Andrzej Kuśniewicz

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Romancier polonais (Kowenice 1904 – Varsovie 1993).

Né en Galicie autrichienne dans une famille aristocratique polonaise, Kuśniewicz reçoit l'éducation d'un jeune noble aisé, sillonne l'Europe, participe à des courses de voiture en Italie, connaît le tout-Paris, vit l'existence joyeuse de la Vienne de la Belle Époque. Surpris par la Seconde Guerre mondiale en France, il gagne les rangs de la Résistance française, ce qui lui vaut un internement à Fresnes (où il devient membre du parti communiste français) et une déportation à Mauthausen. À la libération, il devient consul de Pologne à Strasbourg, Lille et Toulouse (1945-1949), puis regagne la Pologne marxiste où il affiche un désintérêt absolu à l'égard de toute idéologie et de toute activité politique. Au moment du dégel stalinien, il fait des débuts littéraires avec deux recueils de poèmes, Des paroles sur la haine (1956), la Chandelle du diable (1959). La célébrité lui vient un peu plus tard avec son œuvre romanesque. Ses quinze romans, dont les plus importants sont : Eroica, 1963 ; le Chemin de Corinthe, 1964 ; le Roi des Deux-Siciles, 1970 ; Constellations, 1971 ; la Leçon de langue morte, 1977 ; l'État d'apesanteur, 1973 ; Vitrail, 1980 ; Volte, 1988). Ils connaissent un succès immédiat en Pologne et à l'étranger. Membre étranger associé de l'Académie Goncourt, Kuśniewicz est « un écrivain de carrefour », le plus européen de la littérature polonaise contemporaine. Il a une prédilection pour l'évasion dans le passé (avec une fascination pour le xviiie s.) : il présente tour à tour les images de sa Podolie natale, fraîche et sensuelle, terre de ses premiers émois, et celles d'une Autriche galante et moribonde, gravée dans la mémoire de l'adolescent avec ses déguisements et ses trompe-l'œil, son ascèse et ses paradis. Après la projection des fantasmes qui l'ont conduit vers le néant (le Chemin de Corinthe), après le recours à une culture qui s'est transformée en langue morte (la Leçon de langue morte), Kuśniewicz se lance à la recherche de ses racines pour découvrir la dérision de l'héritage non choisi (Mélanges de mœurs). Le déclin de la culture européenne est au cœur de la plupart de ses derniers romans. Il exploite les acquis de la narration contemporaine : éclatement linéaire du discours, multiplication des points de vue, jeu des temps et des modalités. Il use volontiers du présent pour compromettre le passé, du passé pour ébranler le présent. Kuśniewicz est une personnalité littéraire originale dans le paysage polonais, se voulant un dilettante lorsque la plupart des écrivains de son pays engageaient leur plume au service de la politique. « Je n'ai jamais eu l'impression d'avoir une mission à accomplir, affirme-t-il. Mon écriture est l'activité d'un retraité. »