplique par un décret astreignant tous les « fonctionnaires ecclésiastiques » au serment à la Constitution civile du clergé, sous peine de déposition.

Cette loi pose au clergé un tragique cas de conscience. Les évêques, sauf sept, dont quatre titulaires, Étienne Charles Loménie de Brienne, Louis François Talleyrand, Alexandre de Jarente et Charles La Font de Savine, refusent de prêter serment. Mais leur exemple compte assez peu pour déterminer l'option de leurs prêtres, car ils sont nobles, et beaucoup d'entre eux ne tardent pas à quitter la France, avec la première émigration, essentiellement aristocratique.

Les « fonctionnaires ecclésiastiques », dits du « second ordre », se partagent par moitié dans l'ensemble, mais dans des proportions très inégales selon les régions, voire selon les terroirs des diocèses. D'aucuns jurent avec enthousiasme, d'autres avec résignation, certains avec des réserves pourtant interdites, qu'ils masquent dans un préambule alambiqué et que les municipaux font mine de ne pas comprendre ; officiellement en règle avec le décret, ils forment la catégorie des semi-constitutionnels.

S'il est difficile de démêler et de peser les motifs qui décident les jureurs, on doit toutefois convenir que beaucoup, finalement cèdent pour maintenir la religion, pour répondre aux vœux de leurs paroissiens et, surtout, pour ne pas se prononcer en faveur du seigneur contre leurs paysans libérés des droits féodaux.

2. Survivance et fin de l'Église constitutionnelle

L'organisation de l'Église constitutionnelle, dont le chef moral est l'abbé Grégoire, notamment au niveau des paroisses, se heurte, d'une part, à l'opposition des insermentés, d'autre part, à la condamnation, en mars 1791, de la Constitution civile par Pie VI. Persécutée et amoindrie par les défections, l'Église constitutionnelle reprend vie après le 9-Thermidor (juillet 1794) au point que, lors des tractations qui précèdent le Concordat (1801), Bonaparte en tient compte ; il favorise la tenue du second concile national, quitte à le dissoudre brutalement une fois le traité signé. Soucieux de rétablir l'unité nationale – dont l'unité religieuse paraît une condition essentielle – lors des nominations épiscopales il pratique l'amalgame, en réservant douze sièges à des évêques constitutionnels. Il exige, de surcroît, qu'une certaine proportion de postes soit réservée dans les diocèses assermentés et interdit d'imposer la moindre rétractation.

En fait, Rome et les évêques se résignent, mais non sans difficulté, à se contenter de celles qu'on peut obtenir et à fermer les yeux sur les refus ou les réticences. Cette politique de l'amalgame, peu conforme aux principes canoniques, en permettant une provisoire survivance de l'Église constitutionnelle, aura avec le temps l'avantage de la faire, sans éclat, mourir ; elle fournit d'autre part aux diocèses un appoint de prêtres indispensable pour combler les vides.

Pour en savoir plus, voir l'article Révolution française.