catachrèse

(latin catachresis, du grec katakhrêsis, abus)

Utilisation d'un mot au-delà de son acception propre. (Il s'agit d'un effet stylistique : parfums noirs [Rimbaud], ou d'une métaphore passée dans la langue courante : Les pieds d'une table.)

RHÉTORIQUE

Longtemps classée comme figure de style obligée (figure ne se substituant à aucun terme propre et dont l'emploi est forcé par l'absence de tout autre moyen de désignation), la catachrèse a été l'objet d'un débat dont l'enjeu touche l'ensemble de la rhétorique. P. Fontanier (les Figures du discours), à cause de cette obligation d'emploi (ex. : le marteau pour une partie de l'oreille interne, les ailes d'un moulin), refuse à la catachrèse le statut de vraie figure dont le champ serait la rhétorique et semble la ramener dans le domaine de la grammaire ; cependant, il signale que, formellement, les catachrèses correspondent aux trois grandes espèces de tropes : catachrèse de métonymie (« un cordon rouge » pour celui qui porte cette décoration ; « un Géricault » pour un tableau de Géricault) ; catachrèse de synecdoque (« or », « argent », pour monnaie d'or ou d'argent) ; catachrèse de métaphore (« Comme la main est le premier instrument de presque toutes nos actions physiques, la saisie par la main, la “mise en main”, s'est naturellement entendue de tout acte par lequel nous saisissons une chose pour un usage quelconque »). Quand la parenté originelle des termes catachrétiques n'est plus identifiée, on parle de figure lexicalisée, la catachrèse opérant alors par simple dénotation (« feuille » de papier). La subsistance d'un rapport de ressemblance oriente la catachrèse vers les procès rhétoriques/poétiques où elle peut avoir un rôle pragmatique (euphémisme, ironie) ; autrement, elle se tourne vers l'homonymie.

→ rhétorique, figure