Pompeo Batoni

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la peinture ».

Peintre italien (Lucques 1708  – Rome 1787).

Après avoir fréquenté les académies de dessin de Lucques, il s'établit à Rome en 1727 et s'orienta vers des peintres de descendance marattesque tels que Conca, Masucci et surtout Imperiali. Ce dernier, le plus classique de tous, le moins touché par le Rococo, fut son vrai maître et le mit dès cette époque en relation avec le milieu anglais.

Batoni, durant ses années de jeunesse, de 1730 à 1740, effectua un retour aux sources du Classicisme ; il dessina d'après l'antique (dessins à Windsor, Eton College Library), copia Raphaël et les Carrache. Il produisit alors les œuvres les plus classiques de sa carrière : les tableaux d'autel de S. Gregorio al Celio (v. 1732-1733), avec la Vierge avec quatre bienheureux, sa première œuvre importante, et de SS. Celso e Giuliano (1738) ; le Christ en gloire avec des saints ; Saint Philippe Neri adorant la Vierge (v. 1733-1738, Rome, anc. coll. Incisa della Rocchetta) ; La Vierge, l'Enfant et saint Jean Népomucène (Brescia, S. Maria della Pace). Ce classicisme va parfois jusqu'au purisme d'un Dominiquin ou d'un Sassoferrato (Visitation, Rome, coll. Pallavicini). Batoni s'exprima également dans le domaine du paysage, animant de figures les vues de Jan Frans Bloemen, dit l'Orizzonte.

À partir de 1740, Batoni s'éloigne de ce rigorisme appliqué et de la stricte observance des modes bolonaises. Son revirement est marqué d'abord par un chef-d'œuvre, la Chute dbe Simon, le Magicien, tableau d'autel commandé par le pape Benoìt XIV pour Saint-Pierre, puis installé à S. Maria degli Angeli, œuvre dramatique, presque romantique ; il se voit également dans les tableaux allégoriques (Le temps détruit la beauté, 1746, Londres, N. G.) et mythologiques : Achille et Chiron (Offices) ; Achille à la cour de Lycomède (v. 1746, id.) ; Hercule à la croisée des chemins (v. 1743, Pitti) et Hercule enfant (id.) ; Fuite de Troie (v. 1750, Turin, Gal. Sabauda) ; Hercule à la croisée des chemins (id.). Batoni se réconcilie ainsi avec la richesse sensuelle du Baroque. À cette tendance participe l'importance croissante que prend dans son activité le portrait. Grâce au succès de ses portraits du Duc et de la Duchesse de Wurtemberg (1753-1754, Stuttgart, Württembergische Landesbibliothek), Batoni devient le portraitiste européen le plus en vogue au milieu du xviiie s. Cette renommée s'étendit à son activité de peintre d'histoire ; non seulement il représenta Joseph II avec son frère Pierre-Léopold (1769, Vienne, K. M.), mais il envoya des tableaux à sujets mythologiques à l'étranger : par exemple en France (Mort de Marc Antoine, 1763, musée de Brest), à Frédéric le Grand (Alexandre et la famille de Darius, 1775, Potsdam, Sans-Souci), à la Grande Catherine, au Portugal (7 tableaux d'autel pour la basilique du Sacré-Cœur d'Estrela (Lisbonne, 1731-1734). Il peignit en 1757, Benoît XIV présentant l'encyclique Ex Omnibus au comte de Choiseul (Minneapolis, Inst. of Arts), un de ses chefs-d'œuvre. Avant tout, il fut le portraitiste des Anglais du " grand tour ". Parti de la mode française du portrait allégorique propre à lui plaire (la Marquise Merenda en Flore, 1740, Forlí, coll. Merenda ; Dame de la famille Milltown en bergère, 1751, Londres, coll. Mahon ; Isabelle Potocka en Melpomène, Cracovie, musée Czartoryski ; Alessandra Potocka en Polymnie, musée de Varsovie), ayant connu sans doute les débuts du portrait anglais à travers Angelica Kauffman, il créa un type de portrait répondant aux désirs de ses clients britanniques : la représentation du personnage sur un fond de ruines, de campagne romaine ou à côté d'une statue antique. On ne connaît pas moins de 70 portraits, exécutés depuis 1744, d'Anglais du " grand tour " (Henry Peirse, 1755, Rome, G. N. d'Arte Antica ; Un gentilhomme, v. 1760, Metropolitan Museum ; Charles John Crowle, v. 1761-62, Louvre). Avec les années, surtout à partir de 1760, les portraits de Batoni deviennent plus naturels ; toute mise en scène a disparu et le personnage apparaît à mi-corps, le plus souvent, saisi dans sa spontanéité (Mons. Onorato Caetani, 1782, Rome, fondation Caetani ; le Prince Giustiniani, 1785, Rome, coll. Busiri-Vici).

L'art de Batoni, intermédiaire entre la tradition du Classicisme romain et le Néo-Classicisme naissant, eut une influence importante sur David.