Don Van Vliet, dit Captain Beefheart

Chanteur de rock progressif américain (Glendale, Californie, 1941-Arcata, Californie, 2010).

Adolescent, le jeune Californien se lance dans la sculpture avant de se consacrer au rock à partir de 1964. Cette année-là, il monte avec Alex St Clair Snouffer (guitare), Doug Moon (guitare), Jerry Handley (basse) et Paul Blakely (batterie) la première mouture de son fameux Magic Band et prend le nom de Captain Beefheart. Trois ans plus tard, à la sortie du premier album du groupe (où Ry Cooder vient jouer de la guitare), Safe As Milk, ce personnage haut en couleur s'impose d'emblée comme une des figures de proue de l'underground californien.

Le garçon est hirsute et volontiers fantasque. Son rock est chaotique, obsédant et sombre, surchargé de bruitages, d'arrangements incongrus et de textes délibérément surréalistes. L'année suivante, Strictly Personal, un de ses meilleurs disques (mais aussi un des plus ardus), confirme le statut très particulier de cette star à part pour qui le rock semble être un exercice dadaïste. En 1969, Captain Beefheart retrouve un vieil ami de classe, presque aussi fou que lui, Frank Zappa. Le « Boulez du rock » « participe à l'enregistrement du troisième album de Beefheart (Trout Mask Replica), pendant que ce dernier collabore au nouveau disque des Mothers Of Invention, le chef-d'œuvre Hot Rats (le Captain chante sur Willie The Pimp).

Inclassable. À mi-chemin entre un rock psychédélique en vogue à l'époque et une musique très free inspirée par le jazzman Ornette Coleman (avec lequel il jouera en 1982), l'œuvre de Captain Beefheart et de ses complices — on trouve désormais Zoot Horn Rollo (de son vrai nom Bill Harkleroad) à la guitare et Rockette Morton (né Mark Boston) à la basse — fait désormais des émules des deux côtés de l'Atlantique. En 1974, notre homme signe un contrat avec Virgin, puis se débarrasse de son groupe. L'année suivante, il retrouve Zappa (avec lequel il était brouillé) le temps d'un superbe album live enregistré à Austin, Texas (Bongo Fury). De plus en plus indépendant, Beefheart s'est taillé une réputation de vieil ours mal léché (il vivait en ermite dans une caravane !), préférant visiblement ses excursions dans les déserts de Californie aux tournées plus rock and roll. À partir des années 1980, Captain Beefheart délaisse peu à peu la musique la musique (un album de temps en temps, essentiellement des rééditions) et se consacre à la peinture (on le dit très inspiré par Bacon, et les pochettes de ses disques, comme Doc At The Radar Station ou Shiny Beast, permettent de se faire une petite idée de son art). Reconnu en Europe, royalement ignoré en tant que musicien dans son propre pays (où ses toiles atteignent par ailleurs des prix astronomiques), Captain Beefheart est resté un de ces poètes rock de génie qui brouillent tous les genres, toutes les pistes.