musique franco-flamande

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Le terme de musique franco-flamande est couramment utilisé par les musicologues pour désigner le vaste foyer où se développa la polyphonie vocale, profane et religieuse, après la période de l'Ars nova et avant l'ultime floraison de la Renaissance, c'est-à-dire à la fin du xive et durant presque tout le xve siècle.

Géographiquement, ce foyer se confond avec le duché de Bourgogne, fondé en 1363 lorsque Jean le Bon en donna la possession à son fils Philippe le Hardi, et agrandi en 1430 par l'annexion des provinces septentrionales. Le duché perdit son existence politique en 1482, avec le rattachement de la Bourgogne à la couronne de France, tandis que les Flandres passaient à l'empire. Mais il avait constitué, un siècle durant, une zone d'influences et de rayonnement artistique intense entre le royaume de France et les possessions germaniques.

Pour bien saisir ce que signifie cette expression de musique « franco-flamande », il faut la rapprocher d'une réalité historique, celle de la guerre de Cent Ans. Pendant cette période, en effet, la vie créatrice avait reflué des régions occidentales, où se déroulaient les combats, vers le duché de Bourgogne, où les arts étaient largement favorisés en de nombreuses villes, de Dijon à Anvers, en passant par Cambrai ou Arras, Saint-Quentin ou Bruges. Chapelles ducales et service des églises accueillaient les musiciens, que les princes emmenaient d'ailleurs dans leur suite lors de leurs nombreux déplacements, suscitant ainsi de fructueux échanges artistiques. Poètes-musiciens vivant à l'ombre des églises, parfois prêtres eux-mêmes, ces compositeurs circulent souvent beaucoup, menant une véritable carrière internationale, comme Brumel. Certains s'en vont même jusqu'en Italie du Nord, dans des centres tels que Milan ou Ferrare (Obrecht y est mort).

Lorsqu'ils écrivent des chansons polyphoniques profanes, c'est en langue française ­ la langue que parlent la plupart d'entre eux ­, ce qui les rattache à la tradition de l'Ars nova. Mais ils n'en sont pas moins et avant tout hommes des provinces du Nord ; leur attrait pour l'emploi d'une polyphonie complexe dans la musique religieuse va faire progresser considérablement l'écriture contrapuntique savante, qui va ensuite se répandre par toute l'Europe du xvie siècle. À la fin du xve siècle, en effet, lorsque finit la guerre de Cent Ans, le style religieux de la musique franco-flamande prend ses distances d'avec celui du gothique français pour s'européaniser, en même temps qu'il perdra de sa sévérité et du caractère de jeu savant, raffiné mais abstrait, qu'il avait fini par revêtir.

À la musique franco-flamande se rattachent les principaux musiciens suivants : Gilles Binchois (Mons v. 1400-Soignies 1460), Guillaume Dufay ( ? v. 1400-Cambrai 1474), Anthoine Busnois (Busne ?-Bruges 1492 ?), Johannes Ockeghem (Flandres v. 1425-Tours v. 1495), Josquin Des Prés (Picardie v. 1440-Condé-sur-Escaut 1521 ?), Jacob Obrecht (Berg-op-Zoom 1450-Ferrare 1505), Loyset Compère ( ? v. 1450-Saint-Quentin 1518).

Si la notion de « musique franco-flamande » demande à être précisée et utilisée avec discernement, celle d'« école franco-flamande », parfois employée, ne recouvre quant à elle aucune réalité historique ni artistique, du fait de la multiplicité des centres musicaux et de la diversité des compositeurs qui s'y rencontrent.