restauration

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Définition et généralités

Le sens et le contenu des mots conservation et restauration ont évolué au cours des âges et sont différents selon les pays.

La conservation est synonyme, dans les pays anglo-saxons, de soins préventifs (conditions climatiques...) ou curatifs mineurs (refixage d'amorces de soulèvements...) donnés à une œuvre afin de prolonger son existence et d'éviter autant que possible les interventions profondes, alors que la restauration a le sens d'une intervention fondamentale, chirurgicale et esthétique, reconstituant les parties détruites pour redonner son unité et sa lisibilité à l'œuvre et devenue indispensable à sa survie.

Dans les pays latins, le mot restauration a, en général, un sens plus vaste. Il recouvre l'ensemble des deux interventions, bien que, dans ces pays aussi, ces deux notions tendent de plus en plus à avoir leur sens propre.

Les soins curatifs mineurs sont en réalité l'unique moyen de soustraire l'œuvre d'art à l'arbitraire du nettoyage et de la retouche, forcément fondés sur un jugement esthétique subjectif, qui évolue dans le temps et qui a fait commettre tant d'erreurs dans le passé.

Mais si la conservation est seule satisfaisante pour préserver l'œuvre de la destruction en gardant l'" aspect historique de son passage dans le temps ", elle ne peut, dans le cas d'œuvres assez endommagées, redonner son pouvoir de message à ce qui n'est plus qu'un document. Une unité logique au moins " potentielle ", sinon " réelle ", de l'image est indispensable. Seule la restauration peut la lui rendre. Des îlots de peinture séparés par de nombreuses lacunes ne sont finalement plus chargés de pouvoir émotionnel. Inexposables dans les musées à tous les publics, conservés dans les réserves, ils deviennent des objets d'étude pour les spécialistes. Restaurer est l'aboutissement d'une étude " critique ". Celle-ci doit satisfaire, à la fois, à l'exigence esthétique, qui rend nécessaire de réparer les accidents, et à l'exigence historique, qui demande de laisser visibles les marques du temps. En cas de conflit entre les deux exigences, c'est l'esthétique qui doit l'emporter. Telle est la doctrine dite " critique " établie par Cesare Brandi à Rome après la Seconde Guerre mondiale.

La restauration d'un tableau est donc toujours un cas particulier à résoudre. Celui-ci doit l'être dans le respect des 3 règles de la restauration moderne : la lisibilité de l'œuvre, la stabilité et enfin la réversabilité des matériaux utilisés pour la retouche.

Toute restauration doit être une proposition de solution, proposition qui doit pouvoir être remise en question par les générations suivantes, sans danger pour la peinture originale. Cependant, il faut savoir que, si la réversibilité est facilement réalisable pour la retouche, elle ne peut l'être pour le traitement des vernis : l'allègement ou le dévernissage, opérations essentielles dans la vie de l'œuvre.

" Le présent doit sauver le passé pour le transmettre au futur. "

Historique

La conservation et la restauration sont aussi anciennes que l'existence de l'œuvre d'art, car le processus de dégradation est engagé dès la création. L'art, comme l'être humain, a une destinée périssable. Depuis l'Antiquité, il est fait état de restaurations : Pline l'Ancien et Vitruve relatent déjà des transports de fresques. Au iiie s. apr. J.-C., saint Cyprien critique la restauration...

Au Moyen Âge, les tableaux religieux étaient restaurés soit pour être conservés à la piété, soit pour être mis au goût du jour. Ce fut là leur sort le meilleur, car l'indifférence des xviie et xviiie s. pour les peintures du Moyen Âge dut en laisser détruire en grand nombre.

Les textes anciens nous apprennent qu'on confia à des artistes célèbres le soin de retoucher les œuvres de leurs prédécesseurs : ainsi, Lorenzo di Credi retoucha les œuvres de Paolo Ucello et celles de Fra Angelico...

À Gand, en 1550, Jan Van Scorel et Lancelot Blondel furent chargés de remettre en état le polyptyque de l'Agneau mystique de Van Eyck. Ils semblent y avoir apporté quelque élément inventif personnel.

Au temps de la Contre-Réforme, à la suite des défenses établies par le concile de Trente (1545-1563), les décorations religieuses furent repeintes et rendues plus conformes à ces prescriptions, dont le but était de mieux inciter à la dévotion. Les nudités, les allusions profanes, les représentations peu respectueuses du clergé durent être cachées. C'est ainsi que, en 1564, Daniele da Volterra fut chargé de recouvrir les nudités peintes par Michel-Ange dans le Jugement dernier de la chapelle Sixtine.

En 1576, le IVe concile provincial de Milan recommanda aux évêques de brûler les images pieuses très endommagées et de placer leurs cendres dans l'église pour éviter toute profanation, mais aussi de " rénover " celles qui étaient mieux conservées, afin de raffermir la dévotion. Les tableaux des églises durent alors être restaurés, c'est-à-dire qu'ils furent " repeints ".

À Rome, à la fin du xviie s., le célèbre peintre Carlo Maratta se consacra aussi à la restauration. Il restaura notamment les Chambres et les Loges de Raphaël, la galerie des Carrache au palais Farnèse. Il avait un grand respect des maîtres et, lorsque le pape lui demanda de couvrir le décolleté de la Vierge cousant de G. Reni, il utilisa des couleurs au pastel, aisées à retirer. C'est la première ébauche de la notion moderne de " réversibilité ".

C'est avec l'installation des collections de François Ier à Fontainebleau qu'apparaissent des mentions sur l'état de conservation et sur les restaurations de tableaux en France : interventions consistant à " laver ", " nettoyer ", " rafraîchir ". Primatice, qui eut un rôle important dans la décoration de Fontainebleau, fut aussi chargé de l'entretien des tableaux. C'est ainsi que, entre 1537 et 1540, il nettoya et retoucha le Saint Michel de Raphaël (Louvre). Certains pensent qu'il modifia le pied gauche. Ce serait bien là dans la conception d'une époque où les restaurations étaient confiées soit à des peintres d'autant plus importants que l'œuvre était célèbre, soit à d'habiles copistes capables d'imiter le " faire " du maître.

Il y eut au xviie s., à Fontainebleau, une série de peintres conservateurs-restaurateurs : Jacques d'Hoey, Jean Dubois le Vieux, son neveu, puis le fils de ce dernier, Jean Dubois le Jeune, enfin le peintre allemand Balthazar Kukler.

Les tableaux, considérés comme objets mobiliers, étaient souvent agrandis ou diminués, suivant la décoration dans laquelle ils devaient s'inscrire. En France, l'Inventaire des tableaux du roy, rédigé par Bailly en 1709 et 1710, en donne de nombreux exemples.

Dès la seconde moitié du xviie s., le " rentoilage ", intervention qui consiste à doubler la toile d'origine, est fréquent. Il permet ces changements de dimension des tableaux.

Au xviie s., Charles Le Brun, premier peintre du roi, eut la charge de " garde des tableaux " et, à ce titre, de l'entretien des collections royales installées au Louvre, entretien auquel il employait d'" habiles gens ", nous disent les textes. Ce sont des peintres comme Gabriel Blanchard, Pierre Mignard, Antoine Coypel, Joseph Parrocel, Louis de Boullogne ou d'autres, sans célébrité, qui, jusqu'au milieu du xviiie s., firent œuvre de restaurateurs. Mais c'est en 1699, avec la nomination de Antoine Paillet comme conservateur, chargé spécialement de l'entretien et de la restauration des collections royales de peinture, qu'une orientation nouvelle se dessina. À partir de cette date, une véritable doctrine s'élabora avec une remarquable continuité, grâce aux directeurs des Bâtiments du roi qui se sont succédé, pour aboutir à la structure intelligente et attentive établie par le comte d'Angiviller, de 1774 à la Révolution.

À Paillet succéda en 1701 François Stiemart, remplacé en 1740 par Joseph Godefroid, restaurateur qui avait déjà fait ses preuves chez les collectionneurs privés et chez le Régent. De 1741 à 1775, la veuve de Godefroid assura la restauration des tableaux de la Couronne avec l'aide de 2 peintres, François Louis Colins et Guillemart, puis celle de son fils, Joseph-Ferdinand Godefroid.

À la mort de la " veuve Godefroid ", en 1775, le comte d'Angiviller supprima la charge et constitua une équipe de rentoileurs et de restaurateurs. La profession fut alors organisée pour le service des tableaux de la Couronne ; il n'y eut plus de monopole, une sélection fut instituée. La restauration fut séparée du rentoilage. Le secret des opérations fut banni, tout procédé nouveau, étudié, les prix et les méthodes furent attentivement surveillés.

C'est dans ce contexte qu'apparaît, au milieu du siècle, en France, une grande nouveauté technique, la " transposition ", qui consiste à remplacer le support original d'une œuvre dont la peinture se détache de façon dangereuse. Il semble bien que l'invention de la transposition, datant du premier quart du xviiie s., soit venue d'Italie en passant par Bruxelles. Mais c'est à Paris que Robert Picault pratiqua cette opération, selon un procédé mystérieux dont on peut tenter une explication. Après quelques essais, qui firent l'émerveillement général, le directeur des Bâtiments lui confia en 1750 la transposition de la Charité d'Andrea del Sarto (Louvre). Le tableau fut exposé au Luxembourg avec, à côté, le support original de bois enlevé ; le roi lui-même s'y rendit. En 1751, le Saint Michel de Raphaël (Louvre) fut transposé. R. Picault fut alors comblé d'honneurs et reçut une pension importante du roi. Mais ses exigences financières, quelques échecs, son obstination jusqu'à la fin de ses jours à ne pas livrer son " secret " le firent mettre en concurrence avec la " veuve Godefroid ", qui pratiquait des tarifs moins élevés et ne gardait pas secret un procédé qu'elle devait avoir connu en Belgique, d'où elle était originaire. C'est ainsi que R. Picault ne fit plus partie de l'équipe constituée par le comte d'Angiviller.

Ce fut Jean-Louis Hacquin qui le remplaça. La qualité de son travail, sa prudence et ses prix raisonnables feront de lui le rentoileur officiel. Le comte d'Angiviller l'attacha à la direction des Bâtiments du roi avec un traitement fixe qu'il conserva jusqu'à sa mort, en 1783.

La seconde invention technique importante pour les panneaux peints fut, en 1770, la transformation du parquet fixe en parquet coulissant par le même Jean-Louis Hacquin, ébéniste de formation. Ainsi, en France, à la veille de la Révolution, la restauration en tant que discipline propre était créée avec l'essentiel de ses techniques de traitement des supports : le rentoilage, la transposition, le parquetage coulissant.

De 1780 à 1815 se situe une période d'activité importante, surtout au moment de l'afflux à Paris des tableaux de Belgique, de Hollande, d'Italie..., lors des conquêtes napoléoniennes. Les restaurateurs français acquérirent une grande expérience. Entre 1797 et 1802, J. B. P. Lebrun (mari du peintre célèbre Élisabeth Vigée) fut chargé, en tant que commissaire expert, de faire le constat d'état de tous les tableaux étrangers à leur arrivée à Paris, de surveiller leur restauration et de contrôler les prix des interventions. Il lutta pour que les procédés traditionnels de restauration soient améliorés et pour qu'un concours soit organisé, permettant la sélection des meilleurs spécialistes. Partisan des nettoyages prudents, il fut en quelque sorte l'initiateur de la méthode française.

En 1802, la transposition de bois sur toile de la Vierge de Foligno de Raphaël (Vatican) par François Toussaint Hacquin (fils de Jean-Louis Hacquin) fut un événement très important. L'intervention fut suivie et contrôlée par une commission dans laquelle figuraient 2 scientifiques, Berthollet et Guyton de Morveau : première ébauche de la collaboration réalisée dans les temps modernes entre scientifiques, historiens d'art et techniciens. Un rapport publié décrivait minutieusement l'intervention pratiquée. Pour la première fois, le public était informé de ces opérations, jusqu'alors entourées du secret.

Les restaurateurs parisiens étaient à cette époque Hoegstoel, Roeser, Michau...

Des restaurateurs isolés travaillaient un peu partout en Europe : les Riedel (Johan Gotfried et Johan Antona) à Dresde... En Italie, à Bologne, à Rome, à Florence, à Naples, il y eut des traditions locales de restauration. Mais c'est à Venise surtout que, à partir de 1770, le Laboratorio di San Giovanni e Paolo, atelier de restauration pour les peintures des collections publiques, fut organisé et dirigé par un peintre anglais, Peter Edwards. Dans ces ateliers, des spécialistes travaillaient selon une doctrine et des méthodes de prudence, de respect de l'œuvre et de réversibilité de la retouche, allant dans le sens des exigences modernes.

En France, au xixe s., la transposition fut pratiquée de façon courante et le parquetage, conçu avec habileté, se répandit, systématiquement, ces deux techniques étant utilisées par des rentoileurs ou des ébénistes.

Les restaurateurs, tous peintres, retouchaient les œuvres en artistes. Leurs connaissances en restauration étaient empiriques, et les " tours de main " réussis étaient jalousement gardés secrets. Leur retouche était " illusionniste ". Le tableau restauré devait avoir l'aspect d'une œuvre intacte.

C'est avec le xxe s. que la restauration s'est peu à peu détachée de l'empirisme pour entrer dans une ère plus " scientifique ". Afin de répondre à une prise de conscience de plus en plus aiguë de ces problèmes par les conservateurs de musées, l'Office international de coopération intellectuelle a mis à l'étude la restauration des peintures ; un rapport fut publié en 1939.

En 1948, lors de la première conférence générale de l'I. C. O. M., ou Conseil international des musées (groupement international fondé par l'Unesco), la commission pour le traitement des peintures, composée de spécialistes de 12 pays, s'est réunie à Londres, puis à Rome en 1949, à Paris en 1950, à Bruxelles en 1951, et elle continue à siéger régulièrement. C'est ainsi que, en 1950, les partisans du dévernissage et ceux de l'allégement du vernis s'affrontèrent, les Anglo-Saxons étant favorables aux interventions " totalitaires " et les Latins aux interventions " nuancées ", positions qui restent actuellement encore marquées.

En 1950 fut créé l'I. I. C., ou Institut international pour la conservation des objets d'art et d'histoire (groupement interprofessionnel), dont le siège est à Londres. Son objectif essentiel est de contribuer au développement scientifique et technique de l'étude de la conservation et de la restauration de ces objets.

En 1958, un certain nombre de pays, membres de l'Unesco, ont créé un Centre international pour la conservation et la restauration des biens culturels, dont le siège est à Rome. Ce centre est chargé de coordonner et de diffuser les méthodes de restauration des œuvres d'art, de favoriser la création de laboratoires spécialisés, notamment dans les pays en voie de développement.

Depuis quarante-cinq ans environ, une grande époque a débuté pour la restauration grâce à la prise de conscience des dangers qui menacent les biens culturels et de la place que ceux-ci tiennent dans notre civilisation. Partout dans le monde se sont créés des instituts chargés de sauver le patrimoine artistique ; ils sont soit nationaux, soit régionaux, soit rattachés à une université. À la vocation de restauration proprement dite, ils allient celle de recherche scientifique et celle d'enseignement. Parmi les principaux, citons : l'Institut Courtauld de Londres, créé en 1935, qui possède un département consacré à la technologie de la peinture, à la conservation et à la restauration de celle-ci, et une école de restauration ; l'Institut Doerner de Munich, fondé en 1938, qui s'attache particulièrement aux recherches sur la technique picturale ; l'Institut central de restauration de Rome, créé en 1940, qui a, par son enseignement ouvert aux candidats de tous pays, répandu sa doctrine et ses méthodes à travers le monde et dont les spécialistes de la restauration des fresques sont appelés en consultation sur tous les continents.

L'Institut royal du patrimoine artistique de Bruxelles, créé en 1962, réalise un ensemble unique " groupant tous les services nationaux dont l'activité est centrée sur l'examen, la conservation et la photographie du patrimoine artistique ainsi qu'un enseignement postgradué ".

Il existe également des instituts à Lisbonne, à Madrid, à Mexico, à Moscou, à New York, à Stuttgart, à Tokyo, à Ottawa... Dans les pays de l'Est, la restauration est souvent enseignée à l'université, ainsi en Pologne, à Varsovie, à Torun...

Chaque pays a sa formule personnelle d'institution, où conservation, restauration, recherche scientifique, enseignement ne sont pas toujours groupés, mais de nombreux musées possèdent leur atelier et leur laboratoire : ainsi dans les surintendances en Italie, aux musées du Caire, de New Delhi, au British Museum et à la National Gallery de Londres, au Musée national suisse de Zurich, aux Kunstmuseen de Düsseldorf, de Bâle, au Laboratoire central de l'Union soviétique à Moscou...

En France, il existe, au sein de la Direction des Musées de France, 2 services de restauration : l'un destiné au traitement des peintures des Musées nationaux qui a diversifié et étendu ses activités à d'autres techniques et à des musées extérieurs à la Direction des musées de France, l'autre relevant de l'Inspection des musées classés et contrôlés, destiné au traitement général des œuvres des musées de province. Ils sont installés dans la Petite Écurie du Roy à Versailles. L'un et l'autre travaillent en liaison constante avec le laboratoire de recherche des Musées de France.

Au sein des Monuments historiques, il a été créé, en 1970, à Champs-sur-Marne, un laboratoire de recherche et des ateliers de traitement et de restauration dans 5 secteurs : pierre, vitrail, bois, peinture murale et grottes ornées. Enfin, pour répondre à une attente déjà ancienne et pour combler une grave lacune en 1973, une maîtrise de Sciences et Techniques a été créée à l'Université de Paris formant des spécialistes et un Institut français de restauration des œuvres d'art en 1977 et ouvert en 1978 ; sa mission première est la formation de restaurateurs de haut niveau.

Technique

 I. Le support

Tout tableau de chevalet est constitué traditionnellement de 3 éléments essentiels : le support (bois, toile, papier, cuivre, ardoise...), la peinture (préparation et couches picturales), le vernis. Ces éléments, qui peuvent souffrir de vieillissements, de maladies, d'accidents ou d'altérations dues à l'intervention délibérée des hommes, doivent être soignés.

Traitant des supports, nous ne parlerons que du bois et de la toile, supports les plus courants.

Le bois

Le bois est, jusqu'à la Renaissance, le plus ancien support utilisé par les peintres de chevalet. C'est un matériau " vivant " jamais inerte, hygroscopique, qui " travaille ", se dilate à l'humidité et se contracte à la sécheresse. C'est ce qu'on appelle le " jeu " du bois. Disons, de manière courante, que ce " jeu " est important dans le sens perpendiculaire au fil du bois. Il est donc indispensable pour la bonne conservation des panneaux peints de les maintenir dans des conditions climatiques satisfaisantes. Les principales altérations des panneaux sont la courbure, les fentes et les attaques des insectes xylophages.

La courbure

Les panneaux acquièrent avec le temps une courbure due à la fois au " jeu " naturel des planches, à leur choix et au retrait différentiel de la face non peinte par dessiccation progressive. Dans le passé, et jusqu'au milieu du xxe s., on a utilisé des méthodes diverses de redressement : humidification et pression progressive, amincissement puis élargissement du revers par introduction de flipots (" sverzature ")... Tous ces procédés ont souvent provoqué des soulèvements de la couche picturale. Celle-ci, qui avait acquis son état d'équilibre, ne possédait plus la souplesse nécessaire pour suivre les traumatismes imposés au bois. Bien souvent, les panneaux redressés étaient transposés de bois sur toile. On pensait ainsi résoudre tous les problèmes dus au support de bois. Cette intervention irréversible est de nos jours considérée comme une mutilation de l'œuvre, car elle enlève à celle-ci un élément original ; elle n'est plus pratiquée dans les musées de France, et la courbure acquise au cours du temps est conservée comme élément de son histoire.

Les fentes

Elles peuvent être dues à un choix malheureux des planches, à des zones noueuses ou à des systèmes de maintien au dos du panneau bloquant le " jeu " normal du bois. Bien des panneaux, jugés trop fragiles pour être laissés sans maintien au revers, ont, en effet, été pourvus de renforts fixes (traverses, parquets vissés, collés, cloués...) dès l'origine ou postérieurement. Comme ils ne permettent pas le " jeu " du bois, des fentes se sont produites.

Autrefois, ces fentes étaient réparées de façon plus efficace par collage de bandes de tissu ou collage de taquets de bois en surépaisseur ou incrustations en forme de " papillons ". De nos jours, les fentes sont traitées par l'incrustation d'éléments de bois de fil en forme triangulaire, collés dans des incisions en V.

L'invention du " parquet coulissant " en 1770 par l'ébéniste Jean-Louis Hacquin pour la Kermesse de Rubens (Louvre) fut une considérable amélioration en permettant à des lattes transversales mobiles de coulisser dans des lattes verticales collées dans le sens du fil du bois. Le choix de ce type de parquet a permis une bonne conservation des panneaux, mais a souvent eu aussi des conséquences néfastes, telles que des cassures lorsque les traverses mobiles se sont bloquées.

Ces parquets traditionnels sont en général abandonnés et remplacés par des systèmes ingénieux et divers, suivant les pays, mais la tendance générale est d'alléger les systèmes de maintien au dos des panneaux en diminuant les surfaces de collage et de frottement.

Dans les ateliers des Musées de France, les parquets sont remplacés soit par des traverses métalliques coulissant sur des galets en matière plastique (véritables roulements à billes) et maintenues par des taquets de bois, soit par des châssis-cadres en bois stabilisé...

Pour des panneaux minces et de petites dimensions, un maintien peut être fourni par une simple plaque d'Altuglas transparente, elle-même tenue sur tout le pourtour par une cornière métallique. Cette plaque peut même être préformée artisanalement pour épouser une éventuelle courbure du panneau. Solution très satisfaisante puisqu'elle évite tout collage sur le tableau lui-même et laisse le dos de celui-ci totalement visible.

Les insectes xylophages

La présence d'insectes (" vrillettes ", " lyctus ", " capricorne "...) se décèle par des trous d'où s'échappe une poudre de bois : la " vermoulure " bien connue.

Le panneau doit donc être désinfecté, puis, en général, consolidé. Il est d'abord badigeonné ou injecté de produits volatils toxiques ou passé en " chambre à gaz " sous vide partiel. La consolidation, dans le cas de vermoulure, fait appel aux résines durcissantes, appliquées aussi par badigeonnage.

Une technique relativement récente est l'utilisation des rayons gamma comme agent de polymérisation d'une résine durcissante. Elle est pratiquée pour les bois non peints ou dorés, mais n'est pas applicable actuellement aux panneaux peints.

Lorsque le bois est trop désagrégé, il faut amincir le panneau jusqu'au bois encore intact et le coller ensuite sur un nouveau support : panneau de bois classique dans le passé (opération dite " trésaille "), support inerte (latté, aggloméré, carton alvéolé...) de nos jours.

Dans le passé, lorsqu'il n'existait plus assez de bois utilisable, on " transposait ", c'est-à-dire qu'on supprimait entièrement le bois et on collait la peinture sur un nouveau support.

De nos jours, on ne " transpose " plus un panneau, on s'efforce de conserver un peu de bois, de le rigidifier et de coller l'ensemble sur un nouveau support inerte.

La toile

Depuis la Renaissance, la toile est le support le plus fréquemment utilisé en Occident par les peintres de chevalet. Le textile (en général lin ou chanvre) est un matériau hygroscopique, qui se détend et se retend suivant les conditions hygrométriques. Cette capacité de réaction diminue avec le temps, ce qui fait dire qu'une toile est plus ou moins " nerveuse ". Ces écarts hygrométriques sont à éviter, car ils causent une " fatigue " au textile ainsi qu'à la peinture, qui, avec le temps, perd de sa souplesse et de son aptitude à suivre ces mouvements. Des cassures de la préparation se forment alors et produisent des craquelures dites " d'âge ", amorces de soulèvements possibles futurs.

Les principales altérations de toile sont la petite déchirure, la grande déchirure (quelle qu'en soit la forme) et l'affaiblissement du textile.

La petite déchirure

Elle se répare soit par un raccordement des fils si cela est possible, soit, le plus souvent, par la pose au revers d'une pièce (morceau de gaze ou de demi-toile effilée) collée à la cire (à froid). Autrefois, on a collé des pièces à la céruse ou à la colle de peau, dont, à la longue, la marque transparaissait côté peinture.

La grande déchirure et l'affaiblissement du textile

Ils correspondent à un vieillissement pouvant être dû à de mauvaises conditions de conservation, des bords déchiquetés, des marques du châssis et des coutures devenues saillantes, visibles côté peinture. Ils se réparent en général par un rentoilage. Cette intervention consiste à coller une toile neuve au dos de la toile originale.

Il existe trois principales méthodes de rentoilage (à la colle, à la cire-résine et aux résines synthétiques), qui sont utilisées avec de nombreuses variantes suivant le cas à traiter. La France a une grande tradition artisanale du rentoilage à la colle, élaboré au xviie s. Cette technique a donné d'excellents résultats ; elle exige une grande expérience et des praticiens très habiles.

Le rentoilage à la cire, dite méthode " hollandaise ", doit remonter au xviiie s. ; il semble né de la recherche d'un moyen de préserver les œuvres de l'humidité.

La cire d'abeille et la résine naturelle ont été remplacées dans de nombreux ateliers par de la cire et de la résine synthétique. Le rentoilage aux résines synthétiques vinyliques ou acryliques, imaginé vers 1930, paraît bien convenir aux tableaux modernes.

Chacune de ces méthodes a ses adeptes convaincus, mais tout esprit " partisan " doit être banni. Chaque tableau est un cas d'espèce à traiter comme tel.

En dehors du rentoilage, la seconde intervention importante que peut subir la toile d'un tableau est la transposition. Cette intervention consiste à enlever le textile original et à le remplacer par un nouveau support. Le remplacement du support n'est pas une fin en soi, mais le moyen d'atteindre la préparation lorsque, désagrégée, elle n'adhère plus au support et entraîne la couche picturale dans un soulèvement généralisé. L'enduit d'origine est alors soit supprimé, soit régénéré, suivant son état, à l'aide d'une nouvelle préparation qui redonne à l'ensemble de la couche picturale cohésion et souplesse.

Cette intervention, née en Italie dans le premier quart du xviie s., a été pratiquée en France de façon officielle au milieu de ce même siècle, comme nous l'avons dit plus haut. Appelée aussi " transfert " dans le passé, elle a été pratiquée en France de façon constante entre le milieu du xviiie s. et le premier quart du xxe s. Les rentoileurs français acquirent une réputation qui s'étendit à travers l'Europe. Pratiquée de façon même abusive dans le passé, aujourd'hui cette intervention ne l'est plus que dans de très rares cas extrêmes où aucune autre possibilité ne permet de sauver la peinture. Supprimer une toile originale est une opération contraire à la règle de la " réversibilité ".

II. La peinture

La peinture qui recouvre le support est constituée par la préparation (encollage, puis enduit) et la pellicule picturale elle-même.

L'enduit

Les maladies principales de l'enduit sont le soulèvement localisé, le soulévement généralisé et la pulvérulence. Lorsque le soulèvement localisé, dû surtout à l'humidité ou à des changements hygrométriques, est limité, il est possible de le conjurer par des refixages. Les 3 procédés classique sont les injections de colle de peau, l'imprégnation localisée d'un mélange cire-résine chaude, l'imprégnation d'adhésifs synthétiques.

Les remèdes au soulèvement généralisé et à la pulvérulence peuvent être, suivant les cas : le refixage suivi d'un rentoilage ; la transposition qu'on s'efforce de ne plus pratiquer ; la demi-transposition, qui est un rentoilage avec usure de la toile, afin de bien faire pénétrer un adhésif par le revers pour obtenir un refixage efficace ; l'imprégnation de cire-résine, qui conserve le support original mais introduit des éléments hétérogènes à l'œuvre. Les produits et les méthodes varient suivant les ateliers (fer chaud, table chauffante, enveloppe souple sous vide d'air...).

La pellicule picturale

Les maladies de la pellicule picturale sont le plus souvent liées à celles de la " préparation " du support : soulèvements localisés avec cloques ou chutes d'écailles, soulévement généralisé et lacunes ou manques.

Une maladie grave, propre à cette pellicule picturale, est le dédoublement entre elles de deux couches colorées superposées (clivage). Un remède efficace est l'imprégnation généralisée avec un mélange de cire et de résine.

Ces interventions sont suivies de la restauration esthétique, qui consiste à reconstituer les parties détruites par deux types d'opérations successives : le masticage, destiné à combler les manques, qui est exécuté à base de colle animale, de cire ou d'adhésif synthétique ; la retouche, qui doit redonner sa continuité chromatique à l'œuvre.

La conception esthétique de la retouche a peu varié jusqu'à la dernière guerre mondiale ; le restaurateur s'efforçait de rendre celle-ci invisible, de la raccorder parfaitement avec les parties originales. Et, pour ce faire, il débordait largement l'accident en recouvrant des zones de peinture originale. Sa restauration devait être " illusionniste ".

On peut résumer les positions actuelles, qui ont fait l'objet de discussions esthétiques, critiques, historiques, en disant que, d'une façon générale, un respect beaucoup plus grand est porté à l'œuvre.

Certains refusent toute retouche, au nom de l'authenticité du document historique, qui doit être conservé tel que le temps l'a transmis, en prenant simplement des mesures de conservation.

D'autres préfèrent (c'est une tendance qui s'est développée de plus en plus pour les peintures antérieures à la Renaissance) soit la simple pose d'un ton neutre sur les lacunes, soit la retouche discernable de près, mais non visible de loin, au nom de la reconstitution de l'" unité potentielle " de l'œuvre selon la formule de Cesare Brandi. C'est du reste en Italie qu'a été élaborée la méthode dite du " tratteggio ", qui est en réalité l'adaptation à la retouche de la technique même des primitifs et qui consiste en traits parallèles verticaux de tons purs juxtaposés, posés sur un mastic blanc ; la réintégration colorée se fait par synthèse optique. D'autres, enfin, toujours partisans de la restauration " illusionniste ", ou " imitative ", la limitent strictement à la surface de l'accident au nom de la reconstitution de l'" unité réelle " de l'œuvre. La retouche devient alors du repiquage au petit point ou une pose de glacis lorsqu'il s'agit de restaurer une zone " épidermée ". Il n'est pas possible d'établir une règle absolue en restauration ; tout est cas d'espèce. Si, sur certains primitifs, la présence de lacunes non restaurées ne trouble pas le plaisir esthétique que l'œuvre procure, elle n'est pas tolérable sur des œuvres des xviie et xviiie s. La lisibilité soit de l'œuvre, soit de la retouche est une règle moderne.

Le choix des matériaux utilisés pour les retouches a lui aussi beaucoup évolué avec le temps. La recherche de la stabilité est une exigence moderne. Citons, à titre d'exemple, les produits le plus fréquemment utilisés : la tempera, émulsion soit d'œuf entier, soit de blanc, soit de jaune ; l'aquarelle avec glacis final au vernis ; la gouache, les couleurs en poudre mêlées à une résine synthétique ; les couleurs vyniliques et acryliques... Les retouches faites dans le passé avec des liants huileux qui jaunissent ont dû être renouvelés.

Les produits synthétiques sont maintenant de plus en plus répandus, mais on doit les manier avec prudence, car seul le recul du temps permet de porter un jugement exact sur leurs qualités ou leurs défauts.

Ce choix des matériaux est un grave problème, qui préoccupe tout atelier de restauration, sans qu'une solution idéale ait été trouvée.

En dehors des soins donnés à ces différentes maladies de la pellicule picturale, il est d'autres interventions dont elle peut avoir besoin. En effet, il faut bien souvent supprimer ce que les restaurateurs antérieurs ont pu ajouter au cours du temps. C'est-à-dire qu'il faut enlever les " repeints ", dits aussi " surpeints ", lorsqu'ils se sont altérés ou lorsqu'ils ont débordé sur la peinture originale ; ce qui suppose une intervention préalable sur le vernis, dont nous parlerons plus loin.

Il y a aussi les usures ponctuelles, qu'il faut restaurer par " repiquage ".

Les craquelures dites " d'âge " ne peuvent pas être considérées comme une détérioration, mais sont le phénomène normal d'évolution d'une peinture avec le temps. Elles sont la marque de celui-ci. Elles intéressent à la fois le support, la préparation et la pellicule picturale.

À côté de ces craquelures normales, il en existe toute une série d'autres : craquelures " prématurées ", gerçures, faïençage, qui intéressent avant la pellicule picturale et le vernis. Elles sont dues en général à la technique propre du peintre, qui n'a pas toujours respecté les règles essentielles du métier.

La doctrine d'un restaurateur contemporain digne de ce nom doit être d'enlever le plus possible des apports du temps qui dénaturent une œuvre et d'en ajouter lui-même le moins possible. Pour ce faire, il doit utiliser des matériaux stables et réversibles.

III. Le vernis

Le vernis final, qui a un double rôle (rendre aux couleurs leur vigueur véritable et protéger la peinture des impuretés de l'air), peut lui aussi souffrir de maladies dues au temps ou aux hommes.

Ainsi le vernis peut être chanci : le tableau semble se couvrir d'une couche opaque blanchâtre qui l'altère ; l'humidité est le plus souvent la raison de ce phénomène ; une régénération permet de redissoudre la résine du vernis devenu solide et ainsi de rendre la transparence perdue.

Le vernis peut être bleuté : la surface du tableau bleuit par suite d'un brusque écart des conditions climatiques ; un simple frottement avec un tissu moelleux suffit à faire disparaître ce bleuissement.

Le vernis peut être pulvérulent ou fariné : il se réduit en poudre, c'est le résultat de sa désagrégation complète. Sa suppression est le seul remède.

Il peut être jauni : le jaunissement du vernis est une évolution normale due au processus de séchage de l'huile siccative, mais qui peut être accentée par l'adjonction de produits divers (bitume, stil de grain ou de couleurs transparentes à l'huile) et par les couches superposées dues à des revernissages fréquents, qui ont donné aux tableaux ce " ton musée " très en vogue au xixe s. Il permet aussi de dissimuler les restaurations sous-jacentes, mais il dénature les œuvres en transformant les valeurs recherchées par le peintre. Les vernis doivent être amincis ou supprimés. Deux doctrines existent au sujet de cette intervention sur le vernis, dont les partisans se sont affrontés avec vigueur surtout autour des années 1950 ; ce qui a été appelé " la querelle des vernis ".

Le dévernissage est une méthode dont le principe de base repose sur le fait que le tableau peut être retrouvé tel qu'il est sorti des mains du peintre, ce qui est illusoire étant donné que rien ne peut nous faire connaître cet état avec certitude et que le temps opère de façon inéluctable.

Les dangers du dévernissage intégral, opération irréversible, sont grands. Le tableau arrive à la restauration recouvert de cette " patine " qui a fait l'objet de bien des controverses et dont la définition a varié au cours du temps. On peut essayer de résumer celle-ci par cette formule de Cesare Brandi : " La patine est le passage du temps sur la peinture. "

La patine harmonise une œuvre d'art dont les composantes colorées ont évolué de façon différente et parfois discordante. C'est ainsi que les bruns foncent avec le temps, alors que les tons clairs chargés en blanc s'altèrent beaucoup moins. La patine redonne une unité à l'œuvre ; or, l'importance du vernis dans la patine est considérable. Un dévernissage total entraîne la suppression de cette dernière ; il peut aussi faire disparaître sur certains tableaux le glacis final posé par le peintre là où il a voulu faire vibrer un dessous. L'interpénétration est parfois si grande entre le glacis fragile (fait de couleurs légères, très riches en liant) et le vernis que le dévernissage risque de faire disparaître cet élément indispensable voulu par l'artiste et de mettre brutalement à nu la couche picturale. Parfois, même, certains peintres ont repris leur tableau sur le vernis. Il y a enfin le danger technique de mettre le solvant en contact avec la couche picturale, dont le liant risquerait de s'appauvrir phénomène dit de " lixiviation ".

L'allègement du vernis est une autre méthode, qui a pour but d'amincir les couches de vernis posées au cours des âges sur un tableau sans atteindre la pellicule picturale.

Le restaurateur peut réaliser cette opération par étapes successives, suivant l'épaisseur et la qualité du vernis ; c'est cette méthode que s'efforcent de pratiquer les ateliers des Musées de France.

Cette opération prudente a le grand mérite de pouvoir un jour être poursuivie, si on la juge insuffisante, sans dommage pour la couche picturale ; mais elle est nettement plus difficile à exécuter qu'un dévernissage total.

Si le tableau a des repeints peu nombreux, dissimulés sous le vernis, les dévernissages localisés permettront de les atteindre, puis une harmonisation sera obtenue en véhiculant du vernis des zones voisines sur ces ouvertures. Il demeure évident que, si la couche picturale est entièrement couverte de restaurations sous le vernis, l'allègement n'est pas suffisant, et seul le dévernissage permettra de les atteindre.

En conclusion, la phrase suivante de P. Philippot résume bien l'alternative : " La mise à nu radicale de la couche picturale originale souligne presque toujours la matérialité au détriment de l'image et, en conférant un aspect neuf à un objet ancien, elle crée au sein de celui-ci un désaccord qui est une sorte de falsification ; elle accentue la matière au détriment de la forme et dénonce vis-à-vis de l'œuvre d'art la prédominance de l'intérêt hygiénique pour l'objet sur l'intérêt esthétique de l'image. "

Des produits nombreux ont été utilisés au cours des âges pour ce " nettoyage des peintures ". Des recettes remontant au xviie s. sont connues par de nombreux manuels.

Les restaurateurs disposent actuellement d'un très grand nombre de produits, dont l'efficacité est plus précise et le danger moindre pour les œuvres. De plus, des moyens d'investigation précieux sont à la disposition du restaurateur pour la connaissance physique de l'œuvre : loupes, microscopes binoculaires, lampes à éclairage tangentiel...

À ces moyens d'approche directe s'ajoutent la documentation scientifique (laboratoires), qui est une aide importante, ainsi que la documentation historique, lorsqu'on a la chance de la découvrir dans les archives. Mais l'essentiel demeure la qualité du restaurateur, sa connaissance de la peinture, son tact, sa prudence et aussi son sens moral en face de l'œuvre d'art.

" Empirique pendant des siècles, renouvelé au point qu'il ne reste rien des méthodes anciennes, l'art de la restauration des peintures, mal connu du public et des peintres eux-mêmes, excite cependant la curiosité de tous, voire les passions les plus contradictoires. " (Goulinat.) Cette phrase, écrite il y a plus de quarante ans, est toujours actuelle.