Alessandro Stradella

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Compositeur italien (Rome 1644 – Gênes 1682).

D'ascendance noble, il fut chantre à San Giovanni dei Fiorentini, puis à l'Oratorio del Crocifisso. Appelé à Venise en 1676, après avoir été expulsé de Rome pour complicité dans une escroquerie, il revint dans sa ville natale, accompagné de la cantatrice Ortensia Grimani, mais dut s'enfuir à nouveau, poursuivi par des tueurs à gages au service du mari de la dame. Blessé gravement par ceux-ci à Turin, il reprit son existence errante, toujours menacé par la vengeance de l'époux jaloux, pour finir poignardé à Gênes en compagnie de sa maîtresse. Malgré cette dimension de musicien maudit qui devait lui valoir les sympathies des romantiques (et, de fait, Niedermeyer et Flotow, entre autres, devaient tirer des opéras de son existence aventureuse), Stradella est surtout important à nos yeux pour l'œuvre qu'il laisse (et dont la plus large part est conservée à l'état de manuscrits dans de nombreuses bibliothèques italiennes et européennes).

Dilettante quant à sa formation, il apparaît cependant comme l'un des maîtres les plus inventifs de son temps, faisant valoir un mélodisme intense, un dynamisme et un lyrisme qui permettent de l'identifier rapidement. Il a abordé tous les genres du xviie siècle, les formes instrumentales, comme celle toute nouvelle du concerto grosso, dont il peut être considéré comme le codificateur, sinon le créateur, et, bien entendu, les formes vocales comme la cantate et l'oratorio qu'il marque également de sa griffe personnelle. Puissamment expressif, l'oratorio San Giovanni Battista est, à cet égard, un authentique chef-d'œuvre où Stradella joue en fresquiste des contrastes d'atmosphère, des effets de couleurs et de rythmes. Et, grâce au recul que permet aujourd'hui la musicologie, nous percevons mieux la place primordiale que le compositeur occupe dans l'évolution de l'école italienne entre Carissimi et Alessandro Scarlatti, sans parler de son intuition déjà romantique de la confession dramatique.