sir Vincent Brian Wigglesworth

Entomologiste britannique (Kirkham, Lancashire, 1899-Cambridge, Cambridgeshire, 1994).

À 6 ans, Vincent Wigglesworth a déjà trouvé sa vocation : il se consacrera à l'étude des insectes. En attendant, il observe attentivement tous ceux qui lui tombent entre les mains et fait des « découvertes » surprenantes, comme celle de leurs métamorphoses. Jeune soldat engagé dans les troupes anglaises combattant en France durant la Première Guerre mondiale, il oublie parfois que la bataille fait rage autour de lui en suivant des yeux les évolutions de quelque papillon égaré dans la zone de feu.

En 1918, il reprend ses études à Cambridge. Après avoir obtenu ses diplômes de physiologie et de zoologie, il reste deux années supplémentaires à l'université pour approfondir ses connaissances en biochimie, sous la direction de Frederick Gowland Hopkins (1861-1947), considéré comme le fondateur de cette discipline en Angleterre. Il se spécialise dans la physiologie des insectes, c'est-à-dire dans l'étude de leurs fonctions et des propriétés de leurs organes et de leurs tissus. Il veut, en effet, comme il le dit, comprendre les raisons de leur exceptionnelle résistance à des conditions de vie insupportables pour les autres animaux. Il veut savoir comment ils se nourrissent, croissent et se reproduisent.

Après Cambridge, il étudie à Londres, où il acquiert une formation médicale dans l'un des grands hôpitaux de la ville.

En 1926, grâce à ses connaissances sur la physiologie des insectes, il se voit confier un poste de maître de conférences en entomologie médicale à l'École d'hygiène et de médecine tropicale de Londres.

Ses fonctions l'amènent alors à voyager dans quelques-unes des régions les moins salubres du monde : ainsi, en 1928, il étudie les ravages de la maladie du sommeil au Nigeria quand éclate l'épidémie de peste qui fait de très nombreuses victimes dans les quartiers pauvres de la capitale, Lagos ; il est également présent à Ceylan (aujourd'hui le Sri Lanka) en 1934, au moment de la grande épidémie de paludisme qui tue quelque dix mille personnes.

C'est entre 1934 et 1936 que Wigglesworth fait ses principales découvertes, qui concernent le rôle des glandes endocrines dans le processus de la mue et de la métamorphose chez les insectes. Pour ses travaux, il utilise comme « cobaye » le rhodnius, une punaise se nourrissant de sang (hématophage) répandue en Amérique du Sud et vivant aux dépens des animaux sauvages. La taille extrêmement petite des sujets d'étude rend ses expériences fort délicates, et Wigglesworth fait preuve d'une exceptionnelle habileté pour y appliquer les techniques classiques de l'endocrinologie : destruction des glandes, implantation, ligature, parabiose (soudure expérimentale entre deux individus de la même espèce mais se trouvant dans un état hormonal différent, en vue d'étudier leur influence réciproque).

Wigglesworth a montré, d'une part, qu'une glande à sécrétion interne, le corps allate, produit une « hormone juvénile » qui maintient les caractères larvaires chez le jeune insecte ; et, d'autre part, que certaines cellules nerveuses du cerveau, les « cellules neurosécrétrices », sont elles-mêmes la source d'une autre hormone, dite « de croissance et de mue », qui, lorsque l'hormone juvénile a disparu, permet à la métamorphose de se produire.

De 1936 à 1944, Wigglesworth est chargé du cours d'entomologie médicale à l'université de Londres, puis à l'université de Cambridge, où il devient, en 1952, professeur de biologie.

L'année 1943 a marqué un tournant dans sa carrière : abandonnant la médecine pour l'agriculture, il est entré à l'Agricultural Research Council (Conseil de recherches en agriculture) comme directeur du département de la physiologie des insectes.

Des avertissements précoces

Des avertissements précoces



Vincent Brian Wigglesworth est parmi les premiers scientifiques à évoquer les grands risques que fait courir à l'environnement l'utilisation de doses massives de DDT. Ainsi, dans un article publié en 1945 aux États-Unis, où l'on emploie alors l'insecticide depuis déjà trois ans, il écrit : « Il est évident que le DDT est une arme à double tranchant. Nous voyons maintenant à quel point il peut détruire l'équilibre existant entre les ennemis des insectes et leurs amis. » Son expérience d'entomologiste lui permet de prédire l'apparition de races animales résistantes au DDT. Il insiste, dans le même article, sur la nécessité de multiplier les études portant sur l'écologie des insectes. Enfin, il recommande surtout de recourir à d'autres insecticides, plus spécifiques, donc moins nocifs que le DDT pour la chaîne des êtres vivants.