Henri Estienne

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire mondial des littératures ».

Imprimeur et humaniste français (Paris 1531 – Lyon 1598).

Fils aîné de Robert Estienne, il rejoignit son père à Genève en 1551 et, à sa mort, reprit l'imprimerie familiale. Helléniste de premier ordre, il s'intéressa de près à la lexicographie, notamment avec son Thesaurus graecae linguae (1572). Cet ouvrage monumental en cinq volumes, dont la publication appauvrit considérablement Estienne et qui servit de base à tous les dictionnaires grecs qui suivirent, est non seulement un lexique de la langue grecque, mais une réflexion richement illustrée sur les possibilités d'expression rationnelle et psychologique de la langue d'Homère et de Platon. Malgré son goût pour les langues antiques, Estienne fut aussi l'un des plus ardents défenseurs de la langue française : son Traité de la conformité du langage français avec le grec (1561) montre que le français, plus proche du grec que toute autre langue, est la meilleure des langues modernes, et supérieure même au latin. Les Deux Dialogues du nouveau langage françois italianisé (1578) sont une satire de l'italianisme de la cour d'Henri III ; dans le même esprit, et sur la commande du roi Henri III lui-même, le Projet du livre intitulé : « De la précellence du langage françois » (1579) veut prouver que le français offre des « commodités plus grandes » que les autres langues à l'éloquence, au droit et à l'histoire. La production d'Estienne se distingua également par une satire virulente du catholicisme et des mœurs du siècle, l'Apologie pour Hérodote (1566), ouvrage dont le dessein audacieux était de soutenir, contre ceux qui la contestaient, la véracité des anecdotes extraordinaires rapportées par l'historien grec Hérodote, par la comparaison de ces dernières à la réalité contemporaine. Grand éditeur et commentateur de textes gréco-latins, Estienne fut le premier à publier une traduction latine intégrale des Hypotyposes pyrrhoniennes de Sextus Empiricus (1562), ce qui contribua fortement à la diffusion du scepticisme dans l'Europe moderne.