exoplanète

Exoplanète HR 8799b
Exoplanète HR 8799b

Planète tournant autour d'une autre étoile que le Soleil. (Synonyme : planète extrasolaire.)

En 1995, deux astronomes suisses, Michel Mayor et Didier Queloz, annonçèrent la découverte d’une planète tournant autour d’une autre étoile que le Soleil, grâce à une série d’enregistrements effectués à l’aide d’un spectrographe installé à l’observatoire de Haute-Provence. La nouvelle fit grand bruit. Elle signifiait, en effet, que la science commençait à mettre en place les moyens de répondre à l’une des plus anciennes questions que se posent les Terriens : sommes-nous seuls dans l’Univers ? Les techniques mettent en œuvre des équipements de plus en plus sensibles, si bien qu'au milieu des années 2010, plus de 1 000 planètes extrasolaires ont été confirmées et plusieurs milliers sont des candidates potentielles. Leurs caractéristiques s’avèrent parfois très différentes de celles des planètes du Système solaire.

Comment détecter une exoplanète ?

Dans un système étoile-planète, ce sont en fait les deux astres qui tournent autour du centre de gravité du système. La planète demeure invisible, mais sa présence provoque un petit mouvement périodique de l'étoile, que l’on cherche à mettre en évidence. Le moyen le plus simple est de repérer au cours du temps la position de l’étoile sur le plan du ciel ; mais l’amplitude du mouvement est extrêmement faible et encore hors de portée de l’instrumentation actuelle, au moins depuis le sol.

Une autre méthode fait appel à la spectroscopie. Si l’on prend le spectre de l’étoile lorsque, sur son orbite autour du centre de gravité du système, elle se rapproche de l’observateur, ce spectre sera décalé par l’effet Doppler-Fizeau vers les longueurs d’onde plus courtes ; inversement, il sera décalé vers les longueurs d’onde plus grandes lorsque l’étoile s’éloigne de l’observateur. Là aussi, le décalage à mesurer est très petit ; cependant, en 1995, M. Mayor et D. Queloz ont pu atteindre une précision de mesure suffisante pour détecter, dans la constellation de Pégase, un objet en orbite autour de l’étoile de type solaire 51 Pegasi (et désigné pour cette raison sous l’appellation de 51 Pegasi b [en abrégé 51 Peg  b]). De plus, avec cette méthode, il est possible de déduire la masse de la planète (stricto sensu, une limite supérieure de cette masse ; notons également que si le système se présente de face, il n’y a plus d’effet Doppler-Fizeau et le système est alors indétectable). Ainsi, a–t–on pu établir que51 Peg b possède une masse égale à la moitié de celle de Jupiter. Mais la planète réservait aux astronomes une autre surprise : elle tourne autour de son étoile en 4,2 jours seulement, ce qui implique (en vertu des lois de Képler) qu’elle ne s'en trouve éloignée que de 7,5 millions de kilomètres, alors que Jupiter a une période de révolution de 11,9 ans, correspondant à une distance moyenne au Soleil de 778 millions de kilomètres.

Un troisième moyen pour mettre en évidence, dans un système étoile-planète, le petit mouvement périodique de l’étoile autour du centre de gravité du système, consiste à trouver une étoile qui soit une horloge extrêmement régulière et chercher si des décalages anormaux apparaissent au cours du temps. Une telle horloge céleste s’appelle un pulsar, mais ce peut être aussi une étoile binaire à éclipses ou bien même un système avec une planète déjà connue. C’est en 1992 que des objets ont été détectés pour la première fois autour d’un pulsar. Bien que la stricte définition d’une planète extrasolaire soit d’être en orbite autour d’une étoile « allumée » de la séquence principale du diagramme de Hertzsprung-Russell (ce que ne sont pas les pulsars), ces « planètes-pulsars » représentent néanmoins les corps en orbites régulières les moins massifs connus à ce jour hors du Système solaire, l’un d’entre eux ayant une masse juste un peu supérieure à celle de la Lune.

Ces différentes méthodes de détection sont indirectes, la planète demeurant invisible pour deux raisons principales. D’une part, les étoiles comparables au Soleil sont environ 10 milliards de fois plus brillantes en lumière visible que les planètes ; le contraste est donc colossal. D’autre part, la séparation angulaire entre une planète et son étoile est très faible ; par exemple, l’écart Soleil-Jupiter vu depuis 4 années lumière correspond à 4 secondes d’angle (1/900 de degré), l’écart Soleil-Terre à 100 années-lumière seulement (0,03 seconde d’angle). Pour des extraterrestres situés à 33 années-lumière du Soleil, photographier la Terre serait équivalent à vouloir photographier depuis Paris un ver luisant placé à 30 cm d’un phare à Marseille ! Cela reste hors de portée des moyens instrumentaux actuels, même des plus performants qui utilisent les techniques d’optique adaptative leur permettant d’atteindre des résolutions spatiales de l’ordre de 0,1 seconde d’angle. Cependant, le rapport des flux dans la lumière infrarouge n’est plus que d’environ 10 millions et, depuis 2004, il est possible, au moins avec des étoiles bien moins lumineuses que le Soleil, d’obtenir des images directes d’objets substellaires.

Autres techniques : lentille gravitationnelle et transit

Il existe par ailleurs deux principales méthodes photométriques de détection d’exoplanètes. La première fait appel à la relativité générale d’Einstein. Considérons un observateur regardant une étoile très lointaine (qui émet des rayons lumineux dans toutes les directions de l’espace). Supposons qu’entre les deux se trouve une autre étoile, même invisible, de forte masse. Elle va constituer ce qu'on appelle une microlentille gravitationnelle. Des rayons lumineux provenant de l'étoile source qui, en l'absence d'étoile intermédiaire, ne passeraient par l’observateur, sont déviés par la masse de l'étoile intermédiaire et parviennent à l’observateur. Au final, la présence de l'étoile intermédiaire provoque une amplification de la lumière de la source reçue par l'observateur et, lorsque dans leurs mouvements respectifs la source, l'étoile intermédiaire et l'observateur sont parfaitement alignés, ou presque, cette amplification est mesurable ; la première détection de cet effet a été réalisée en 1993.

Supposons maintenant qu’une planète soit en orbite autour de l'étoile jouant le rôle de lentille. Toujours invisible, cette planète, dans certaines configurations géométriques, pourra elle aussi dévier la lumière de la source et provoquer une seconde amplification, superposée à la première due à son étoile. Cette méthode a donné son premier résultat en 2004 ; depuis, elle a permis de détecter des exoplanètes de quelques masses terrestres.

L’autre méthode photométrique s’applique lorsque la Terre se trouve plus ou moins dans le plan orbital du système étoile-planète. Dans ce cas, quand la planète passe devant son étoile (phénomène appelé passage ou transit), elle occulte une fraction du disque stellaire, ce qui se traduit par une diminution de la luminosité de l’étoile. Par exemple, des extraterrestres cherchant à détecter des planètes autour du Soleil constateraient, lorsque Jupiter passe devant l’étoile, que le flux de lumière solaire diminue d’environ 1%, ce qui est facilement mesurable. Le premier transit d’une exoplanète a été détecté en 1999 avec un petit télescope au sol, puis longuement étudié avec le télescope spatial Hubble ; il s’agissait de la planète HD 209458 b, appelée maintenant Osiris. L’avantage de cette méthode est de donner accès à la taille de la planète. Osiris avait été détectée auparavant par la méthode des vitesses radiales. En combinant les valeurs calculées de sa masse et de son rayon, on a pu déterminer sa densité moyenne : celle-ci est de 0,34 ; elle prouve que l’on a bien à faire à une planète géante gazeuse, comme Jupiter.

Début octobre 2008, 313 planètes extrasolaires avaient été détectées, dans 269 systèmes planétaires différents, dont 31 comportant plus d’une planète (le record étant détenu par l’étoile 55 Cancri, autour de laquelle ont été détectées 5 planètes). Parmi ces 313 exoplanètes, la plupart (294) ont été découvertes par la méthode des vitesses radiales ; les autres ont été décelées par microlentille (8), par chronométrage (5) ou par imagerie directe en infrarouge (6). L’extrapolation des résultats actuels à l’ensemble de notre galaxie, qui compte plus de 100 milliards d’étoiles, suggère que le nombre de planètes extrasolaires ayant des périodes de révolution de 5 jours terrestres ou moins doit s’élever à plusieurs centaines de millions.

Une surprise : les « Jupiter chauds »

Les propriétés des systèmes planétaires extrasolaires sont extrêmement diverses. Par exemple, les exoplanètes parcourent des orbites parfois très allongées (l’excentricité atteint 0,93 dans un cas), contrairement aux planètes du Système solaire. Mais la plus grande surprise a sans doute été la découverte de « Jupiter chauds », grosses planètes gazeuses comparables à Jupiter mais ayant une période de révolution inférieure à 5 jours, donc très proches de leur étoile ; elles représentent à elles seules environ 20% des exoplanètes connues. On constate, par ailleurs, que les étoiles possédant des planètes ont, en moyenne, un contenu en métaux (ce terme désignant en astrophysique tous les éléments plus lourds que l’hydrogène et l’hélium) plus élevé que les étoiles dépourvues de planètes. Cette corrélation reste inexpliquée, mais semble liée au scénario de formation des planètes géantes généralement admis aujourd’hui, à savoir l’accrétion d’un cœur solide protoplanétaire jusqu’à une masse d’environ dix fois celle de la Terre, suivi par l’accrétion de gaz sur ce cœur. Cependant, ce scénario implique une formation des planètes loin de leur étoile. Or les Jupiter chauds circulent très près de leur étoile. La théorie est-elle ainsi mise à mal ? Il semble bien que non car un mécanisme de migration a été proposé (d’ailleurs avant la découverte des exoplanètes) : celui-ci permettrait à une planète géante en formation dans un disque circumstellaire dense en gaz et en poussières de se rapprocher de son étoile.

Dans le cas des planètes passant devant ou derrière leur étoile, il est possible de mesurer directement la quantité de photons émis par la planète elle-même, lorsque celle-ci passe derrière son étoile. À ce moment-là, le flux lumineux reçu provient de l’étoile seule et, en le soustrayant du flux capté en dehors de ce transit secondaire, on obtient l’émission thermique de la planète. Un tel résultat a pu être obtenu dans l’infrarouge, avec le télescope spatial Spitzer, pour quelques Jupiter chauds, et l’on en a déduit la température effective de ces planètes – supérieure à 1000 K – ainsi que leur albédo.

L'étude de l'atmosphère des exoplanètes

Les planètes qui passent devant leur étoile sont des cibles particulièrement intéressantes pour l'étude de leur environnement. En effet, le spectre de l’étoile enregistré pendant un transit de la planète doit révéler les signatures des constituants de l’atmosphère planétaire, pour autant que celle-ci existe. Osiris est la première planète extrasolaire autour de laquelle a été détéctée une atmosphère, en 2002, dans la lumière du sodium.Grâce au télescope spatial Hubble, on a détecté ensuite dans l'atmosphère de cette planète de l’hydrogène, du carbone et de l’oxygène. Les astronomes n'étaient pas au bout de leur surprise. L’absorption additionnelle due à l’atmosphère s’est avérée si importante pour les trois derniers éléments qu’il a fallu en conclure que la planète perd de la masse, car son atmosphère s’évapore, et non pas tranquillement, mais avec violence. D’autres molécules ont également été détectées dans des atmosphères d’exoplanètes, comme l’hydrogène moléculaire, les oxydes de titane et de vanadium, et probablement l’eau et le méthane.

Le phénomène d’évaporation de l'atmosphère peut influer sur l’évolution de la planète, s’il agit sur une échelle de temps inférieure à l’âge de l’étoile. Il semble que ce pourrait être le cas des exoplanètes ayant des périodes de révolution de moins de trois jours environ et des masses inférieures à la moitié de celle de Jupiter. À terme, l’atmosphère pourrait alors entièrement s’évaporer, en laissant à nu le cœur central rocheux de la planète, d’une masse représentant une dizaine de fois celle de la Terre, peut-être avec une surface de lave « active » similaire à celle du satellite Io autour de Jupiter. Mais cela reste à confirmer observationnellement.

Désormais, les spécialistes redoublent d'ardeur pour détecter des exoplanètes de masses de plus faibles, dans l’espoir d'identifier des objets comparables à la Terre. L’une des plus petites exoplanètes connues aujourd’hui – avec une masse représentant 5 fois celle de la Terre – , Gliese 581  c, découverte en 2007, dans la constellation de la Balance, appartient à un système triple et, pour la première fois, est située dans la zone habitable de son étoile, comme la Terre ou Mars. En 2014 et 2015, le satellite Kepler a détecté deux exoplanètes, Kepler 186 f et Kepler-452b, dont les profils sont très similaires à celui de la Terre. Un objectif ultérieur sera la mise en évidence sur des exoplanètes « telluriques » de signatures spectrales caractéristiques de mécanismes biologiques.

En 2013, la vraie couleur d'une exoplanète (HD 189733b) a pu être déterminée pour la première fois grâce au télescope Hubble. Située dans la constellation du Renard, à 63 années-lumière, cette planète relativement proche présente un bleu cobalt semblable aux teintes de la Terre. Mais la comparaison s'arrête ici, car cette planète déjà étudiée est une géante gazeuse de type « Jupiter chaud » dont les particules de silicates situées dans son atmosphère, composée en grande partie d'hydrogène, diffusent une lumière bleue.