Antoine Vitez

Acteur et metteur en scène de théâtre français (Paris 1930-Paris 1990).

Le pédagogue et l'auteur

Diplômé de russe de l'École nationale des langues orientales vivantes, A. Vitez est aussi l'élève de Tania Balachova. En 1962-1963, il est membre de l'équipe d'animation du Théâtre quotidien de Marseille. Il travaille ensuite (1964-1967) aux côtés de Jo Tréhard à la Maison de la culture de Caen. À partir de 1968, il est tour à tour ou simultanément responsable de l'animation du théâtre des Quartiers de Nanterre, codirecteur artistique du Théâtre national du palais de Chaillot, directeur du Théâtre des Quartiers d'Ivry et de l'Atelier théâtral d'Ivry, directeur du Théâtre national de Chaillot, puis administrateur général de la Comédie-Française en 1988.

Parallèlement à ses activités de comédien et d'animateur de troupes, Vitez est aussi pédagogue, traducteur, auteur. Ainsi, il a été directeur d'études à l'université du Théâtre des Nations, professeur à l'école de mime et de théâtre de Jacques Lecoq, professeur à l'école du Théâtre des Amandiers de Nanterre, puis au Conservatoire national supérieur d'art dramatique de Paris. Il a traduit des poèmes de B. Brecht, le Précepteur de J. M. R. Lenz, la Jeunesse d'Abaï de Moukhtar Aouezov, Ivanov de Tchekhov, le Don paisible de Cholokhov, « Poèmes et proses » de Maïakovski dans Maïakovski et le Théâtre russe d'avant-garde de A. M. Ripellino, le Vieux Somov et les Autres de Gorki, la Fuite de Mikhaïl Boulgakov, Électre, Poèmes de Yannis Ritsos. À partir de 1957, Vitez propose des écrits personnels : des pièces et scénarios pour le Théâtre des Marionnettes et une adaptation de la Paix d'Aristophane, jouée en 1962 au Théâtre quotidien de Marseille. En 1965, il fait publier une Histoire du Théâtre en URSS de 1917 à 1953. Collaborateur de la revue Théâtre populaire, Vitez a également donné des articles aux Lettres françaises. De 1960 à 1962, il a été le secrétaire documentaliste (pour l'Histoire parallèle de l'URSS et des États-Unis) de Louis Aragon, auquel il doit beaucoup, plus d'ailleurs dans ses partis pris esthétiques (réévaluation de l'acquis culturel) que dans son engagement.

Le metteur en scène

Ses premières mises en scène furent réalisées à Caen pour la Maison de la culture : Électre de Sophocle ; les Bains de Maïakovski (1967) ; le Procès d'Émile Henry, « tragédie-montage » d'A. Vitez ; pour la Comédie de Saint-Étienne, il présenta le Dragon d'E. Schwarz (1968). Pour le Théâtre des Amandiers de Nanterre : la Grande Enquête de François Félix Kulpa de Xavier Pommeret (1968), puis la Parade de Loula Anagnostaki (Festival de Nancy, 1969), le Précepteur de J. Lenz (Théâtre de l'Ouest parisien, 1970), la Mouette de Tchekhov (Carcassonne, 1970), Andromaque de Racine (1971), Électre de Sophocle avec des parenthèses empruntées à Yannis Ritsos (Théâtre des Amandiers de Nanterre, 1971), Faust de Goethe (Théâtre des Quartiers d'Ivry, 1972), Mère Courage de Brecht (1973), Vendredi ou la Vie sauvage d'après le roman de Michel Tournier (Théâtre national de Chaillot, 1973), m = M de Xavier Pommeret (festival d'Avignon, « Théâtre Ouvert », 1973), les Miracles (Théâtre national de Chaillot, 1974), la Jalousie du Barbouillé, deux versions différentes de la même farce de Molière (Théâtre des Quartiers d'Ivry dans le cadre de l'Atelier permanent de farce et de tragédie, 1974), le Pique-nique de Claretta de René Kalisky (1974), Phèdre de Racine (1975), Catherine, « théâtre-récit » d'après les Cloches de Bâle d'Aragon (1975), Partage de midi de Claudel (Comédie-Française, 1975), la Ballade de Mister Punch de Paul Éloi, d'après la tradition populaire anglaise, pièce pour marionnettes avec la compagnie Alain Recoing (Théâtre des Quartiers d'Ivry, 1976), Iphigénie-Hôtel de Michel Vinaver (1977), le Tartuffe de Molière (Théâtre de la Satire, Moscou, en langue russe), Griselidis de Charles Perrault, théâtre musical (festival d'Avignon, 1977), les Burgraves de V. Hugo (Théâtre de Gennevilliers, 1977), la Rencontre de Georges Pompidou avec Mao Zedong (1979), Zina de Farid Gazzah (1979), Dave au bord de la mer de R. Kalisky (Théâtre national de l'Odéon, 1979), les Noces de Figaro de Mozart (Florence, 1979), le Revizor de Gogol (Théâtre des Quartiers d'Ivry, 1980), Bérénice de Racine (1980), Faust de Goethe, Britannicus de Racine, Tombeau pour cinq cent mille soldats d'après le livre de Pierre Guyotat (Théâtre national de Chaillot, 1981), Hippolyte de Robert Garnier (salle Gémier, 1982), le Prince travesti de Marivaux (Chaillot, 1983), le Héron d'Aksionov (Chaillot, 1984).

Essayiste ou poète (la Tragédie, c'est l'histoire des larmes, 1976 ; l'Essai de solitude, 1981), Vitez témoigne de la même rigueur et de la même volonté de lucidité que dans son travail théâtral : exemplaire à ce propos reste sa mise en scène, en 1978, des quatre pièces de Molière, l'École des femmes, Dom Juan, Tartuffe et le Misanthrope, aboutissement d'un travail simultané sur chaque œuvre avec la même équipe de comédiens, chaque pièce devenant un élément d'une démonstration d'ensemble, de la mise au jour de la « méthode » de Molière, ses ruptures de rythme et sa surimpression continue de la farce et de la comédie.