Messénie

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

Région de Grèce située au sud-ouest du Péloponnèse.

Pendant la période mycénienne, Pylos est la ville la plus importante de la Messénie. Les Doriens s'y établissent au xie siècle av. J.-C. La région est marquée par les trois guerres messéniennes contre Sparte.

Première guerre

La première guerre dure vingt ans (743-723 av. J.-C.). Menés par Aristodème, mais ne pouvant faire face à l'ardeur guerrière des Spartiates, les Messéniens se retirent sur le mont Ithome, qui devient le centre de la résistance. L'oracle consulté enjoint de sacrifier une jeune vierge du sang d'Épytos, tirée au sort, et de l'immoler aux divinités infernales. Le sort désigne la fille de Lyciscos. Mais ce dernier s'enfuit avec elle à Sparte. Aristodème désigne alors sa propre fille ; son fiancé s'y oppose, arguant du fait que lui seul, et non plus son père, peut disposer d'elle ; il ajoute qu'elle est épouse et bientôt mère, et ne correspond donc pas aux recommandations de l'oracle. Furieux, Aristodème immole lui-même sa fille. Et dans un premier temps, la guerre est suspendue. Mais le meurtrier fait un songe funeste, où sa fille lui annonce sa fin prochaine. Aristodème se suicide sur son tombeau. Après sa mort, la forteresse finit par céder et les Messéniens doivent payer à Sparte la moitié de leur revenu annuel.

Deuxième guerre

La deuxième guerre se situe en 685-670 av. J.-C. Révoltés, humiliés par la manière dont ils sont traités par les Spartiates, poussés à la revanche par ceux qui ont préféré quitter la région plutôt que de vivre en esclaves, les Messéniens se révoltent, emmenés par Aristomène. Il obtient une si belle victoire à Stényclaros que les Spartiates, découragés, demandent la paix. Toutefois, surpris par leur défaite, ils consultent l'oracle de Delphes. À la suite de quoi, ils demandent à Athènes de leur envoyer un général. Mais Athènes, méfiante à l'égard l'hégémonie de Sparte ou saisissant l'occasion de se moquer d'elle, envoie Tyrtée, un poète – un maître d'école, dit-on encore – boiteux. Sans doute par défi, Tyrtée réveille le sentiment patriotique des soldats grâce à ses chants enflammés ; il évoque les gloires passées des ancêtres, tout en rétablissant la discipline.

Le fait est que les Spartiates obtiennent une victoire sur les Messéniens qui se retirent sur le mont Ira, forteresse réputée imprenable. Quelque temps plus tard, capturé lors d'une sortie avec quelques soldats, Aristomène est précipité dans le gouffre de Céada, près de Sparte. La légende dit que le héros messénien est sauvé par un aigle dont les ailes amortissent sa chute ; ayant ensuite aperçu un renard qui se repaissait du cadavre de ses compagnons, Aristomène déduit qu'il existe une issue. Ira, cependant, tombe aux mains des Spartiates. Une grande partie des Messéniens (dont Aristomène) s'exilent, notamment en Arcadie et en Italie méridionale, à Rhégion ; les autres sont réduits au sort d'hilotes.

Troisième Guerre

La troisième guerre messénienne (464-455 av. J.-C.) est la révolte des hilotes. Après un long siège derrière les remparts d'Ithome, les Messéniens sont contraints de s'exiler à Naupacte.

« Mythologiquement », le premier roi de la région est Lélex, qui lui a donné son nom. Après sa mort, son fils aîné, Mylès, lui succède sur le trône, tandis que le plus jeune, Polychaon, demeure simple citoyen jusqu'au jour où il épouse Messène, fille de Triopas fils de Phorbas, qui vient d'Argos. Or Messène nourrit un certain orgueil à cause de son père : en puissance et en dignité, il surpasse tous les Grecs. Aussi n'estime-t-elle guère honorable que son mari ne soit qu'un modeste citoyen. C'est pourquoi elle réunit une armée d'Argiens et de Spartiates et marche sur la région, et à toute cette terre est alors imposé le nom de Messénie (du nom de l'épouse de Polychaon), où de nombreuses cités sont créées, parmi lesquelles Andania, siège du royaume. Polychaon et Messène sont donc les premiers souverains à régner sur la Messénie. Après cinq générations, Polychaon n'ayant plus de descendance, Périérès, fils d'Éole, est appelé à régner. De Gorgophoné fille de Persée, il a deux fils, Apharée et Leucippos. Le premier monte sur le trône. Il fonde une cité, à laquelle il donne le nom de sa femme, qui est fille d'Œbalos : Aréna. (Comme Gorgophoné a été mariée à Œbalos, Aréna était aussi la demi-sœur d'Apharée.)

Voir aussi : Héraclides, Cresphontès

Les causes de la première guerre de Messénie

Les Lacédémoniens, qui déjà n'appréciaient guère les Messéniens en raison de la fraude commise par Cresphontès à l'occasion du tirage au sort, disent que les hostilités furent provoquées par le meurtre de Téléchlos et par le fait que Polycharès ne leur a pas été livré. À propos du meurtre de Téléchlos, les Messéniens opposent la version que j'ai commentée par ailleurs ; ils avancent que les enfants d'Aristodème, s'ils avaient été brouillés avec Cresphontès, n'auraient jamais remis son fils Épytos sur le trône de Messénie.

Ils ajoutent n'avoir jamais livré Polycharès à la vengeance des Lacédémoniens, car les Lacédémoniens eux-mêmes ne leur remirent pas Évaephnos. Ils étaient cependant disposés à s'expliquer devant le conseil des amphictyons auprès des Argiens, auxquels les rattachaient des liens de sang, et à s'en remettre au tribunal d'Athènes, qu'on appelle l'aréopage, puisque ce tribunal, depuis les temps les plus reculés, jugeaient les causes de crimes de sang.

Pourtant les Messéniens disent que ce ne sont pas là les motifs pour lesquels les Lacédémoniens firent la guerre ; que, dans leur soif de pouvoir, ils combinèrent des actes contre leurs terres, et de même ils commirent ainsi d'autres méfaits. Précisément, ils leur reprochent leur comportement envers les Arcadiens et les Argiens : les Spartiates ne se lassèrent jamais de s'arroger quelque partie de leurs territoires. De plus, lorsque Crésus leur fit adresser des dons, ils furent les premiers à se lier d'amitié avec un barbare, au moins depuis que Crésus avait réduit en esclavage l'ensemble des Grecs d'Asie, et en particulier ces Doriens établis sur le continent, en Carie.

Du reste, quand les chefs Phocéens se furent emparés du trésor de Delphes, ce n'est pas seulement à titre personnel et privé que les rois de Sparte eurent leur part des biens du dieu, et avec eux les personnalités les plus en vue ; mais la magistrature et la gérousie en eurent aussi publiquement. Poursuivant leur réquisitoire, les Messéniens disent que la preuve la plus éclatante, que les Spartiates ne reculeraient devant aucune monstruosité, est leur alliance avec Apollodore, le tyran de Cassandra.

[...] Voici donc quelles furent, selon les deux camps, les causes de la guerre.

Pausanias

Exhortations au combat

I. « Combattons avec courage pour cette terre, mourons pour nos enfants, n'épargnons plus nos vies.

Jeunes gens, battez-vous demeurant l'un contre l'autre ; que nul ne commence honteusement à fuir ou à trembler. Faites naître en vos cœurs un grand et vaillant courage, et oubliez l'amour de la vie en luttant contre des hommes.

Et les vieillards, dont les genoux ne sont plus agiles, ne fuyez pas en abandonnant des vieillards. Car c'est une laide chose que, tombé aux premiers rangs, gise à terre, en avant des jeunes hommes, un vieillard à tête chenue, à barbe blanche, exhalant dans la poussière son âme vaillante, tenant dans ses mains l'organe sanglant de sa virilité...

Mais tout sied au jeune homme : tant qu'il possède la belle fleur de la jeunesse, vivant les hommes l'admirent, les femmes le chérissent ; il est beau encore, tombé, au premier rang. »

II. « Vous êtes les fils de l'invincible Héraclès : courage ; Zeus n'a pas encore détourné sa face.

Ne craignez pas le grand nombre des ennemis ; n'ayez peur ; que le soldat tienne son bouclier dressé contre les premiers rangs.

Qu'il prenne en haine sa vie ; et que les noires chances de la mort, il les aime comme les clartés du soleil... »

III. « Je ne regarderais pas, j'estimerais pour rien dans un homme la vitesse et la supériorité dans la lutte, eût-il la taille et la force des Cyclopes, plus de légèreté que Borée, plus de grâce que Tithon, de plus grandes richesses que Midas et Cinyras, plus de puissance royale que Pélops le Tantalide, un langage plus doux qu'Adraste, eût-il toutes les gloires du monde, s'il n'a pas la vertu guerrière.

Un homme n'est pas bon à la guerre, s'il n'ose regarder le meurtre et le sang et s'il ne brûle de se battre face à face avec l'ennemi »...

Tyrtée