Gilles Binchois ou Gilles De Bins ou Gilles De Binche

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la musique ».

Compositeur franco-flamand (Mons v. 1400-probablement Soignies, près de Mons, 1460).

Une célèbre miniature du Champion des dames de Martin Le Franc représente d'un côté Dufay vêtu d'une robe bleue d'allure cléricale, près d'un orgue portatif, et de l'autre Binchois en tunique rouge, portant une harpe. Fils de Jean de Binche, bourgeois de Mons, Binchois fut ordonné prêtre. Fut-il soldat auparavant, comme l'indique le texte de la Déploration sur la mort de Binchois (« Et sa jeunesse fut soudart »), mis en musique par Ockeghem ? En tout cas, on ignore les circonstances de sa formation musicale. Binchois est mentionné pour la première fois en 1424. Il fut, à Paris, au service de William de la Pole, comte, puis duc de Suffolk et musicien lui-même. Il suivit son maître en Hainaut et, peut-être, en Angleterre. Mais c'est au service du duc de Bourgogne, Philippe le Bon, qu'il fit l'essentiel de sa carrière. Il eut le grade de chapelain et reçut des prébendes non négligeables attachées à son titre de chanoine de Mons et de Soignies.

Bien que sa musique religieuse soit souvent mentionnée dans les archives, ce qui nous en est parvenu est beaucoup moins abondant que sa musique profane. Fortement influencées par le style des chansons, ces compositions religieuses sont généralement à 3 voix. On a conservé des motets, des hymnes, des magnificats et des fragments de messes. Dans ces derniers, la technique du cantus firmus n'apparaît pas et, si Binchois puise parfois sa matière mélodique dans les chants grégoriens en les paraphrasant, l'esprit de ces fragments reste proche de celui des chansons. Les compositions psalmodiques ou hymniques demeurent extrêmement simples et contrastent avec la variété d'écriture que l'on rencontre dans les motets : isorythmie dans Nove cantum melodie, paraphrase dans Ave Regina coelorum.

Binchois excella dans la musique profane. Plusieurs copies de certaines de ses chansons existent dans différents manuscrits, témoignant de la popularité qu'elles connurent. Les 55 chansons authentifiées, presque toutes à 3 voix et empruntant les structures poétiques à forme fixe du Moyen Âge, comprennent 47 rondeaux, 7 ballades et une chanson de forme libre (Filles à marier, exceptionnellement à 4 voix). Les poètes y chantent l'amour courtois ; la majeure partie d'entre eux reste inconnue, bien qu'on puisse citer Christine de Pisan (Dueil angoisseux, ballade), Alain Chartier (Triste Plaisir, rondeau) ou Charles d'Orléans (Mon cuer chante joyeusement, rondeau). Les chansons de Binchois ont une beauté mélodique certaine et leur sonorité est rendue plus chaleureuse par la présence de tierces et de sixtes (emploi du faux-bourdon et influence anglaise). La mélancolie, qui en est souvent le caractère dominant, rend surprenante l'appellation de « père de joyeuseté » donnée à Binchois par Ockeghem.

Sans avoir la même liberté, le même esprit d'invention que son contemporain Guillaume Dufay, Binchois fut l'admirable serviteur d'un art de cour raffiné.