Anne Hébert

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Poétesse et romancière québécoise (Sainte-Catherine-de-Fossambault 1916 – Montréal 2000).

Fille du critique Maurice Hébert et cousine de Saint-Denys Garneau, la jeune fille exprime l'angoisse de la solitude dans des poèmes (les Songes en équilibre, 1942) et des nouvelles (le Torrent, 1950), avant de célébrer sa réconciliation avec le monde et la vie (Mystère de la parole, 1960). Le Tombeau des rois (1953) est son recueil essentiel, initiatique. Descendre aux enfers, c'est nommer « ce qui habite la caverne de l'âme ». Dans des formes maigres, rigoureuses, à la Giacometti, l'amour et la mort sont gravés dans la pierre pour que refleurissent les « mains plantées au jardin ». La violence de la nouvelle éponyme du Torrent – « J'étais un enfant dépossédé du monde... » – se retrouve dans Kamouraska (1970), son roman le plus romanesque, réalisé au cinéma par Claude Jutra. Vers 1880, dans une société où se mêlent les traditions de la paysannerie française et les coutumes anglaises, une femme mûre revit la mort de son premier mari à travers l'agonie du second. Un point de départ historique (fait divers de 1839) provoque une plongée dans l'imaginaire et une remontée vers un temps quasi mythique. Un mouvement analogue de retour sur soi, dans la ville du passé, est dessiné par l'actrice vieillissante du Premier Jardin (1988). Les Enfants du sabbat (1975) et Héloïse (1980) sont d'une veine fantastique, souterraine. Les Fous de Bassan (1982), porté au cinéma par le jeune Yves Simoneau, s'inspire d'un mystère policier dans le rude paysage gaspésien. Les derniers récits, à partir de l'Enfant chargé de songes (1992) – qui doit moins à Mauriac qu'à Saint-Denys Garneau –, sont sobres, presque lumineux.