motet

(lat. ; motulus, motettus, diminutif de motus, « texte »)

Partition de Jean-Sébastien Bach
Partition de Jean-Sébastien Bach

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Genre de musique dont la définition a beaucoup évolué.

Au Moyen Âge, le motet est d'abord une voix de la polyphonie, puis l'ensemble de la composition où figure cette voix. Le motet médiéval est exclusivement polyphonique, et le terme se réfère principalement à la forme, de sorte qu'il s'applique indifféremment à la musique religieuse ou profane. À partir du xvie siècle au contraire, il se réfère principalement à sa destination religieuse, et comme tel peut faire appel aux formes les plus diverses, y compris monodiques.

1. Au sens premier, le terme motet désigne un texte mis sur les parties vocalisées de l'organum, et par extension la voix munie de ce texte, avant de s'étendre à l'ensemble de la composition. Ce sens a été longtemps conservé, et jusqu'à la fin du xive siècle au moins, on a continué à appeler motet, dans une polyphonie, la partie située immédiatement au-dessus du ténor, de même que triple et quadruple les voix situées au-dessus du motet, même quand cette numérotation ne correspondait plus à la réalité.

2. En tant que genre, le motet médiéval se caractérise par l'indépendance rythmique de chacune des voix, contrepointée à une teneur (lat. tenor) d'abord préexistante et d'origine liturgique, plus tard indifféremment profane ou religieuse et enfin librement composée selon des règles assez strictes.

À l'exception de la teneur, chaque voix est munie d'un texte indépendant qui se chante en même temps que les autres, de sorte que chaque voix chante un texte différent. À partir du xive siècle, on adjoint fréquemment à la teneur une contre teneur (lat. contratenor, ou en abrégé contra) de même style qu'elle, qui deviendra plus tard le bassus ou partie de basse, repoussant le ténor dans la position qui est restée la sienne. Au xiiie siècle se développe un motet profane analogue au motet religieux, et l'indépendance des voix s'accentue au point que l'on trouve souvent, surtout à la fin du xiiie siècle, une teneur d'origine liturgique, une voix de motet latine de caractère moralisateur et un triple vernaculaire profane et galant. À partir du xve siècle, le mélange des textes n'est plus pratiqué qu' exceptionnellement, le motet profane tombe en désuétude, la différence d'écriture entre teneur, contre-teneur et les autres voix s'amenuise, et le motet prend peu à peu l'acception qui restera la sienne ensuite (voir 3.)

3. En perdant ses caractéristiques musicales formelles et une fois disparu le motet profane, le motet finit par n'être plus considéré que comme un morceau polyphonique religieux sans autre spécificité que la liberté de ses paroles, généralement latines dans l'usage catholique, indifféremment latines ou vernaculaires dans l'usage protestant (motets de J.S. Bach), en excluant celles textuellement empruntées à l'Écriture sainte. Le terme s'est étendu même aux chants monodiques répondant à cet unique critère (par exemple O salutaris).

4. Au xviie siècle, une nouvelle extension de sens s'est manifestée à partir d'un nouvel office, dit salut (ou bénédiction) du Saint-Sacrement, consistant essentiellement dans l'ostension de l'Hostie et le chant de motets (au sens no 3), suivis du Tantum ergo, d'une bénédiction silencieuse et d'un chant de sortie. Le mot motet a alors désigné les morceaux de musique exécutés à cette occasion, quelle que soit l'origine des textes pourvu qu'ils soient latins. Le motet pris dans ce nouveau sens a connu une grande efflorescence à la cour de Versailles, où il s'est divisé en deux grandes catégories, selon le degré de solennité de l'office : le petit motet, pour 1 à 3 solistes accompagnés par l'orgue (plus, éventuellement, quelques instruments en petit nombre), qui faisait entendre le texte d'un bout à l'autre, avec peu de répétitions de paroles, et le grand motet ou motet à grand chœur, généralement consacré à un psaume ou à un cantique de grande longueur, dont chaque verset était traité individuellement en faisant alterner solos, ensemble (duos, trios, etc.) et chœurs, avec l'orgue et un orchestre parfois important, incluant de larges développements et de fréquentes répétitions de paroles. Le maître du grand motet versaillais a été M.-R. Delalande, et le Magnificat de Bach est exactement traité dans la forme du grand motet français.

Giovanni Pierluigi da Palestrina, motet Sicut cervus desiderat
Giovanni Pierluigi da Palestrina, motet Sicut cervus desiderat
Partition de Jean-Sébastien Bach
Partition de Jean-Sébastien Bach