mezzotinte

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Le mezzotinte (autref. écrit mezzotinto), ou manière noire, est un procédé de gravure en creux. La planche de cuivre est dépolie à l'aide d'un berceau ; la surface légèrement rugueuse retient l'encre ; l'épreuve est alors entièrement noire. Le graveur polit ensuite plus ou moins certaines parties au brunissoir, ce qui lui permet d'obtenir toute la gamme des valeurs du noir au blanc. Parfois, le trait est gravé à l'eau-forte ou au burin avant l'application du mezzotinte, ou même après.

Ce procédé fut inventé (v. 1642) par l'Allemand Ludwig von Siegen, mais ni lui ni le prince Rupert ne semblent s'être servis du berceau. Ceux-ci travaillaient avec une roulette allant du blanc au noir et utilisaient peu le brunissoir. C'est à Abraham Blootling qu'on attribue l'invention de la méthode définitive, que sans doute le Français Wallerant Vaillant pratiquait à la même époque. Blootling se rendit en Angleterre en 1672-73 et y introduisit la technique nouvelle. C'est là que celle-ci connut son développement le plus brillant, d'où son nom en France de manière anglaise. Tous les portraitistes célèbres en Angleterre à partir de Peter Lely furent abondamment gravés par les mezzotintistes. Sous l'influence de Reynolds, James McArdell puis d'autres graveurs produisirent un grand nombre de planches admirables. Richard Earlom reproduisit le célèbre Liber veritatis de Claude Lorrain, en mezzotinte sur une préparation à l'eau-forte (1777).

Par esprit d'émulation, Turner entreprit son Liber studiorum, ouvrage inachevé, dont les planches parurent de 1807 à 1819. L'artiste gravait en général lui-même l'eau-forte et achevait certaines planches au mezzotinte, mais le plus souvent il confiait ce travail à des graveurs professionnels. Il faut enfin mentionner les admirables mezzotintes de David Lucas, exécutés sous la direction de Constable, qui corrigeait les épreuves des planches en progrès jusqu'à quinze et vingt fois. La première série de paysages, publiée en 1833, constitue le meilleur de cette collaboration. Le mezzotinte a périclité après la disparition de Lucas. Quelques graveurs modernes l'ont ressuscité au xxe s.