ellipse

(bas latin ellipsis, du grec elleipsis, manque)

Dans certaines situations de communication ou dans certains énoncés, omission d'un ou de plusieurs éléments de la phrase, sans que celle-ci cesse d'être compréhensible. (Par exemple l'ellipse du verbe dans Combien ce bijou ?)

LINGUISTIQUE

On parle d'ellipse chaque fois qu'un élément linguistique (mot, syntagme, énoncé) est considéré comme tronqué par rapport à une forme dite « normale ». On définit la normalité de cette forme soit par rapport à des universaux, réels ou supposés, du langage (la structure sujet-prédicat étant posée comme universelle, il y a ellipse du sujet, en français, dans la forme de l'impératif sors), soit par rapport aux structures canoniques de telle ou telle grammaire (étant posé que toute phrase française contient un verbe, il y a ellipse du verbe dans Combien ce bijou ?), soit par rapport à un état de langue plus ancien (métro est alors une ellipse de [train] métro[politain]). On peut distinguer aussi les ellipses mémorielles, qui suppriment un élément sémantiquement conditionné, facilement restitué par la mémoire du sujet parlant (par ex. un [film] documentaire ; [allez] plus vite ! ; avoir un grain [de folie] ; il travaille [pendant] la nuit), et les ellipses discursives, qui consistent à éviter la répétition d'un ou de plusieurs mots ayant des fonctions analogues à peu d'intervalle dans la chaîneparlée (par ex. où allez-vous ? [Je vais] à Paris ; il n'est plus le même qu'[il était] hier). L'ellipse répond à la tendance d'économie qui régit les systèmes linguistiques. Les raccourcis les plus insolites que l'on peut rencontrer dans les petites annonces ou les télégrammes (par ex. R.V. 2 h. Gare Lyon) sont un exemple limite de son utilisation. Un très grand nombre de phénomènes linguistiques peuvent donc être recouverts par la notion d'ellipse. Celle-ci a été très utilisée par la description grammaticale dès l'Antiquité, mais surtout par les grammairiens qui se situent dans la lignée de Port-Royal, en particulier Dumarsais et Beauzée. Délaissée ou rejetée dans la première moitié du xxe s. (en particulier par F. Brunot), elle connaît un regain de faveur avec la grammaire transformationnelle, qui postule une structure de surface et une structure profonde : la notion d'ellipse est intégrée aux règles de transformation sous le nom d'effacement.

→ rhétorique, figure

LITTÉRATURE

L'ellipse se confond, dans les genres littéraires, avec des omissions qui portent sur la chaîne causale, la ligne temporelle ou la continuité thématique. Elle établit une manière de prédication entre les éléments ainsi juxtaposés et, outre ses effets de relief ou de suspense, fixe une métaphore thématique.