Journal de l'année Édition 2001 2001Éd. 2001

Peu à peu, c'est un véritable soulèvement qui éclate dans les territoires occupés, une nouvelle intifada. Mais, à la différence de 1987, les jets de pierre des chebab (adolescents) sont désormais relayés par les tirs des policiers palestiniens et ceux, moins précis, de quelques groupes armés désignés sous le nom de Tanzim et dirigés par Marwan Barghouti. La répression israélienne n'en est que plus ferme. Tsahal (l'armée israélienne) tire sur la foule à balles réelles, fait donner les chars et les hélicoptères de combat. À l'intérieur de l'État hébreu, les Israéliens arabes qui se solidarisent avec les Palestiniens des territoires meurent sous les balles de leur propre armée. Des tireurs israéliens embusqués reçoivent l'ordre de viser tout « malfaiteur palestinien âgé de plus de douze ans » ; ils ne s'en privent pas. Les Palestiniens répliquent comme ils le peuvent, en attaquant les colons ou, par la colère de la foule, en lynchant deux réservistes de Tsahal après deux semaines de crise.

Celle-ci atteint son paroxysme dans la soirée du 20 au 21 novembre. En représailles à un attentat palestinien contre un bus scolaire israélien, les hélicoptères et les navires de Tsahal bombardent la bande de Gaza deux heures durant, visant des objectifs stratégiques (siège de la police, QG de l'Autorité palestinienne...), mais n'épargnant pas les habitations. Bilan physique, au terme de cet épisode, de deux mois d'engrenage violent : 280 morts, dont une immense majorité (250) sont palestiniens. Bilan diplomatique : le processus d'Oslo est à nouveau au point mort. Pire : il est privé d'un de ses médiateurs privilégiés, puisque l'Égypte a décidé, comme elle l'a annoncé lors du sommet arabe du Caire en octobre, de geler ses relations diplomatiques avec Israël. De quoi, en somme, s'interroger sur la validité d'un processus de paix qui, en se fondant sur un rapport de force par trop déséquilibré, semble devoir ne jamais parvenir à satisfaire aucune des parties.

Benjamin Bibas

« Un usage disproportionné de la force »

Dans le monde entier, la répression israélienne a fait l'objet d'une réprobation unanime. Les pays arabes, réunis au Caire à la fin octobre, ont parlé de « massacre collectif » des Palestiniens. La Commission des droits de l'homme des Nations unies a condamné Israël pour son « usage disproportionné de la force contre des civils innocents et désarmés », n'hésitant pas à qualifier l'attitude des forces israéliennes contre la population palestinienne de « crime de guerre ». Même la diplomatie américaine, peu suspecte d'entretenir des relations complices avec les Palestiniens, a parlé, au sujet des bombardements de Gaza, d'un « usage excessif de la force ». Afin d'éviter qu'une telle violence ne se renouvelle, Israéliens et Palestiniens ont convenu de mettre en place, avec les États-Unis et en collaboration avec le secrétariat général de l'ONU, une « commission chargée d'enquêter sur les événements » et d'en établir, à terme, les responsabilités.