station orbitale ou station spatiale

Installation spatiale non récupérable, placée en orbite pour servir d'habitat et de lieu de travail à des équipages effectuant les voyages aller et retour entre la Terre et la station.
1. Caractéristiques spécifiques de la vie dans une station spatiale


Lancées inhabitées (→ lanceur spatial), les stations spatiales sont conçues pour être habitées pendant des périodes prolongées, et disposent d'importants équipements scientifiques et techniques pluridisciplinaires. Elles comprennent des pièces d'amarrage pour les vaisseaux de transport et de ravitaillement, des sas pour le transfert des équipages (→ astronaute) et des équipements, des zones d'habitation et des zones de travail. Une station orbitale peut être lancée en une seule fois (comme les stations Saliout et Skylab) ou constituée de modules satellisés séparément et assemblés sur orbite (comme la station Mir, la Station spatiale internationale et la station spatiale chinoise).
Les stations spatiales ont besoin que des vaisseaux spatiaux (→ ATV) les visitent régulièrement pour les réapprovisionner. Parmi ces livraisons, on trouve principalement de nouveaux kits d’expérience, des pièces de rechange d’éléments usés ou hors service et du combustible qui permettent à la station de continuer à fonctionner et de poursuivre les différentes missions.

Par ailleurs, le système de survie de la station nécessite de l’oxygène, de l’eau et de la nourriture. Ces fournitures sont régulièrement expédiées de la Terre. Un homme a besoin en moyenne chaque jour de 630 litres d’oxygène, 2 litres d’eau et 500 grammes de nourriture lyophilisée. Eau, nourriture et oxygène quotidiens pèsent ensemble environ 3,4 kilogrammes. Le système de survie doit également assurer l’élimination du gaz carbonique et de l’eau que les membres d’équipage rejettent en respirant, ainsi que les déchets qu’ils produisent.
Il existe deux types de stations spatiales : les stations spatiales simples, à boucle ouverte, doivent recevoir régulièrement l’ensemble de la nourriture, de l’eau et de l’oxygène nécessaire à leur équipage et se débarrasser de tous les déchets ; les stations spatiales plus sophistiquées, à boucle fermée, peuvent recycler l’air et l’eau, ce qui limite les quantités de fournitures vitales à faire venir de la Terre.
Historique
2. Les origines

C’est le savant russe Konstantin Tsiolkovski qui, au tout début du xxe siècle, a le premier l’idée des stations spatiales. À l’origine, Tsiolkovski conçoit ces engins spatiaux dans le but de servir d’étape de ravitaillement pour d’autres vaisseaux spatiaux, d’où leur nom de « stations » spatiales. Il envisage même des modules d’habitation abrités dans un cylindre tournant sur lui-même pour induire une gravité artificielle (→ gravitation). Ce type de stations spatiales ne verra bien entendu pas le jour, mais l’idée de faire séjourner un équipage dans l’espace en orbite autour de la Terre est ainsi entrée dans le champ des rêves désirables.
3. Les stations spatiales
3.1 Les stations spatiales Saliout
Il faut tout de même attendre la seconde moitié du xxe siècle pour voir la première station spatiale placée en orbite terrestre. Il s’agit de la station Saliout, lancée par l’URSS en avril 1971. Saliout 1 est une station spatiale simple, avec un système de survie à boucle ouverte. C’est la première d’une série de neuf stations toutes basées sur la même structure mais de plus en plus sophistiquées. Les dernières stations Saliout sont équipées de moyens de production électrique, ainsi que de quelques systèmes de survie à boucle fermée. Saliout 6 et Saliout 7 ont également deux portes d’accostage, ce qui permet l’amarrage simultané d’un module habité transportant un équipage de remplacement et d’un véhicule ravitailleur automatique. Ces dernières stations permettent également de tester la possibilité d’assembler en orbite plusieurs modules lancés séparément pour former des stations spatiales plus grandes.
3.2 La station spatiale Skylab
En 1973, soit deux ans après le lancement de Saliout 1, les États-Unis parviennent à lancer leur station spatiale Skylab, dont la masse de 75 tonnes est presque le quadruple de celle de Saliout 1. A l’instar de la station russe, Skylab possède un système de survie à boucle ouverte et de larges panneaux solaires (→ énergie solaire) permettant de fournir l’électricité à bord. Avant de retomber dans l’atmosphère et de se désintégrer en 1979, Skylab accueille trois équipages entre 1973 et 1974, et fait figure de précurseur de la Station spatiale internationale.
3.3 La station spatiale Mir
L’expérience acquise par les Soviétiques au cours du programme Saliout est mise à profit pour la conception de la première station habitée en permanence : Mir. La station Mir est également la première station spatiale construite en plusieurs modules. Le module central de Mir est lancé en 1986. La construction complète de la station nécessite le lancement et l’amarrage au module central de cinq autres modules. Mir présente l’avantage de posséder plusieurs systèmes de survie à boucle fermée, ce qui permet d’assurer en permanence le séjour d’un équipage de trois spationautes. Les équipages de Mir rejoignent la station à bord de vaisseaux Soyouz, mais également à bord de la navette spatiale américaine après l’effondrement de l’URSS en 1991. De même, le ravitaillement de la station est assuré au départ par des vaisseaux Progress (version inhabitée de Soyouz), qui ne peuvent transporter qu’environ 3 tonnes de fournitures. Mais après la chute de l’URSS, les Russes ne parviennent plus à assurer seuls toutes les missions Progress nécessaires au ravitaillement de la station et vont naturellement faire appel aux Américains : c’est la navette spatiale américaine, dont la capacité est bien supérieure à celle des cargos Progress, qui prend le relais et devient le ravitailleur principal de Mir jusqu’à sa désintégration dans l’atmosphère en 2001. Ces années de collaboration fructueuse russo-américaine permettront la mise en œuvre de la Station spatiale internationale.
On notera que de nombreux spationautes français ont effectué des missions à bord de la station Mir : Claudie Haigneré, son mari Jean-Pierre Haigneré, Jean-Loup Chrétien, Michel Tognini et Léopold Eyharts.
3.4 La station spatiale internationale (ISS)

En 1984, la NASA (National Aeronautics and Space Administration) annonce un nouveau programme, conçu pour établir en orbite une station spatiale permanente, baptisée Freedom. Mais devant les coûts d’un tel projet, celui-ci est finalement combiné en 1994 avec le projet russe Mir 2 pour mettre au point une station spatiale internationale, ISS (International Space Station). En plus de la station principale, des modules laboratoires seront fournis par dix pays membres de l’Agence spatiale européenne (ESA) et le Japon. Autre partenaire de l’ISS, le Canada, fort de son expérience en robotique spatiale de pointe, va fournir un système d’entretien mobile (MSS), composé notamment d’un bras automatique manipulateur de 17 mètres de long (Canadarm2). La construction de l’ISS démarre à la fin de l’année 1998, avec les lancements du module russe Zarya, puis du module américain Unity. D’autres modules sont progressivement lancés et amarrés, notamment le premier module russe habitable Zvezda qui permet d’accueillir le premier équipage en 2000 (les cosmonautes russes Yuri Gidzneko et Sergueï Krikaliov, et l’astronaute américain William Sheperd). Si l’essentiel de la construction de l’ISS consiste en l’amarrage de modules, de nombreuses sorties extravéhiculaires sont aussi nécessaires, notamment pour le branchement des panneaux solaires géants qui, une fois déployés, mesurent une soixantaine de mètres d'envergure. Interrompue en 2003 à la suite de l'accident de la navette spatiale américaine Columbia, la construction de l’ISS reprend en 2006 et s’achève en 2011. Avec ses 13 modules pressurisés et ses différents composants non pressurisés, l’ISS forme un complexe orbitale de 108 mètres de longueur, 74 m de largeur, et pèse environ 419 tonnes. La station offre un volume habitable d’environ 400 mètres cubes permettant d’abriter en permanence sept spationautes depuis 2021.
L’ISS est utilisée essentiellement comme un laboratoire orbital (→ Columbus). Plus de 3000 expériences scientifiques ont déjà été menées dans les modules indépendants pressurisés de la station. De plus, l’équipage dispose de tout le nécessaire pour monter, à l’extérieur de la station, des expériences soumises directement aux conditions de l’espace.
Parmi les membres des équipages qui se sont succédés, le spationaute français Thomas Pesquet a particulièrement marqué l’histoire de l’ISS en effectuant plus d’une centaine d’expériences et plusieurs sorties extravéhiculaires lors de ses deux longs séjours à bord de la station (en 2016 - 2017, puis en 2021), soit près de 400 jours dans l’espace. De plus, en partageant son aventure spatiale sur les réseaux sociaux, il est devenu un formidable ambassadeur de l’exploration spatiale.
Mais la Station spatiale internationale est aussi devenue un lieu de villégiature très convoîté par de richissimes « touristes ». En effet, en 2022, l’entreprise SpaceX a envoyé les premiers civils à bord de l’ISS pour un séjour de huit jours (coût du voyage estimé à plusieurs dizaines de millions d’euros par personne). Si l’industrie du tourisme spatial n’en est qu’à ses prémices, la planète n’a guère à gagner à son développement, vu le coût écologique d’un vol spatial (→ pollution ; pollution de l'espace).
Dans ce contexte mitigé par des enjeux économiques d’un côté et des enjeux écologiques (liés au réchauffement climatique mondial) de l’autre, la NASA a toutefois étendu la durée de vie de l’ISS jusqu’en 2031. Peut-être aussi du fait de la concurrence de la station spatiale chinoise…
3.5 La station spatiale chinoise Tiangong
Après avoir envoyé son premier taïkonaute dans l’espace en 2003, posé un rover sur le face cachée de la Lune en 2019 et rapporté des échantillons de roches lunaires en 2020, la Chine poursuit son ambitieux programme spatial en lançant en avril 2021 le premier élément de sa station spatiale (CSS pour China Space Station), baptisée Tiangong (« Palais céleste »). Il s’agit d’une petite station spatiale d’environ 60 tonnes, de taille comparable à la station russe Mir, orbitant entre 350 km et 400 km d’altitude, et pouvant accueillir un équipage de trois personnes. Le premier équipage a séjourné trois mois à bord du module central (Tianhe) de la station, de juin 2021 à septembre 2021, effectuant des missions de maintenance et des sorties extravéhiculaires afin de préparer la station à l’assemblage des prochains modules. Un nouvel équipage a pris le relais d’octobre 2021 à avril 2022, et la construction de la station devrait s’achever à la fin de l’année 2022. Elle sera alors composée de trois modules, d'un cargo Tianzhou et d'un véhicule de transport d'équipage Shenzhou, amarrés en permanence.
Après l'achèvement de la construction en orbite de la station spatiale chinoise, celle-ci entamera sa phase d’expériences scientifiques portant sur de nombreux domaines (sciences de la vie dans l’espace, sciences physiques en microgravité, etc.). La durée de vie de la station est prévue pour un minimum de dix années. Avec sa propre station spatiale, la Chine affiche sa puissance technologique et économique aux yeux du monde, et prévoit même d’envoyer des humains sur la Lune vers 2030 et d’y ériger une base avec la Russie.





