David Robert Jones, dit David Bowie

Chanteur de rock, de glam-rock et de pop britannique (Brixton, banlieue de Londres, 1947-New York 2016).

David fonde son premier groupe, David Jones & The Lower Third en 1963. Pour éviter la confusion avec Davy Jones, chanteur-leader des Monkeys, groupe à succès américain, il prend le nom de Bowie, en hommage au compagnon de Davy Crockett, le colonel Bowie, du Fort Alamo. Dès lors, Bowie ne cessera de changer de peau : artiste multifacettes, il deviendra au cours de sa longue carrière, Major Tom, Ziggy Stardust, Aladdin Sane, Halloween Jack ou le Thin White Duke, précédant les modes et restant toujours à l'avant-garde.

Après un premier single pop, Can't Help Thinking About Me en 1965, il change temporairement de groupe pour The Buzz. Par la suite, les musiciens se succéderont pour l'accompagner dans son cabaret rock. Il compose des chansons naïves et précieuses en plein flower power (Rubber Band ou Little Bombardier en 1966–67). Mais sa rencontre avec le producteur Tony Visconti et le guitariste Mick Ronson, avec qui il fonde The Hype, va changer la donne. Il enregistre début 1969 l'album Space Oddity (inspiré du film 2001 : A Space Odyssey de Stanley Kubrick). Mais seul le single accroche le grand public. En 1970, la même équipe fait scandale avec la pochette, censurée à l'époque, de The Man Who Sold The World : travesti en robe, perruqué et maquillé, Bowie pose avec la nonchalance d'une Greta Garbo. Riffs saturés et langage surréaliste annoncent la période glam à venir. La chanson titre de l'album connaîtra un grand succès en 1994 lorsqu'elle sera reprise par Nirvana. En 1971, l'album Hunky Dory prolonge l'univers de science-fiction que le dandy affectionne tant (Life On Mars) et exprime sa fascination pour le New York d'Andy Warhol et de Lou Reed qu'il vient de rencontrer. Le single Changes rencontre un succès d'estime, mais reste un manifeste des théories « no future »... : du punk avant l'heure !

En 1972, l'album Ziggy Stardust fait l'effet d'une bombe. Entouré des Spiders From Mars, Bowie, complètement excentrique et androgyne, s'affirme en pape du glam rock et entraîne l'auditeur dans ses aventures intersidérales. Starman, Lady Stardust, Star, Ziggy Stardust racontent la quête d'une liberté absolue. Bowie multiplie les provocations, notamment sur sa sexualité (« Je suis homosexuel et je l'ai toujours été. », alors qu'il est père d'un petit Zowie depuis 1970). Ce « rock décadent » fera des émules (New York Dolls, Alice Cooper, Roxy Music, etc.) et Ziggy Stardust deviendra la bande originale de ces années permissives. À cette époque, Bowie produit également des albums de légendes pour Lou Reed (Transformer et son tube planétaire Walk on the Wild Side) et Iggy Pop (Raw Power).

Le personnage de Ziggy prenant le pas sur Bowie, il est symboliquement éliminé à la fin de la tournée sur la scène du Hammersmith Odeon de Londres devant les caméras de télévision. C'est pour mieux renaître sous les traits de Alladin Sane (jeu de mots sur « a lad insane » / « un type dérangé ») au printemps 1973. Décadence et provocation sont toujours au rendez-vous, les guitares incisives de Ronson sont complétées par le jeu élaboré du pianiste Mike Garson. Le single The Jean Genie est un hommage à Jean Genet et la reprise des Rolling Stones Let's Spend The Night Together survient alors que Bowie joue avec une rumeur sur sa liaison avec Mick Jagger. Les concerts sont de véritables messes, on parle de bowiemania dans le monde entier. La même année, Bowie publie un album de reprises Pin Ups en hommage au héros rock de sa jeunesse (Who, Kinks, Yarbirds le Pink Floyd de Syd Barrett, ainsi que Jacques Brel).

En 1974, il revient avec un nouveau personnage, Halloween Jack, pour Diamond Dogs, un album concept inspiré par le roman 1984 de George Orwell. La pochette étrange montrant la tête de Bowie sur un corps canin est encore une fois censurée (les organes génitaux du chien seront effacés). Dans cet univers apocalyptique, le single Rebel Rebel atteint le sommet des charts. La tournée américaine qui suit est immortalisée dans le double David Live dans lequel on entend pointer les influences soul des prochains albums.

De retour en Angleterre, il obtient le premier rôle, toujours spatial, pour le film The Man Who Fell To Earth (l'Homme qui venait d'ailleurs) de Nicolas Roeg qui sortira en 1976. Dans ce film, on voit apparaître les pochettes de Young American, album sorti en 1975 habité par la soul et le funk. Le single disco Fame (coécrit par Bowie, John Lennon et le guitariste Carlos Alomar) deviendra n°1 aux États-Unis. En 1976, un nouveau personnage, le Thin White Duke, accompagne la sortie de l'album Station To Station. Bowie enprunte toujours à la soul, mais innove avec des ambiances plus sombres et synthétiques. Complètement paranoïaque et dépendant à la cocaïne, l'artiste dérape dans ses provocations qui à cette époque font parfois appel à l'imagerie nazie.

Il se ressource, en partie, à Berlin où il enregistre entre 1977 et 1979 trois albums à l'ambiance et aux sons résolument nouveaux : Low, Heroes et Lodger. Pour l'aider dans ses expérimentations sonores, Bowie fait appel à l'arrangeur Brian Eno et aux guitaristes Robert Fripp (de King Crimson) et Carlos Alomar. La fameuse trilogie berlinoise sort en pleine vague punk et annonce en précurseur un nouveau courant, la new wave. Pour la mise commerciale, les singles Heroes et Boys Keep Swinging constituent des hits.

Au début des années 1980, l'élégant et efficace Scary Monsters comporte également sa livraison de tubes : Fashion et le superbe Ashes To Ashes, clipé par David Mallet, dans lequel Bowie avoue que son Major Tom des débuts était un junkie. L'artiste apparaît alors de plus en plus souvent à l'écran : Baal de Brecht pour la BBC, The Hunger (les Prédateurs) avec Catherine Deneuve, Christiane F. et surtout Furyo, sans doute le plus beau rôle qu'il ait jamais interprété.

En 1983, Bowie décroche le jackpot avec Let's Dance, single groovy produit par Nile Rodgers de Chic. Le succès est planétaire. Le look BCBG de Bowie est aux antipodes du décadent Ziggy, l'artiste tourne dans des films familiaux (Labyrinthe en 1986) et multiplie les collaborations mainstream (Queen, Tina Turner, Mick Jagger pour une reprise très commerciale de Dancing in the Street). Le public en redemande mais les critiques ne suivent pas. Tonight (1984), se révèle décevant et Never Let Me Down (1987) confirme que la machine Bowie tourne à vide.

Au début de l'année 1990, son nouveau groupe, Tin Machine, repart sur des bases plus rock et un côté indépendant (Bowie se veut l'égal des autres musiciens). Les albums Tin Machine I et Tin Machine II ont un succès limité est la formule est vite abandonnée. Bowie renoue avec la soul et le succès en retrouvant Nile Rodgers et Mick Ronson pour l'album Black Tie White Noise (1993). Il entame sa véritable renaissance artistique avec le fantasque 1 Outside, produit par Brian Eno avec le fidèle Carlos Alomar, un vertigineux flashback sur l'ensemble des styles abordés par Bowie au cours de sa carrière. Toujours à l'affût des nouvelles tendances, il s'approprie les rythmes de la jungle et de la techno dans l'album Earthling en 1997. Suivent les albums Hours (1999), qui illustre un jeu vidéo, Heathen (2002) et Reality (2003). Toujours adulé par de nombreuses générations de fans, Bowie donne quelques rares concerts dans des salles plus intimes, créant à chaque fois l'événement. Après presque dix ans d'absence, visiblement pour des raisons de santé, il sort début 2013 un nouvel album, The Next Day, et un single très nostalgique Where Are We Now?

David Bowie décède le 10 janvier 2016 à l'âge de 69 ans, des suites d'un cancer.